Confessions secrètes

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La chaleur moite des draps couverts de sueur laissa place à une fraîcheur quelque peu plus acceptable lorsqu'Alice s'extirpa du lit. Par la fenêtre de la chambre, elle pouvait observer la lueur diaphane de la lune qui éclairait le petit jardin et le mur de la maison voisine. Le petit lotissement était profondément endormi. Inconscient des tourments de la jeune femme. Tout comme l'était celui qui, encore quelque peu essoufflé par leur récente séance de coït, s'approcha d'elle pour l'enserrer dans une douce et chaleureuse embrassade. 

-Tu devrai dormir... murmura Alice, ce à quoi Tom répondit simplement par un grognement légèrement résigné.

Il était tard. Et Alice avait conscience d'avoir un peu abusé de l'endurance de son amant, ce soir là. Elle pouvait le sentir à l'expression d'épuisement qu'il afficha en s'affalant sur son oreiller, et en s'envolant presque immédiatement pour les terres de Morphée. Alice sourit légèrement. Ce tableau parvenait à la calmer légèrement.

Mais pas complètement. Un frisson glacé la parcourut, et elle se leva brusquement, sans même se jeter un vêtement sur les épaules, et accouru jusqu'à la salle de bain, où elle se pencha au dessus de la cuvette. Mais rien ne vint. La nausée continuelle qu'elle ressentait depuis sa confrontation avec Charlotte ne la quittait jamais. Le mal être qu'elle en ressentait semblait ressortir par tous les ports de sa peau. Elle ne comprenait pas. Elle ne comprenait pas comment Charlotte pouvait être aussi naïve. Comment elle pouvait avoir autant changé. Comment elle préférait écouter cette inconnue, cette traîtresse, plutôt que elle, sa propre sœur. Cela rendait Alice malade. Physiquement. Comme si la blessure que lui avait infligée Charlotte en s'interposant entre elle et Sélène saignait abondamment, tordant son ventre et son cœur d'une douleur insupportable. Alice se sentait blessée, agonisante. Elle ne savait comment faire pour faire disparaître cette sensation. Même le sexe n'y arrivait pas vraiment. Les mensonges de Sélène tournaient et tourbillonnaient sans cesse dans son esprit, sans qu'elle ne parvienne à les en chasser. Parfois, ils y  trouvaient même racine... et le doute pointait le bout de son nez.

Alice tentait de repousser ces graines de doute. Sélène était une demi-démone, une fille de Satan. Elle était bien placée pour savoir à quel point le magnétisme et le pouvoir de suggestion de ses demi-frères et demi-sœurs pouvait être puissant. Ce doute n'était que cela; l'effet de cette foutue filiation qui rendait tout mensonge si crédible. Assez crédible pour que Tom ne pose même pas trop de question, lorsqu'elle avait répondu de manière assez évasive quant à la destination de son soudain et impromptu voyage.

Alice se releva, et s'approcha de la glace. Elle se saisit de sa boite de pilule du lendemain. Ce n'était pas nécessaire, elle se protégeait déjà, après tout. Mais mieux valait être prudente. Très prudente. Elle refusait d'être à l'origine d'une nouvelle génération qui devrait à son tour porter le poids de cette demi humanité, de la malédiction qui frappait leur famille depuis que Satan s'en était approchée trop près. La petite gélule avalée, la jeune femme se fixa dans le miroir. N'importe qui d'autre l'aurait trouvée belle à en tomber par terre, mais Alice, elle, ne parvint qu'à trouver les petits défauts qui l'obnubilaient dans son apparence. Ces foutus yeux violets qui reparaissaient dès qu'elle cessait de porter des lentilles en faisaient partie. Elle les haïssait tant... elle savait qu'elle ne supporterait pas de les transmettre à quelqu'un. Et cette expression de fatigue et de lassitude, qui semblait drainer tout son charme, toute son étincelle de vie.

Elle devait l'admettre, elle était trop secouée par cette confrontation pour en sortir indemne. Les graines du doute étaient plantées. Leurs racines s'étendaient lentement mais sûrement dans son esprit. Le Réseau... Morgane... le Coven... Sticks et Rain... Sélène... et même Charlotte. Il y avait... trop, trop, trop pour elle. Elle tentait de se raccrocher à la vérité, mais était-ce vraiment la vérité ou sa vérité? Peut être... peut être qu'il y avait plus derrière tout ce qu'elle croyait. Tout ce qu'elle avait choisi de croire. Mais si elle se mettait à creuser... que se passerait-il, alors?

1000 mètres sous la surfaceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant