Le prix de la trahison

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Marc Lange se tournait et se retournait dans sa cellule. Il y était toujours seul, il avait le privilège de ne jamais avoir de compagnon. Plus qu'un privilège, c'était en réalité une sécurité. Le traitre du Réseau était après tout, une tâche dans les finances de l'organisation criminelle, que ses cadres n'aimeraient rien de moins que nettoyer. Il était sous la protection de Morgane et du Coven dans cette prison, certes... mais le Réseau avait ses méthodes. Il savait s'infiltrer partout, insidieux, silencieux, mortel. C'était une créature tapie dans l'ombre, et prête à sauter à sa gorge à tout instant.


C'était dans la terreur de l'inévitable jour où les mains du Réseau se refermeraient sur lui que Marc Lange s'endormait tous les soirs. Et c'était dans l'optique de repousser le plus possible ce jour qu'il distillait petit à petit les secrets qu'il avait acquis au fil des ans à ses visiteurs. Alice, la protégée de Morgane, notamment, s'était montrée très friande de tout ce que Marc savait sur l'organisation mystérieuse. Et en s'assurant qu'il gardait pour lui toujours une partie de ce qu'il savait, le vieil homme savait qu'il se rendait indispensable. Car le jour où il deviendrait inutile... alors la protection dont il bénéficiait se dissoudrait aussitôt. Morgane était une femme intraitable, et qui ne connaissait pas le sens du mot "reconnaissance". Peu importait les services qu'il lui avait rendu, et les informations vitales que Marc lui avait fournie au fil des ans, elle le jetterait comme une vulgaire chaussette trouée dès l'instant où il se montrerait inutile.

C'était la raison pour laquelle Marc cachait encore tant de chose. La raison pour laquelle il se contentait de laisser passer bribes d'information par bribes d'information. Comme il l'avait fait depuis des années, depuis qu'il avait trahi. Depuis qu'il avait livré le maître du Réseau à la justice, avec l'aide de Morgane et du Coven. Depuis qu'il minait, peu à peu, les intérêts du groupe criminel en délivrant ses informations. Marc se savait nécessaire et intouchable.

Du moins, il se l'imaginait.

Le cliquètement d'un trousseau de clef dans la serrure de sa cellule fit sursauter Marc. Il était trop tard pour que les gardiens viennent le chercher pour une visite. A cette heure tardive, tout le monde dormait déjà depuis longtemps, et seules les mémoires torturées de Marc le gardaient encore éveillé si profondément dans la nuit. Le vieil homme comprit immédiatement que quelque chose se tramait, et se leva de sa couche, fixant avec appréhension la porte de sa cellule qui s'entrouvrit sur le gardien en chef. Ce dernier s'écarta, laissant entrer deux hommes.

Le cœur de Marc Lange tomba profondément dans sa poitrine. Ses rares cheveux restant se hérissèrent. Sa gorge se serra si fort qu'il eut un spasme, et vomit immédiatement tout le restant de son repas sur son ventre. La lumière quitta ses yeux. Il avait espéré ne jamais vivre cet instant pendant si longtemps. Il avait cru échapper aux enfers. Mais tout être humain est condamné à retrouver Hadès un jour. Et, face à lui, se trouvait ses deux messagers.

Le premier était un homme de stature moyenne, voûté malgré son apparence juvénile, ses grands yeux noirs et fixe soulignés d'imposantes cernes. Il n'était vêtu que d'un pull froissé et d'un vieux jean délavé, et avançait les mains dans les poches. Même sa chevelure couleur geais était hirsute. Tout dans son apparence donnait l'impression d'un homme négligé, qui viendrait de sortir de sa chambre sans avoir pris de douche au passage. Comme si sa mère ne lui avait jamais appris à s'habiller correctement. Pourtant, quiconque le croiserait serait bien malvenu de le prendre de haut, car peu de personnes sur cette terre étaient aussi terrifiants que cet homme. 

Le second était plus grand. Les cheveux rouge sang, et vêtu d'une longue tunique de la même couleur. Ses yeux étaient cerclés de khol noirâtre, sous des sourcils rasés. Ses yeux bleus et froid semblaient ne dégager aucune émotion. Sa prestance était bien plus importante que le premier, et pourtant, il se tenait en respect derrière l'homme voûté.

1000 mètres sous la surfaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant