Chapitre 10: La forêt

9 2 0
                                    

Zachary.

Je n'arrive pas à croire que son plan a marché. Enfin, évidemment, je croyais en lui, c'est moi le problème. J'avais peur de trop les ralentir avec ma blessure et de tout faire échouer. Mais on est dehors, libre. Et ça, c'est grâce à Lyam. Il est revenu me chercher. Il a fait demi-tour, au risque de se faire attraper par un garde, pour moi. Et toute l'équipe l'a suivi, même Sacha. Et quand le garde nous a surpris, il ne m'a pas lâché. Au contraire, il a tenu sa promesse jusqu'au bout. Il ne m'a pas abandonné cette fois-ci.

On est toujours allongés sur l'herbe, tous à bout de force. Et vu d'ici, le bâtiment que l'on vient de quitter paraît immense. Finalement, il est encore plus grand que ce que je pensais. Je ne vois même pas le sommet. Et quant à sa longueur, elle est tout aussi impressionnante. Le bâtiment semble s'étendre à l'infini. Je ne sais même pas comment les gardes font pour ne pas se perdre. Mais surtout, comment les organisateurs ont-ils fait pour le construire ?

« Les organisateurs, ils ont-».

Cette phrase tourne en boucle dans ma tête depuis qu'Adam a refermé la porte. J'aurais bien aimé savoir ce qu'il s'apprêtait à dire. C'est vrai que maintenant, le jeu n'a plus aucune importance, mais le garde n'allait pas nous attaquer. Je suis d'accord avec Alya, il aurait au moins pu attendre que le garde ait fini sa phrase avant de lui claquer la porte au nez.

« Ne sortez pas. C'est dangereux ».

Qu'est-ce qui est dangereux ? Tout me parait normal. Certes, il fait encore nuit donc on ne peut pas voir grand-chose, mais je peux quand même apercevoir l'ombre des fleurs autour de moi et les arbres de la forêt semblent en bonne santé aussi. Si l'environnement était dangereux, toute la nature serait morte. Alors si ce n'est pas l'air qui est dangereux, qu'est-ce que c'est ? Peut-être qu'ils ont posé des pièges à l'extérieur également ? Il tentait peut-être de nous prévenir qu'il fallait qu'on soit vigilant. Non, ça n'a pas de sens. L'extérieur nous est interdit, pourquoi serait-il piégé ? Il y a quelque chose d'autre, mais je n'arrive pas à trouver quoi. Après tout, il a peut-être seulement voulu nous faire peur. Ce n'est sûrement pas si important que ça.

De toute façon, je n'ai pas le temps de réfléchir plus à la question. On doit se remettre en route. Le garde a dû mettre Smith au courant de notre sortie. Et ça m'étonnerait qu'il reste sans rien faire. Et je n'ai pas trop envie de savoir ce que les gardes pourraient nous faire s'ils nous attrapent. Alors, plus on est loin, mieux c'est. Mais je ne peux m'empêcher de penser à tous ceux qu'on a laissés derrière nous. Même si je suis arrivé ici il y a un moment déjà, je n'ai jamais vraiment parlé à quelqu'un. Je ne m'étais rapproché de presque personne. Enfin personne qui n'est pas avec moi aujourd'hui, sauf une personne. Le jour où Lyam est venu me parler, c'était le premier jour depuis des semaines où les gardes m'autorisaient à sortir. Mais si j'avais pu, je serais resté enfermé dans ma chambre plus longtemps encore. Je ne voulais plus sortir, pas après ce qu'il s'était passé.

Et bien sûr, je ne peux m'empêcher de penser à Lily. Je sais que Lyam ne lui fait pas confiance, mais il a tort. C'est une personne bien, il ne sait juste pas encore à quel point. Et c'est bien pour ça que je m'en veux de la laisser ici, parce qu'elle ne serait jamais partie sans l'un d'entre nous. Lyam est persuadé qu'elle travaille avec les organisateurs, mais ça n'a pas de sens. La seule chose qui lui fait dire ça, c'est qu'elle ne participe pas au jeu et qu'elle est presque toujours entourée de gardes. Sauf que si elle faisait vraiment partie des organisateurs, elle serait dans les bureaux, comme les autres. Alors que là, elle est toujours avec les participants, à l'écart oui, mais bien présente. Elle a un rôle important dans toute cette histoire, oui, mais pas celui que Lyam pense. Au contraire, s'ils la surveillent, c'est parce qu'elle a fait quelque chose qui ne leur a pas plu. Et Smith est bien décidé à faire tout son possible pour qu'elle ne recommence pas. Je ne sais pas vraiment ce qu'il se passe de son côté, mais je reste persuadé d'une chose : on aurait dû l'emmener avec nous. J'ai comme l'impression que grâce à sa proximité avec Smith, elle sait beaucoup de choses sur tout ce qui concerne le jeu, des choses que nous ignorons, même les plus anciens d'entre nous. Et je continue à penser qu'elle nous aurait été d'une grande aide. Alors peu importe ce que pense Lyam, quand on retournera dans le bâtiment, parce que je sais qu'on y retournera un moment ou un autre pour libérer d'autres participants, je l'emmènerai avec nous. Peu importe les risques que je devrais prendre.

