Chapitre 57

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Le cargo les déposa quelques heures plus tard sur une petite station spatiale, dont Claire ignorait le nom, et qu'elle ne chercha d'ailleurs pas à savoir. Aucyne débarqua tous ses passagers et repartit, sans chercher à en savoir plus à leur sujet. Discrétion remarquable... à moins qu'il n'y ait eu des choses qu'elle ne savait pas.

Mais à vrai dire, cela ne l'intéressait plus.

Les Libertans lui avaient totalement ôté ses entraves, sans que cela n'entraîne de réaction de satisfaction particulière de sa part. Tout cela lui paraissait désormais tellement futile... Giles avait commencé par protester, mais Camyl l'avait réduit au silence d'un regard, une nouvelle fois. C'était d'ailleurs étonnant comme le pilote, si rétif à toute forme d'autorité, si provocateur, cédait facilement devant les yeux verts inflexibles de la jeune mutante.

Cela la tira un instant de sa torpeur, et elle croisa le regard de la jeune femme. Quelque chose passa entre elles. Elle ne savait plus si ces gens étaient encore ses ennemis, elle se rendait bien compte que si Leftarm lui avait menti sur Celer, il pouvait lui avoir menti sur bien d'autres choses... mais elle ne voulait pas non plus tomber dans l'excès inverse. Elle se tenait donc à l'écart des Libertans, mais sans plus chercher à être sciemment désagréable. Camyl et Marc l'avait compris, et ils n'avaient pas essayé de lui forcer la main, respectant son besoin de solitude.

Ils avaient loué une petite navette pour pouvoir retourner sur la base des Libertans, et elle les accompagna. Même sans entraves, il était hors de question que la liberté lui soit rendue, et elle savait que Marc restait là, vigilant, si jamais elle essayait de leur fausser compagnie.

On lui avait alloué l'une des quatre cabines, la plus petite. Peu de temps après le décollage, on frappa à la porte.

— Je peux entrer ? fit la voix de Camyl.

Claire acquiesça, et la porte coulissa. La jeune spatione s'était douchée, changée, et ses cheveux pâles auréolaient son visage comme un halo duveteux. Elle s'arrêta sur le seuil, lui tendant le paquet qu'elle tenait à la main.

— Tiens. Je pense que nous faisons à peu près la même taille.

Claire prit le paquet, plat et mou, enveloppé de plastique. C'était l'un de ces kits de vêtements unisexe bon marché, qu'on trouvait dans tous les environnements à température et humidité contrôlés, comme les stations spatiales ou les bases lunaires. Elle en avait porté, une fois, en session de mise en situation. C'étaient des habits basiques, peu robustes, qui ne protégeaient absolument pas du froid ou de la pluie.

Mais l'attention de Camyl la toucha profondément.

— La douche est au fond du couloir, expliqua la spatione. Ce n'est qu'une douche sonique, malheureusement, mais tu verras, ça fait du bien.

— Merci, murmura-t-elle, la gorge nouée. Merci beaucoup.

Camyl hocha la tête, sembla vouloir rajouter quelque chose, se ravisa.

— Bon, eh bien je te laisse, alors. N'hésite pas, si tu as besoin de quelque chose.

Elle recula, et la porte se referma. Claire resta debout, le paquet à la main, à fixer l'endroit où la jeune Libertan avait disparu. La gentillesse de Camyl lui mettait les larmes aux yeux.

Un jour plus tôt, elle se serait sans doute dit que tout cela était du calcul, une manière de la déstabiliser, de l'amener à épouser le point de vue des Libertans. Un jour plus tôt...

Maintenant, elle comprenait que Camyl avait seulement voulu l'aider, la mettre un peu plus à son aise – il faut dire que sa propre odeur lui soulevait le cœur, depuis qu'ils étaient revenus dans l'environnement aseptisé de l'espace.

Kivilis - Le Cycle du Vortex, T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant