17
Le lendemain, Gabriel ouvrit les yeux en entendant la sonnerie insistante de son téléphone. Sa main tâtonna rapidement sur la table de nuit, attrapant l'appareil pour couper le son avant qu'il ne réveille Jordan. Le silence revint dans la pièce, à peine troublé par les respirations régulières de l'homme endormi à ses côtés. Il resta allongé quelques secondes, son bras toujours tendu vers le téléphone, sentant le poids de la fatigue peser sur ses épaules. Son corps protestait à l'idée de se lever, mais son esprit était déjà éveillé, conscient des responsabilités qui l'attendaient. Premier Ministre. Les mots dansaient dans sa tête comme à chaque matin depuis sa nomination. Cela paraissait encore irréel, comme un rêve étrange dont il n'était pas sûr de vouloir se réveiller. Il tourna doucement la tête vers Jordan, qui dormait paisiblement, un bras jeté nonchalamment sur sa propre poitrine. Gabriel ne put s'empêcher de sourire en le voyant ainsi, si tranquille. Dans la lumière tamisée de l'aube, les traits de Jordan semblaient adoucis, et Gabriel sentit une chaleur familière envahir sa poitrine. Alors qu'il se redressait pour sortir du lit, il entendit un léger mouvement. Jordan ouvrit un œil, groggy, ses cheveux en bataille.
« Tu t'en vas ? Murmura-t-il, la voix rauque de sommeil. Gabriel hocha la tête avec un sourire. Il se pencha légèrement vers lui, chuchotant :
- Oui, je vais à Matignon. Dors encore un peu, je te retrouve tout à l'heure. Jordan grogna un vague :
- À tout à l'heure. » Avant de fermer l'œil, sa tête retombant sur l'oreiller. En quelques secondes, sa respiration retrouva son rythme lent et paisible. Gabriel resta un instant immobile, le regard fixé sur lui, pris d'une envie irrationnelle de rester là, de profiter encore un peu de cette simplicité qu'ils partageaient. Mais le devoir l'appelait. Il se leva en silence, enfila ses vêtements et se prépara rapidement.
Dehors, Philippe l'attendait déjà. Gabriel monta dans la voiture, et le chauffeur jeta un coup d'œil dans le rétroviseur avant de démarrer, roulant jusqu'à la destination attendue. Aujourd'hui serait une journée particulière : une réunion importante à Matignon avec Jordan. Gabriel savait que cela ne serait pas simple, que les divergences entre leurs visions risquaient de s'exacerber. Mais pour l'instant, il choisit de se concentrer sur sa bonne humeur. Il était prêt à affronter la journée, même si une partie de lui espérait qu'elle ne l'éloignerait pas trop de celui qui dormait encore paisiblement dans leur lit. Lorsqu'il fut arrivé, Gabriel descendit de la voiture en replaçant sa veste sur ses épaules. Il entra, récupéra son courrier et se dirigea vers son bureau. Mon Dieu, je suis Premier Ministre. Se dit-il encore. Pendant la matinée, il devait s'entretenir avec le Président du Rassemblement National pour lui faire part de ses futures projets, normalement il n'y avait pas besoin de ça mais Gabriel s'en fichait. Puis à midi et demi, RTL les interviewerait pour le journal. Gabriel s'installa dans son fauteuil, prenant une profonde inspiration avant de poser ses mains sur le bois lisse de son bureau. Ce geste, simple mais chargé d'émotion, le ramena des années en arrière, dans un salon baigné par la lumière du soleil où son père, assis dans un vieux fauteuil, lui parlait de la vie, du travail, et des valeurs qu'il fallait toujours défendre. Je suis Premier Ministre, papa... pensa-t-il avec une pointe de douleur, ses doigts effleurant doucement le bureau. Le poids de cette réalité l'écrasait parfois, non pas parce qu'il doutait de ses capacités, mais parce qu'il savait que son père ne verrait jamais cela. Il serra les dents en se rappelant chaque étape importante de sa carrière que son père avait manquée. Sa nomination comme député, porte-parole, secrétaire d'état,... les interventions publiques, les débats animés – autant de moments où il avait secrètement espéré un regard approbateur, un sourire de fierté, une accolade. Il ferma les yeux, et les souvenirs jaillirent comme une marée montante. Il voyait son père, rayonnant, riant aux éclats dans des instants simples et heureux. Puis, cette image s'effaça, remplacée par une autre, bien plus difficile à supporter : celle de son père dans ce lit d'hôpital. Son visage, marqué par la douleur, semblait si loin du sourire qui réchauffait autrefois son cœur. Gabriel sentit une boule monter dans sa gorge. Il se mordit l'intérieur de la joue pour chasser les larmes qui menaçaient de couler. Il n'avait pas le droit de flancher, pas aujourd'hui, pas dans ce bureau où chaque geste était observé, chaque mot pesé. Mais le manque était là, immense, impossible à ignorer. Je ferais tout, tout, pour une minute avec toi, juste pour te raconter, pour te montrer que j'ai suivi tes conseils. Que je fais de mon mieux. Le son d'un coup frappé à la porte le tira brusquement de ses pensées. Il ouvrit les yeux, luttant pour retrouver son calme. La porte s'ouvrit sans attendre de réponse, et Antoine entra, un dossier sous le bras et un café dans la main. Son visage rayonnait d'enthousiasme, mais il s'arrêta en remarquant la fatigue et l'émotion contenues dans les yeux de Gabriel.
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LONG METRAGE
FanficBardellattal : plus de 250 506 mots ! 656 pages. En deux-mille-vingt-et-un, dans le silence feutré d'un vol au-dessus des nuages, Gabriel Attal et Jordan Bardella, deux rivaux politiques que tout sépare, se croisent sans savoir qui ils sont réelleme...