« Ne faites confiance à personne ».

Désolé de ne pas t'écouter, mais moi, je te fais confiance Lily Collins, et il est hors de question que je te laisse crever entre les mains de ces malades. Parce que c'est ce qu'il va se passer si personne n'intervient. Ils vont la tuer à petits feux, ils ont déjà commencé. Ses blessures en sont la preuve. Et peu importe ce qu'elle a pu faire, personne ne mérite de souffrir autant.
Alors, je me fais la promesse de la sortir de là-bas dès que je peux.

Elle m'a aidé à me sauver des gardes, mais je n'ai jamais pu la remercier correctement. Et je déteste être redevable envers quelqu'un. Alors, maintenant, c'est à moi de la sortir de sa prison. Chacun son tour.

Je rouvre les yeux pour essayer de stopper toutes ces pensées, mais je suis ébloui par les premiers rayons du soleil. Le jour commence déjà à se lever, il faut que l'on parte d'ici. J'essaye de me relever, mais quelque chose me bloque la jambe. Je m'appuie alors sur mes coudes pour voir ce que c'est et je reconnais immédiatement les cheveux châtains d'Emy qui s'est endormie sur mes jambes. Je regarde autour de moi pour voir si d'autres se sont endormis, et mon regard croise celui de Lyam.

— On devrait peut-être la réveiller. Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé depuis notre évasion, mais je pense qu'on ferait mieux de partir au plus vite, dis-je.

— Oui. Je n'ai pas envie de retourner là-dedans avant d'avoir profité un minimum de ma liberté, dit-il en se levant pour aller réveiller les autres.

Je secoue alors légèrement la jambe d'Emy pour la réveiller le plus doucement possible. Elle ouvre légèrement les yeux, un sourire se forme sur son visage quand elle voit le ciel coloré au-dessus de sa tête. Puis réalisant l'endroit auquel elle s'est endormie, elle se relève brusquement avant de s'excuser. Tout le monde est réveillé maintenant, et malgré le danger qui continue à régner autour de nous, tout le monde semble heureux, moi aussi. Je ne me rappelle même plus la dernière fois où j'ai été heureux, vraiment heureux. J'ai l'impression que je n'ai pas ressenti cela depuis des mois, ce qui est peut-être vrai au final.

Aucun d'entre nous ne reconnaît l'endroit dans lequel on se trouve. On n'a donc aucune idée de l'endroit vers lequel se diriger. Deux choix s'offrent à nous : soit on continue tout droit sur terrain plat, soit on se dirige vers la forêt. Malgré le risque de se retrouver face à divers animaux, on choisit la forêt, à l'abri des regards. Même si l'endroit semble en pleine nature, il y a un sentier qui a l'air d'être plutôt bien entretenu. Apparemment, plusieurs personnes empruntent ce chemin régulièrement. Finalement, on n'est peut-être pas si loin de la civilisation que ce que je pensais.

On marche pendant ce qui semble être des heures. Le sentier semble s'étendre à l'infini. J'ai mal partout et je commence à être de plus en plus fatigué. Tout le monde l'est, même ceux qui ont réussi à se reposer quelques minutes ce matin.

— Vous ne pensez pas qu'il serait temps de faire une pause ?

— Je suis d'accord avec Lilou. On devrait se reposer un peu. En plus, je pense que l'on est assez loin du bâtiment pour le moment. On ne le voit presque plus, renchérit Adam.

Je me retourne alors et mets quelques secondes avant de repérer le bâtiment. Adam a raison, seul son dernier étage est encore visible parmi les arbres même s'il semble à des kilomètres d'ici. Lyam a dû en venir à la même conclusion parce qu'il approuve notre idée.

— C'est vrai qu'un peu de sommeil ne serait pas de refus. Il faut juste qu'on trouve un endroit assez tranquille où l'on peut se poser.

L'endroit est trouvé quelques minutes plus tard. C'est un endroit à l'ombre, sous des arbres et sûrement à proximité d'une rivière, car on peut entendre l'eau couler. C'est parfait. Tout le monde s'écroule alors sur le sol, et je m'autorise enfin à fermer les yeux. Je n'ai presque pas dormi ces derniers jours, j'ai vraiment besoin de sommeil.

L' épreuveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant