Rigged Magic 1 - Bipolar

Chapitre 3 - Brooklyn

Mercredi

Arrivé sur le parking de la Milice, je coupai le moteur de ma moto et ôtai mon casque. Mes cheveux cascadèrent sur mes épaules et chatouillèrent le bas de mon dos. Le soleil faisait ressortir le rouge flamboyant de ma chevelure. Ma magie s'exprimait directement dans ma coloration, cette magie que j'aimais tant mais qui était si destructrice. J'avais tendance à abuser de mes pouvoirs, mais cela me permettait de voir Carlyle plus souvent.

Je ne niais pas, le noiraud m'intéressait beaucoup. Il avait cette beauté froide qui me faisait frissonner. Ses yeux bleus clairs contrastaient avec ses cheveux noirs et sa peau pâle. Il avait la carrure musclée et athlétique qui me faisait fantasmer. Malheureusement pour moi, le magicien blanc ne s'intéressait pas à l'amour et me voyait comme son ami et collègue déjanté. J'avais beau lui tendre des perches pour qu'il comprenne que je voulais plus qu'une simple amitié, Carlyle faisait la sourde oreille. Il se contentait d'un sourire gêné et de détourner la conversation. Pourtant, malgré cette indifférence involontaire, il occupait toutes mes pensées.

Alors, lorsque j'entrai dans la pièce commune de l'Unité 1 et que je le vis assis à côté de mon bureau, je sentis mon corps s'enflammer. Il se tourna immédiatement vers moi en entendant mes talons heurter le lino bleu ciel. Mon cœur s'emballa tandis qu'il me souriait. Même son sourire était spécial, si timide mais si avenant. Carlyle était un râleur et n'adressait que très peu de sourire aux autres, je faisais partie de ces privilégiés. Je le lui rendis en le saluant avec enthousiasme.

Je m'assis à mon bureau et zieutai les casiers de paperasse. Ils trônaient en roi sur la planche de bois. La première tirette correspondait aux demandes de missions adressées à mon égard que je devais traiter. Les missions en cours reposaient dans le deuxième casier. Il s'agissait de celles que je traitais à l'heure actuelle ou que je devais classer en transmettant le dossier à l'Unité 2 et l'Unité 3. La troisième case contenait mon Réfractaire. Il s'agissait d'un hexagone plat percé au centre d'un cercle. L'objet était un mélange de fer, d'argent et de laiton. Après de nombreuses recherches, les magiciens avaient remarqué que ces métaux réussissaient à contenir les magies corrompues dans un court laps de temps. Cela permettait d'éviter les blessures inutiles et de transférer le bijou à l'Unité 3 sans danger. Finalement, le dernier tiroir contenait les autres papiers, comme les demandes du chef ou des autres Unités.

— Alors ta course d'hier soir ? me demanda Carlyle.

— Je ne suis pas blessé et j'ai gagné, désolé tu ne pourras me mettre de...

— Par pitié, tais-toi, gronda-t-il alors que des collègues entraient.

Je ris discrètement. Carlyle était parfois si pudique et timide, j'adorais le taquiner. Le voir rougir me faisait un effet si agréable... Je ne m'interdisais jamais de lancer une perche à celui qui éveillait mes désirs... il ne les saisissait pas, à mon plus grand regret. Alors que Carlyle détournait le regard et saluait des collègues qui arrivaient, je reportai mon attention sur les casiers de mon bureau. Aucune demande de mission. Celles en cours étaient bientôt terminées, je devais juste remplir les papiers et transmettre le dossier à l'Unité 2 et 3. Mon Réfractaire reposait à côté de sachets métallisés contenant les bijoux à traiter. Il y en avait deux pour ce matin. J'ouvris la dernière tirette alors que Frederik, notre collègue de l'Unité 3 entrait.

— Bonjour !

— Salut, Fred, répondit Carlyle.

Il posa un sachet contenant des croissants. Avec sa bonne humeur habituelle, il nous sourit. Ses cheveux bruns étaient plaqués en arrière et dégageaient son visage pâle. Ses grands yeux verts fixaient le monde qui l'entourait avec curiosité, ses prunelles avaient une intensité surnaturelle. Un anneau argenté brillait à sa narine gauche et tranchait avec l'air angélique qu'il abordait. J'eus un bref sourire en remarquant sa tenue composée d'une chemise, d'un jeans et d'une veste de costume. Il s'habillait toujours correctement. Frederik était compétent et agréable. Travailler avec lui me soulageait, je savais que je pouvais compter sur lui contrairement à mes deux autres collègues - Jacky, une quarantenaire guindée, et Urs, un pré-retraité je-m'en-foutiste.