29 Mars 2024.
Ne fais pas ça. Tu vas le regretter. C'est contre les règles. Il ne partage pas tes sentiments ! Tu vas te faire du mal, arrête. C'est une très mauvaise idée. Fais demi-tour et rentre chez toi, c'est mieux. Protège-toi. Tu vas le regretter.
Mon petit démon virevolte devant mes yeux comme une vipère s'enroulant autour de sa proie. A mesure que j'avance dans le centre-ville, à la recherche de l'immeuble d'Alistair, il se fait plus bruyant. Plus bavard. Et je ne suis pas certaine de parvenir à le faire taire de si tôt.
J'ai passé les derniers jours chez moi. Il fallait que je réfléchisse, que je pèse le pour et le contre. Les règles sont toujours là, à planer au-dessus de nos têtes mais peut-être que le temps est enfin venu. Et je refuse de patienter plus longtemps.
J'ai pris ma décision.
Idiote ! Tu vas tout gâcher ! Il veut attendre ! Tu ne sais pas écouter quand on te parle ? Fais demi-tour. Maintenant ! Il ne veut pas que tu fasses ça. C'est peut-être pour une bonne raison, non ?
Je ne l'écoute plus. J'accélère le pas quand j'arrive au croisement de sa rue. Il m'attend devant son immeuble, comme prévu plus tôt dans la matinée. J'ai tenté d'être le plus neutre possible durant notre appel mais je ne suis pas sûre que ça ait eu l'effet escompté. J'ai peur de faire une bêtise.
Je suis enfin à quelques mètres de l'immeuble et il est bien là. Il fait les cent pas, les mains enfoncées dans les poches de son jean. Je reconnais à peine l'expression sur son visage. Il semble rongé par l'appréhension.
Il pile net quand il me voit et je crois frémir lorsque ses yeux trouvent les miens. Je n'ose pas combler la distance qui nous sépare. Peut-être que c'est une mauvaise idée.
C'EST une mauvaise idée !
Je me croirais dans un film romantique. Mais je ne cours pas dans ses bras en lui confessant mes sentiments. Et il ne me rattrape pas pour me dire qu'il m'aime. On reste planté là comme deux idiots, perdus.
— Salut, souffle-t-il une fois à ma hauteur.
— Salut.
Nous restons longtemps à nous fixer, au beau milieu de la rue, comme si cela faisait une éternité que nous avions été séparés. Et pourtant, seulement quatre jours séparent notre dernière sortie.
— Tu m'as manqué, dit-il sans trop élever la voix. Tu ne peux pas savoir à quel point.
Tu m'as manqué aussi, si tu savais.
Ça ne fait que quatre jours, Maya ! On abandonne le plan, c'est foutu. Tu vas te prendre le plus gros râteau de ta vie. Je ne veux pas voir ça ! Il ne partage pas tes sentiments. Tu es son amie, rien de plus.
— On devrait monter pour parler... Si ça ne te gêne pas.
Il acquiesce et me fait signe de passer devant lui. Je garde la tête haute malgré la voix incessante du démon dans mon crâne, m'incitant à m'enfuir en courant. Je le laisse me conduire jusqu'à son appartement et c'est lorsque je passe la porte que je me rends compte que c'est la première fois que j'entre chez lui.
Quand je me tourne pour lui faire face, je me mets à douter. Et si j'avais tout inventé ? Et s'il n'était pas du tout sur la même longueur d'onde que moi ? Peut-être qu'il a été dégoûté de moi le jour où je l'ai confronté.
Mais je sais ce que je veux. Lui ou personne d'autre.
Je ne peux pas faire demi-tour et abandonner. Sans lui avoir confié ce qui me pèse depuis des jours entiers et qui m'a poussé à m'isoler de lui. Juste pour voir ce que ça faisait.
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Memento Vitae
Teen FictionLorsque Maya entre à l'université, l'éducation de son père sous le bras, tout ne peut que bien se passer. Si c'est une façon pour elle d'échapper à l'homme qui l'a élevé, elle ne se débarrasse pas pour autant de tout ce qu'il lui a inculqué : discip...