Chapitre 7 - Brooklyn

186 31 171
                                    

Jeudi

Je finissais de préparer le déjeuner lorsque Carlyle descendit. Il avait revêtu une chemise en lin clair et un pantalon en coton noir. Un collier en or serrait sa gorge et le pendentif - sa perle - retombait sur sa peau laiteuse. D'un geste fatigué, il passa une main dans ses cheveux et les repoussa en arrière. Ses prunelles aqueuses me détaillèrent un instant et j'aimais penser qu'il avait maté mes fesses moulées dans un jeans taille haute.

— Tu sais que tu n'es pas obligé de cuisiner pour nous ? me dit-il en s'approchant de la machine à café.

— Ça me fait plaisir. Et puis, je suis rassuré de savoir que Léo ne va pas au lycée l'estomac vide.

— Tu es pire que moi.

Carlyle était un vrai papa poule, certes mais Léo et lui n'avaient jamais pris l'habitude de manger le matin. Inconcevable pour moi.
Je transférai mon dernier pancake dans l'assiette et y ajoutai des fruits rouges avant de tendre l'assiette à mon ami. Il me remercia et s'assit au bout de la table. Je sentis mon corps s'enflammer alors qu'il me regardait distraitement. Ses yeux exprimaient tant de choses. Je me détournai, craignant que mon corps ne me trahisse.

— Tu as pu dormir ? questionnai-je en coupant le feu.

— Oui, à peu près bien et toi ? Le lit est toujours aussi confortable ?

— Je dors toujours bien ici. Mieux que chez moi.

Carlyle eut un rire léger et but une gorgée de son café. Il n'était pas rare que je reste dormir ici. Je me sentais si bien, en sécurité même, dans la maison de Carlyle. Mon trentenaire le savait et m'avait donné un double des clés. Il me répétait que j'étais chez lui comme chez moi. Son hospitalité me touchait et, contrairement aux attentions d'Alres qui demandaient toujours une contrepartie, Carlyle n'attendait rien en retour. Pour lui rendre sa gentillesse, je cuisinais pour eux. J'aimais ça et, sans me vanter, je me débrouillais bien. Mon cœur se réchauffa davantage en le voyant sourire de contentement.

— Au fait, je fais une machine ce soir. Tu as des affaires à laver ?

— Oui, mais ça peut attendre encore un peu, répondis-je en m'asseyant à côté de lui.

— Tu peux me les amener ce soir.

J'entrais chez Carlyle comme dans un moulin, mais mon trentenaire se refusait à venir chez moi sans ma permission, même si je la lui avais donnée plusieurs fois. Il me soutenait que j'avais besoin de mon espace intime. Ce que je trouvais ridicule, je vivais la moitié de la semaine chez lui, il lavait et repassait mon linge comme si j'étais son compagnon. Cela c'était naturellement fait entre nous, nous n'étions pas en couple, mais vivions tout comme. Peut-être était-ce pour cela que mon cœur souffrait tant ? Parce que je savais qu'il n'éprouvait pas de sentiments pour moi, il me voyait comme un colocataire. Une griffe lacéra ma poitrine. L'amour, putain, ça faisait si mal.

— Ça va, Brook ? Tu tires une tête affreuse.

Carlyle interrompit le flux de mes pensées. Désarçonné par ses beaux yeux, je sirotai rapidement une gorgée de mon thé.

— Je suis un peu nerveux, Thussvor va probablement donner de nouvelles missions aujourd'hui. Et la situation de Fred m'inquiète...

Un mauvais pressentiment se diffusait dans ma tête lorsque je pensais à l'agent de l'Unité 3. Une pensée que je ne pouvais pas contrôler, une peur irrationnelle qui me rongeait. Une vive douleur me vrilla les tempes. Par réflexe, j'imposai une main sur mon front et fermai les yeux. Cela ne dura qu'une fraction de seconde, mais suffisamment pour que Carlyle le remarque.

Rigged Magic 1 - BipolarOù les histoires vivent. Découvrez maintenant