Chapitre 1 - Carlyle

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Mardi

Il fallait évidemment qu'un collègue vienne à mon bureau se plaindre dix minutes avant mon départ. Épuisé, je rêvais de rentrer chez moi me reposer. Pourtant, je n'eus d'autres choix que d'ouvrir à mon collègue. Swarzt, un magicien violet et un sacré connard. Celui-ci ne m'adressa pas un seul mot et se contenta de me regarder de haut. Malgré mon agacement, je lui adressai un sourire contenu et le fis asseoir dans la salle de soin. Il détaillait l'environnement avec mépris et toujours silencieux. Je sortis le protocole obligatoire et remplis les différents items. Bon sang, je détestais faire ça ! Mon écriture saccadée et illisible - typique des médecins - prouvait ma précipitation. Après quelques minutes, je me tournai vers mon collègue.

— Qu'est-ce qui t'arrive ?

Il me colla sa main sous le nez. Mon agacement grandit davantage devant ce mépris. L'Unité 2 se pensait plus importante que les autres Unités de la Milice et se comportait comme des rois. Ils me bousculaient dans les couloirs, me criaient que c'était mon travail de les guérir en priorité, voire me rabaissaient. Alors lorsque je voyais les Interrogateurs de l'Unité 2, je retenais ma colère pour ne pas les envoyer sur les roses.

En retenant un soupir exaspéré, je me désinfectai les mains avant d'enfiler une paire de gants et de saisir la main de Swarzt. Une plaie sanguinolente cheminait sur le dos de sa main. Une simple coupure qu'il aurait pu gérer lui-même sans venir m'importuner. Sale con. Je nettoyai la plaie pour enlever le sang séché avant de positionner mes mains au dessus de la blessure. Même si je n'aimais pas utiliser ma magie avec des gants en latex, je les gardai.

Je fermai les yeux, visualisant dans mon esprit la coupure. Dans mes veines, je sentis un flux d'énergie chaud se répandre. La perle blanche que je portais autour du cou se mit à briller. Elle dégageait une douce chaleur qui me réconfortait. L'énergie convergea immédiatement jusqu'au bijou, ce réceptacle qui servait à juguler ma magie. Lorsque suffisamment de force fut réunie dans le bijou, je la fis descendre dans mes mains. À nouveau, je visualisai la plaie, puis la guérison. Mes mains étaient brûlantes, je sentais le latex coller à ma peau. Et lorsque l'énergie accumulée dans le bijou se tarit, j'enlevai mes mains. La blessure avait disparu, il ne restait plus rien, pas même une cicatrice. Une vague de fatigue me submergea, j'avais utilisé trop de magie aujourd'hui. 

Swarzt observa sa main un instant avant de se lever et de sortir de mon bureau sans un seul remerciement. Des dizaines d'insultes se déversèrent dans mon esprit mais ne franchirent pas la barrière de mes lèvres. Cet environnement de travail - et surtout les connards de l'Unité 2 - commençait à me taper sur le système. J'aurais voulu choisir mon métier, choisir ce que je voulais faire de ma magie. C'était impossible. J'étais un magicien de la magie blanche et les malheureux qui appartenaient à ce type travaillaient obligatoirement à l'Unité 4 de la Milice ou à l'Unité privée du Conseil. Alors même si je voulais changer de travail, je ne pouvais pas car, au vu de la loi, je n'avais pas le choix. Le Conseil de la magie - l'autorité suprême de notre société de magiciens - n'était pas clément avec les fuyards. Seule la mort attendait les magiciens blancs qui osaient se soustraire à leurs obligations.

Je secouai la tête pour chasser les pensées noires qui m'envahissaient. Un soupir de soulagement m'échappa lorsque je classai les derniers dossiers de la journée. Je me laissai aller contre le dossier de ma chaise. La fatigue me tomba dessus comme une chape de plomb. Je n'avais qu'une envie : rentrer chez moi et dormir. Malheureusement, mon fils m'attendait au lycée et je n'avais pas la force de subir ses reproches si je me désistais au dernier moment. Après un dernier coup d'œil à mon emploi du temps, je raccrochai ma blouse blanche et sortis de mon bureau.

Évidemment, les couloirs étaient vides. Tous mes collègues étaient repliés dans leur bureau ou sur le terrain. Cet endroit m'avait toujours paru sinistre. Les murs gris, le sol blanc, les étagères sombres. Tout était impersonnel et froid. Des frissons désagréables parcouraient mon corps chaque fois que j'entrais dans ce lieu. Je sortis rapidement et l'habitacle tamisé de ma voiture me rasséréna. Je croisai mon regard bleu gris dans le rétroviseur central. Mes yeux clairs traduisaient une sorte de torture intérieure. Mon teint pâlot contrastait avec mes cheveux noirs mi-longs. Ceux-ci tombaient délicatement sur mon front et dans mon cou, masquant les cicatrices que j'avais obtenues lors de ma formation. Je dégageai quelques mèches corbeaux et les glissai derrière mon oreille percée de deux anneaux.

Rigged Magic 1 - BipolarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant