Comme toujours, je me lève à la même heure matinale, toujours le plus discrètement possible pour ne pas éveiller les soupçons. Personne dans cette maison est au courant de mes activités douteuses réalisées à l'aube. Si elles le savent, elles m'en auraient empêché, surtout ma mère, qui ne voudrait pas que son fils se retrouve incarcéré. L'inquiéter ne ferait qu'ajouter une dose de stress supplémentaire, très mauvaise pour sa santé.
Je mets ma cape en fourrure, lace mes bottes et me dirige dans l'étable, où ma charrette m'attend toujours. Je charge mes sacs remplis de laine. Il m'en reste encore quelques chargements à vendre jusqu'à la saison nouvelle. Une fois prêt, il est temps pour moi de partir.
Toujours le même chemin parcouru depuis des jours, de toute façon, je n'ai pas le choix de faire autrement. La ferme se trouve vraiment dans un endroit reculé, éloigné des bois, des villes et villages. Aucun commerce ne se trouve à proximité, rendant la vie un peu plus compliquée, surtout quand on n'a pas de chevaux à disposition pour pouvoir se déplacer le plus rapidement possible. Encore une fois, si feu l'empereur ne nous avait pas dépossédés de nos biens, on aurait toujours ceux qu'on détenait depuis fort longtemps.
La route est moins longue et périlleuse que la veille. La neige a fondu, la rendant plus praticable. C'est sans soucis que je rejoins la capitale toujours endormie. Je rentre toujours sans rencontrer aucune difficulté, en montrant mes papiers, même à une heure si matinale de la journée. Les paysans ont toujours cette réputation de lève tôt, ce qui joue à mon avantage.
Fouillant du regard chaque recoin, je m'assure de ne pas être poursuivi, afin de me diriger vers les murailles pour accéder à la grande forêt. Le grappin en main, il est temps de refaire la même mise en scène. Cette fois, je n'ai que huit lapins attrapés dans mon piège. Aucune biche en ce jour, du moins à l'endroit où je cherche habituellement. Elles peuvent être ailleurs, mais je ne préfère pas trop m'attarder là-dessus. De toute façon, ma prise suffit amplement pour me remplir les poches convenablement.
À peine arrivé, je sors rapidement. Ma charrette en main, je reprends la route. Et puis là-bas, la boucherie, suivi par le même train-train quotidien. Sans monter ma garde, je rentre. À ma surprise, je découvre qu'Arno est absent, laissant place à un homme assis sur une chaise, les jambes tendues sur le comptoir, soufflant dans sa pipe, d'où s'en échappent des ronds de fumées blanches. Son visage ne m'est pas inconnu. À vrai dire, je le connais depuis trop longtemps pour ne plus me souvenir de ses traits.
— Tiens, tiens, Derreck, je suis très heureux de te voir, me dit-il toujours avec cet air moqueur qui lui est propre.
Il se lève en tapant du pied pour se joindre à moi.
— Tu n'as vraiment pas changé, reprend-il en me regardant de haut. Toujours l'air aussi bourru.
— Et toi, toujours aussi fourbe.
Cette fois, il m'adresse un sourire en coin, accompagné d'un glapissement. Puis, il se met à me tourner autour.
— Alors, qu'est-ce que tu deviens depuis la dernière fois que je t'ai vu ? C'était quand déjà, psalmodie-t-il en faisant mine de réfléchir. Ça me revient... Le jour de l'exécution de ton père !
À peine a-t-il prononcé ces mots, que je sens la colère monter en moi. J'enfonce mes ongles dans mes paumes pour ne pas le frapper, ce qui représenterait une erreur fatale face au nouvel héritier présomptueux au trône. J'essaye de ne pas la montrer, même si je dois me faire violence pour ne pas exploser.
— Comme tu peux le voir, tout va pour le mieux, dis-je tout en gardant mon calme.
— J'imagine, surtout quand on plonge dans des affaires illégales. La vie ne peut être que belle, jusqu'au moment où on se fait prendre la main dans le sac.
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Sang du dragon
FantasyLyrina, princesse du royaume de Durian, est la seule héritière d'une lignée royale ayant la particularité de se métamorphoser en dragon. Contrairement aux membres de sa famille, elle en est incapable. La principale raison, elle ne possède pas le san...