Chapitre 21

76 13 20
                                    

Alors que les mois avançaient et que ses capacités se développaient, sa confiance en elle continua à grandir. Au Centre, Rika l'ignorait ostensiblement, mais les autres Cadets, Jolianne et Leogan compris, avaient fini par l'inclure dans les conversations du mess. Elle n'avait pas entendu de nouvelles allusions à sa prétendue filiation avec le dirigeant de Kivilis, mais comme cela expliquait certainement l'apaisement de ses relations avec le reste du groupe, elle s'en contentait.

Après tout, ils ne sont pas si loin du compte. J'ai bien un « protecteur »... ce n'est juste pas celui qu'ils imaginent.

Ses notes s'amélioraient petit à petit. Elle travaillait d'arrache-pied, plus dur qu'elle ne l'avait jamais fait sur Terre. Il faut dire que les distractions étaient rares, sinon inexistantes, ce qui l'aidait à rester concentrée. Heureusement, ses progrès lui donnaient la motivation nécessaire pour continuer. C'est ainsi qu'elle finit par atteindre un niveau honorable : pas le meilleur, mais amplement suffisant pour valider ses unités de cours.

Au bout de quelques mois, la formation initiale se termina, et elle passa au cycle supérieur, toujours au Centre. Le Second Cycle comportait moins de cours, mais ils étaient plus ardus, parfois en simulation ou en opérations extérieures. L'entraînement physique se renforça également, mais sur ce point, grâce à ses séances avec le Lieutenant, elle n'éprouva pas de difficultés, bien au contraire.

Cela lui parut étrange, au début. Elle avait tellement l'habitude, au lycée, d'être à la traîne en cours de sports, que lorsqu'elle se retrouva pour la première fois sur un tatami en compagnie des autres Cadets, elle éprouva, par réflexe, le vieux sentiment d'appréhension. Appréhension vite dépassée lorsqu'ils effectuèrent les premiers exercices de corps à corps et qu'elle envoya au tapis l'une des Cadettes Humaines – il ne s'agissait ni de Rika, ni de Jolianne, qui s'étaient soigneusement éloignées d'elle au moment de la formation des équipes. Il ne s'agissait pas non plus de Leogan : ce dernier n'avait en effet pas fait partie des Cadets admis en Second Cycle.

Les professeurs observèrent d'un regard critique les duos qui se malmenaient à même le sol et séparèrent rapidement les Cadets en deux groupes. Claire se retrouva avec deux autres Humain, Jolianne et Dorien, un jeune homme taciturne à la peau mate, ainsi qu'avec Klo, une Sullite aux longs cheveux noirs bleutés et, chose étonnante, avec les deux sœurs Draaf, Aviss'Trac'hy et Nevass'Trac'hy, plus communément appelées Avi et Neva. Ce petit groupe hétéroclite se vit affecter une instructrice Treuze – Claire supposait qu'il s'agissait d'une femme, mais c'était toujours difficile à dire avec cette espèce totalement glabre – qui entreprit immédiatement de les pousser dans leurs derniers retranchements. Mais grâce au Lieutenant Saulnier Claire avait été à bonne école, et elle se surprit à apprécier grandement le cours, très différent de ses entraînements particuliers.

Ceux de son groupe possédaient en effet de bonnes, voire de très bonnes bases de combat à mains nues, mais avec des techniques très différentes. Les Draafs prenaient avantage de leur petite taille et de leur peau glissante pour passer sous sa garde et infliger des coups vicieux avec leur crête osseuse, la Sullite se servait de ses cheveux rassemblés en une longue tresse comme d'une arme redoutable, quant aux deux Humains, même s'ils manquaient de technique, ils connaissaient suffisamment de rudiments de self-défense pour ne pas finir trop vite à terre. Claire en conclut qu'elle avait eu de la chance, lors de l'attaque dans les toilettes, en atteignant Jolianne lors de ce premier coup : l'Humaine brune s'était certes laissée surprendre, mais si elle avait décidé de continuer le combat, l'issue aurait été beaucoup plus problématique pour elle.

Ces séances lui permirent de progresser également sur d'autres plans. Elle ne noua pas de relations de franche camaraderie avec les autres Cadets, non – l'ombre de son supposé « père » y étant sans doute pour quelque chose – mais qu'elle tienne plus qu'honorablement son rang dans les entraînements de lutte sembla rassurer, d'une certaine façon, les élèves de son groupe. Sa place au Centre parmi eux était ainsi justifiée, quels que soient ses passe-droits par ailleurs, et ils ne la considéraient plus comme une intruse ou, pire, une espionne. Et quand ils abordèrent des exercices plus délicats, comme les entraînements de pickpocket, elle eut même droit à quelques fous rires avec le reste de son équipe, chose impensable encore seulement quelques décades plus tôt...

Kivilis - Le Cycle du Vortex, T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant