Chapitre 32 Souvenir des flammes

5 1 0
                                    

Le temps continue de s'écouler lentement. Nous attendons toujours un signe, nous assurant la victoire. Comme coupé du monde, rien ne nous parvient. Même pas un son, un cri provenant de l'extérieur se fait entendre. Mon cœur tambourine encore et encore de plus belle. J'ai peur, peur de perdre ceux que j'aime.

Aucun signe de réveil de la belle guerrière, je craint le pire. Sa cage thoracique se lève toujours faiblement, même si je constate une certaine évolution qui est loin de me rassurer. Le mestre n'a pas l'air de s'inquiéter contrairement à moi, continuant à me dire que les Dieux sont là pour veiller sur elle, mais je n'arrive pas complètement à me fier à eux. Alors je continuerai à être à ses côtés, faisant tout pour qu'elle revienne parmi nous. 

La sueur se répand sur tout son corps. Pour son confort, je lui essuie le visage avidement. Je parcours chacun de ses traits. Malgré le temps qui passe, je me rappelle de chacun d'eux, restant encrés dans ma mémoire. Son sourire, son nez en trompette, ses yeux ambrés ne m'ont jamais abandonnés. Je distingue une tâche de naissance en forme de couronne au niveau de sa nuque, celle que j'avais repérée le jour de notre rencontre fortuite. 

Sa peau nue sous les draps laisse apparaître la forme de ses seins arrondis. J'aime tout chez elle. Il m'a fallu un seul regard pour que je brûle de désir. C'est la première fois que je ressens autant d'amour pour quelqu'un en si peu de temps. Je suis comme hypnotisée par elle. Il n'y a pas une heure, un jour qui passe sans que je ne pense à son regard ardent. Malheureusement, je sais qu'une potentielle histoire d'amour ne sera pas possible. Elle est une femme, elle ne peut en aucun cas m'appartenir. Je regrette de ne pas être née homme pour pouvoir vivre à ses côtés. Les choses sont ainsi, on ne peut rien y faire. 

Mon visage près du sien, je ressens son souffle me parcourir. Ses lèvres pulpeuses ne m'inspirent qu'une seule chose, d'être embrassées par les miennes. Je m'en veux de penser à ce genre de choses alors qu'elle se trouve entre l'article de la mort. Écœurée par mes pensées malsaines, je recule d'un bon pas, essayant d'occuper mon esprit d'une quelconque façon. J'ai d'autres patients qui attendent d'être soutenus. Ils ont besoin de moi, je ne peux pas m'en détourner pour assouvir à mes désirs enfouis au plus profond de moi. Ils n'ont pas à en payer les conséquences.

Je passe dans tous les rangs de lits armée d'un saut rempli d'eau à rat bord. Je trempe une petite coupelle à l'intérieur et la propose à mes patients afin qu'ils s'hydratent en conséquence. Peu à peu, des forces commencent à leur revenir, alors que la belle reste toujours endormie. Il n'y a aucune évolution malgré le temps qui passe. Cela m'inquiète, je crains pour sa vie.

Veillant toujours sur elle, mes yeux demeurent toujours braqués dans sa direction, c'est plus fort que moi, comme si elle peut effectuer le moindre mouvement à tout moment attestant son réveil imminent. Mais comme toujours, je suis bercée par cette illusion, déçue du résultat. Je dois me faire à l'idée qu'elle ne se réveillera probablement pas. Même si cette pensée me traverse l'esprit de temps à autre, je refuse d'y croire. Tant que son cœur bat, il y aura toujours de l'espoir.

À peine je me pose sur un tabouret pour me reposer quelques instants que mon esprit est toujours obsédé par elle. Des images me reviennent en mémoire, celles de notre rencontre. Je me souviens de chaque moment comme si c'était hier, à commencer par sa lame glacée positionnée sur mon cou et sa voix sensuelle qui m'a parcouru de frissons inexpliqués. C'est bien plus tard que j'ai compris que je venais de tomber amoureuse.

Le feu de cheminée en train brûler intensément dans l'âtre se met à crépiter, me plongeant ainsi dans cet agréable souvenir. Je ne me retrouve plus dans l'étroitesse de la grotte, mais dans la ferme avant qu'elle ne devienne plus qu'une ruine carbonisée par les flammes de l'enfer. Le temps se met en pause quelques instants, me laissant revenir dans la frontière du passé.

Sang du dragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant