Chapitre 27

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Encore quelques décades...

Ce matin-là, Claire montra d'un air assuré son poignet à l'OLS qui contrôlait les entrées, d'un geste devenu tellement familier au cours des mois passés qu'elle n'y faisait plus attention. Après l'avoir scanné, le garde opina de la tête et enclencha l'ouverture de la porte sans un mot. A Bhénak, on ne parlait pas pendant le service, et encore moins quand on était de poste à proximité immédiate du Seigé.

Le hangar n'était pas très imposant. A côté du Hangar Dix-Sept, ou de celui dans lequel Claire avait dû subtiliser les baynis, quelques mois plus tôt, il paraissait même ridiculement petit. Mais la navette personnelle de Seigé Leftarm n'était pas si grande. Sous les projecteurs qui éclairaient la piste, sa ligne élancée, couleur de vieux bronze, rutilait de mille feux.

Quelques techniciens s'affairaient encore autour du vaisseau, mais Claire espérait pour eux que leur travail d'entretien était terminé. Le Seigé pouvait surgir d'un instant à l'autre, et il exigeait que sa navette soit toujours prête à décoller dans la minute. Malheur à qui le retardait... il était remercié aussitôt.

La porte s'ouvrit de nouveau, et son employeur entra. Les techniciens s'écartèrent du vaisseau et se mirent au garde-à-vous, de même que Claire et toutes les autres personnes présentes. En passant devant elle, il l'inspecta du regard, et eut un imperceptible hochement de tête. Sur son ordre, elle avait revêtu sa tenue civile, ce qui voulait dire que, selon le code vestimentaire compliqué de Kivilis, elle s'était habillée de façon solennelle et codifiée.

Dans un univers aussi vaste et aussi complexe, aussi ancien, aussi pluriculturel que celui de Kivilis, l'uniformité était impossible, de même que les phénomènes de mode. En matière d'habillement, tout avait été essayé et testé depuis bien longtemps, du plus terne au plus flamboyant, et désormais chacun en faisait à sa tête, en privilégiant cependant, dans la majorité des cas, le confortable et le pratique.

Mais, bien qu'extrêmement diversifié et versatile, le système vestimentaire de Kivilis admettait cependant certaines règles, peu nombreuses, mais incontournables.

La cape, par exemple. C'était un élément fondamental de la « tenue publique », dite civile, de tout citoyen. S'il lui était souvent préféré une banale veste dans la vie quotidienne, il n'en était pas de même dans les hautes strates de l'Etat, ni même dans n'importe quelles circonstances un tant soit peu officielles. La cape était alors un véritable élément social, une marque de rang soigneusement codifiée.

Une seule personne avait le droit de porter une cape balayant franchement le sol : le Président de la République, Micaïl Molla. D'autres, comme Seigé Leftarm et les autres ministres, portaient humblement une cape dite a-maxima, dont la différence de longueur avec le vêtement présidentiel était minime, si bien qu'il était difficile, à des yeux non exercés, de faire la distinction.

A partir du type b-maxima, cette différence se faisait au contraire nettement sentir, puisque la cape arrivait à la cheville. C'était celle des Grands-Dynastes, qui supervisaient le Concile Dynastial, la chambre des lois. Puis venait la c-maxima, celle des Grands-Gouverneurs et Grands-Amiraux, puis la d, que revêtaient les simples Dynastes et Généraux. La longueur diminuait de plus en plus au fur et à mesure que l'on passait aux a-media, b, c, d, puis a-minima, b, c, d. Enfin venait la plus courte, la novicia, qui couvrait à peine les épaules, et à laquelle avait droit, par définition, tout Citoyen de Kivilis. Etait Citoyen toute personne à jour de ses obligations militaires et fiscales, et n'ayant jamais commis de crime ou de délit.

Il n'y avait pas de code de couleur, seule comptait la longueur. Toute infraction était sévèrement sanctionnée, allant de la simple amende à la peine de prison selon l'importance de l'usurpation. Mais pasticher la tenue présidentielle ou a-maxima en public était passible de peine capitale...

Kivilis - Le Cycle du Vortex, T1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant