Chapitre 40

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Je traverse la ville à moto, plus rapide que la voiture, et me contrebalance des limitations de vitesse et du code de la route. Elle m'a appelé, m'a dit avoir besoin de moi et plus rien. Le silence alors que l'appel n'était pas coupé.

J'ai entendu de l'agitation, un cri, je me suis mis à hurler dans le téléphone. Je ne comprenais pas ce qui se passait. Puis, j'ai réalisé que Tiffany avait saisi le combiné et me parlait. Elle m'a expliqué qu'Emma venait de perdre connaissance à la suite d'un malaise et m'a dit de venir.

J'arrive sur son lieu de travail et demande à la voir mais on me demande de patienter en salle d'attente. La belle affaire ! La femme de ma vie qui m'ignorait et me manquait depuis presque trois mois m'a enfin appelé et la seconde d'après, elle était dans les vapes. Comment peut-on me demander d'attendre encore ? Ça va durer encore combien de temps tout ce merdier ?

J'insiste auprès de l'accueil pour au moins me donner de ses nouvelles mais on me répond que ce n'est pas possible. Putain je fais quoi ? Je pète un scandale tout de suite ou pas ?

Puis, me vient une idée. Je demande s'il est possible de parler à Tiffany. La réceptionniste soupire en levant les yeux au ciel mais finit par céder et décroche son standard. Quelques secondes plus tard, la meilleure amie de ma belle fait son apparition derrière une porte battante et vient directement vers moi.

- Tiffany, comment elle va ? Qu'est-ce qui s'est passé ? Qu'est-ce qu'elle a ?

- Wowowo, du calme mon grand. Elle a repris connaissance mais elle est très faible. Ils sont en train de lui faire une batterie d'examens mais tu sais, ça fait un petit moment qu'elle vit sur ses réserves et son corps a fini par lâcher.

- Quoi ? Qu'est-ce que ça veut dire ?

- Luke, depuis votre séparation, elle ne dort quasiment pas, mange peu, enchaîne les gardes pour ne pas avoir à penser. Elle est épuisée.

- Je peux comprendre, je suis presque dans le même état.

- Ouai, j'ai bien vu ta sale gueule à la cafétéria l'autre coup. T'as perdu combien de kilos toi aussi ?

Toujours aussi franche celle-là ! Mais c'est vrai. J'hausse les épaules en simple réponse à sa question et je m'assois sur un siège et prends ma tête dans mes mains.

- Comment on en est arrivé là ?

- Tu veux que je te rappelle les faits ?

- Mais merde, je n'ai rien fait !

Mais oui putain, je n'ai rien fait ! Il ne s'est rien passé, je ne suis pas fautif ! J'en ai marre qu'on me renvoie toujours ça dans la gueule ! J'en ai même voulu à Emma de me laisser souffrir alors qu'elle savait que je ne l'avais pas trompé.

La bimbo vient s'asseoir à côté de moi et pose sa main sur mon épaule alors que sa voix s'adoucit.

- Je sais, elle sait, on sait tous. Mais, ça n'a fait que lui rappeler qu'il y aura toujours des femmes qui tourneront autour de toi et elle a eu peur.

- Mais je m'en fous de ces femmes, il n'y a qu'elle.

- Luke, j'en suis convaincue.

- Ah oui ?

- Il suffit de voir comment tu la regardes, ton sourire lorsque tu la vois. C'est évident que tu es raide dingue d'elle. Puis vu comment tu as dépéri toi aussi, c'est sûr que t'en chie de ne plus être avec elle. Je ne sais pas si je devrais te le dire mais elle n'est pas tombée si bas après sa rupture avec le père de son fils alors qu'il l'a faite beaucoup souffrir. Et lui, il ne s'est pas rendu malade comme toi.

Ce qu'elle me dit me réconforte un peu. La pression redescend un minimum.

- Au téléphone, elle a dit qu'elle avait besoin de moi.

- Je m'en doutais, c'est pour ça que je t'ai dit de venir.

- Merci Tiffany.

- Oh ne me remercie pas. Ce n'est pas pour toi que je l'ai fait mais pour ma copine.

- Je me disais aussi...

Nous rigolons tous les deux. L'atmosphère s'est quelque peu détendue. Elle reprend son sérieux pour continuer à me parler.

- Tu sais Luke, Emma a dû effectuer un travail sur elle-même. Romain a fait plus de dégâts qu'on ne pensait. Elle a dû chercher en elle la force d'avoir à nouveau confiance en elle, les autres, la vie, etc. Et si elle t'a appelé, c'est parce qu'elle doit être prête.

- Depuis quand tu es devenue psy toi ?

- Depuis que je couche avec celui de l'hôpital.

Je manque de m'étouffer avec ma propre salive. Je ne m'attendais pas à ce type de confidence. Je tourne mon regard étonné et curieux vers elle.

- Ecoutes, je ne vais pas parler de ma vie amoureuse avec toi et certainement pas maintenant. Je vais retourner voir où ils en sont et je viens te chercher dès que tu pourras la voir. Sois encore un peu patient.

- Ok, et encore merci.

Elle me fait un petit sourire compatissant et repart par la même porte que celle par laquelle elle est apparue. Je reste seul sur mon siège, comme un con.

Je repasse dans ma tête la conversation que nous venons d'avoir et médite dessus.

Est-ce qu'elle a raison ? Est-ce que je serais enfin en train de voir le bout du tunnel ? Est-ce qu'Emma a décidé de me faire revenir dans sa vie ? Je l'espère plus que tout au monde.

Finalement, le problème n'était pas moi et les femmes qui me tournent autour, ce n'était même pas le fait qu'elle ne pouvait pas me faire confiance. C'était tout simplement un manque de confiance en elle. Son ex ne l'a pas peut-être pas maltraitée physiquement mais psychologiquement il a quand même fait des ravages. Je le déteste encore plus pour ça, pour ce qu'il lui a fait endurer et ce qu'il nous fait vivre. Je crois que si à l'instant je l'avais en face moi, je lui foutrais mon point dans la gueule. Je suis sûr que ça me soulagerait en plus.

Une heure plus tard, j'ai arpenté la salle d'attente de long en large. Mes pieds connaissent chaque recoin de cette pièce. Les chaises ont toutes eut la chance d'avoir mon cul sur leurs assises. J'ai feuilleté tous les magazines posés sur la petite table sans que je ne les regarde vraiment. Dès que j'entends des pas derrière la porte battante, je la scrute pour voir si Tiffany apparait mais elle n'est pas encore revenue vers moi.

Une demi-heure de plus s'écoule et je n'en peux plus. Je ne vais pas tarder à faire un esclandre. Je veux savoir comment va ma Sauveuse ! J'ai bu deux cafés alors que je suis déjà à un niveau de stress élevé.

Combien de temps ça va encore durer ? Ils ont tous ce qu'il faut dans ce satané hôpital pour que les examens soient faits rapidement et obtenir les résultats dans la foulée alors pourquoi c'est si long ? Je me dis que je vais peut-être franchir ces fichues portes et aller à sa recherche, quitte à entrer dans toutes les pièces et faire chier tout le monde.

Je continue de faire les cent pas, plongé dans ma réflexion à savoir ce que je vais faire si personne ne vient me donner des nouvelles quand je sens une main dans mon dos. Je me retourne pour voir la copine blonde de celle que j'aime. J'étais tellement absorbé par mes élaborations de plan d'attaque que je ne l'ai pas entendu s'approcher de moi.

Est-ce qu'elle est venue me dire qu'Emma a quelque chose de grave ? Qu'elle s'est à nouveau évanouie ? Qu'ils n'ont pas trouvé ce qu'elle a ? J'essaie de trouver un quelconque indice dans son expression de visage lorsqu'elle me sourit.

- Tu peux aller la voir.

Le PatientOù les histoires vivent. Découvrez maintenant