Chapitre 3

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Je suis en train d'émerger. Ma conscience a décidé de s'éveiller un peu.

J'entends une voix masculine qui me parle. Je ne saisis pas tout de suite qui c'est, le temps que mon esprit soit un peu moins embrouillé. Puis, je la distingue. C'est une voix que je connais, mais qui ne fait pas partie de mon entourage proche, mais elle devenue une voix familière maintenant. C'est mon kiné.

Tous les jours, un kiné vient me masser les jambes, les bras, les mains, la nuque, le cuir chevelu, mais je ne sens rien. Comment je suis informé qu'il me masse ? Tout simplement parce qu'il me décrit ce qu'il fait pendant qu'il me manipule. Il y a des jours, c'est lui, et d'autres, c'est son collègue. Ils sont donc deux à faire ces massages que je trouve inutiles puisque je ne sens rien.

Mais bon, il y a certainement une raison, sinon ils ne le feraient pas.

Ce doit être pour la circulation du sang, pour les muscles, les articulations, etc. Lors d'une séance à la salle de sport, le coach nous avait signalés qu'il était essentiel que le corps reste un minimum en mouvement. Même lorsqu'on dort. C'est pour ça pour qu'on bouge pendant notre sommeil.

Ça me fait penser que vu ce que m'a décrit le kiné lors de ses soins, à priori, j'ai encore mes 4 membres. Ce qui est une bonne nouvelle. Toutefois, peut-être qu'ils ne sont pas entiers ? Non, attends, il a déjà parlé de ma main gauche et de ma main droite, idem pour mes pieds. Ok, je suis entier !

Je me sens bizarre aujourd'hui. Je sens comme un poids dans mes bras, mon torse, mes épaules, ma tête. C'est nouveau ça. Mais je ne ressens rien dans mes jambes. Je ne comprends pas ce qui se passe. Puis, j'ai comme des fourmillements dans les doigts. Ça aussi, c'est inédit.

Je ne sais pas trop comment le décrire, mais j'ai l'impression d'être engourdi. Mais si je suis engourdi, ça veut dire que je sens mon corps alors que jusque-là, je ne sentais rien.

Bordel, je sens mon corps ?

Ouai, enfin si c'est ça, je ne parviens toujours pas à bouger quand même. Fait chier !

Le kiné est sur la fin de sa séance, car il est en train de masser mes pieds et il termine toujours par mes orteils.

On doit être vers la fin de matinée, car les soins ont lieu le matin et l'après-midi, ce sont les visites.

C'est avec ces rituels que j'arrive à me repérer un peu dans le temps. Cependant, je ne sais toujours pas si on est lundi ou mercredi ou le week-end. Je ne sais pas non plus quel mois on est. Je n'ai pas encore réussi à saisir d'indices pouvant me l'indiquer.

La porte s'ouvre. Qui ça va être ? Un des médecins ou une de mes groupies ?

- Eh Laurent, ça va ?

Oh, c'est elle, ma Sauveuse. Je me délecte toujours autant à entendre sa voix.

- Ouai ça va et toi ? Tu es de service tout le week-end ?

Donc on est le week-end...

- Oui, je suis de garde jusqu'à dimanche soir. Autant te dire que je vais passer tout mon lundi au lit.

- J'ai les mêmes projets.

Ah oui ? Pas dans le même lit qu'elle quand même ?

- Je suis persuadée que tu seras accompagné.

Hein ? Mais qu'est-ce qu'elle raconte ? Elle ne parle quand même pas d'elle ?

- Eh non, il est en déplacement jusqu'à mercredi.

Il ? Ah, mais attends, il est homo ? Ok, je commençai à me faire des films. Bordel, je suis en plein délire ! Elle peut faire ce qu'elle veut ! Mais pourquoi je réagis comme ça moi ? C'est n'importe quoi et ça m'énerve !

Le PatientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant