Chapitre 38

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Ma Sauveuse s'avance vers moi et je constate qu'elle n'a pas l'air d'être dans une meilleure forme que moi. Je ne l'avais pas remarqué tout à l'heure mais elle a les joues creusées, des poches sous les yeux, le teint livide et elle semble amaigri. Ses bras habituellement menus sont devenus presque squelettiques.

Ouai, on a l'air de vrais zombis tous les deux.

Cependant, je continue de la trouver sublime. Elle a toujours ce port de tête royal et sa démarche gracieuse. Puis, il y a toujours cette petite étincelle dans ses yeux.

J'ai l'impression qu'elle se retient de sourire en s'installant face à moi ou est-ce que je me fais des idées ? Peut-être que tout n'est pas encore totalement perdu. Malgré tout, elle fuit mon regard. Elle a les yeux fixés sur le thé qu'elle a pris avant de s'installer à ma table.

Je ne sais pas quoi faire. Je la laisse commencer ou est-ce que je parle en premier ? Elle ne dit rien et je ne sais pas comment interpréter ce silence. Elle attend que je dise quelque chose ou est-elle en train de seulement tolérer ma présence ? Peut-être que je devrais engager la conversation.

- Comment tu vas ?

- Pourquoi tu es là ?

Ok, donc on va oublier les politesses de convenance. Son ton agressif me montre que nous allons entrer directement dans la confrontation apparemment.

- J'accompagnais ma mère pour son rendez-vous de suivi.

Elle relève la tête vers moi et je vois une lueur de compassion passer dans ses magnifiques prunelles. Je sais qu'elle apprécie beaucoup celle qui m'a donné la vie et qu'elle lui a été très reconnaissante de l'accueil qu'elle lui a fait dans la famille avec son petit garçon. Sa voix se fait plus douce.

- Comment va-t-elle ?

- Bien. Les résultats sont bons.

- Tant mieux. Elle est encore là ?

- Non, je l'ai raccompagné chez elle.

- Ok.

Un nouveau silence s'installe alors qu'elle plonge à nouveau sa vision dans sa tasse de thé qu'elle cramponne entre ses mains. Visiblement, ce n'est pas elle qui abordera la soirée ou tout a basculé.

- Comment va Nathan ?

Je la vois se crisper à l'évocation de son fils.

- Bien.

- Tu veux bien l'embrasser pour moi ?

- Ok.

Elle a repris son ton glacial et est très peu loquace quand même. C'est bien beau tout ça mais il faut se lancer et aborder le sujet qu'on évite depuis tout à l'heure, même si elle continue de dévier son regard du mien.

- Emma, il faut qu'on parle de ce que tu as vu. Enfin, plutôt de ce que tu as cru voir.

- J'ai vu une pétasse brune en minijupe collée à toi avec ses bras autour de ton cou et qui était prête à t'embrasser.

Touché.

- Oui c'est vrai mais l'interprétation que tu en a faite est faussée.

- Je sais. Raph et Laurent me l'ont expliqué.

- Alors, tu sais qu'il ne s'est rien passé avec Lisa ?

- Ce soir-là, il ne s'est rien passé oui.

- Alors ? Pourquoi en sommes-nous toujours au même point ?

- Parce que je sais aussi que cette fille était ton plan cul, que vous avez couché plusieurs fois ensemble et qu'elle travaillait avec toi.

Le PatientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant