- Jamais tranquilles -

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On s'est assis tous les deux contre l'un des échafaudages. J'ai dû obliger beaucoup de Yigas prêts à me céder leur place de rester là où ils étaient. Je ne suis pas plus important qu'eux, et leur bien être passe avant le mien.

Je voudrais dormir, mais je ne le peux.
La fatigue tente tant bien que mal de prendre le dessus, et mes yeux me piquent, mais elle n'arrivera pas à me dominer. Elle est là, à fleur de peau, mais je ne lui céderai pas.

Je n'avais jamais vu Line pleurer. La dernière fois, c'était quand nous nous étions disputés. Et elle était partie pour que je ne la vois pas en larmes.
Je me souviens dans un sourire de comment elle était lors de son arrivée au gang. Elle a vraiment changé depuis.

Des Yigas m'ont rapporté qu'elle s'était battue farouchement pendant la bataille, mais étrangement en épargnant tous ceux qu'elle attaquait.
Je caresse les cheveux de Line, endormie contre moi.
Elle me paraît toujours tellement plus sereine quand elle dort...

Elle s'est livrée à moi, de tout ce qui la tourmentait, tout ce qu'elle a vécu, et elle n'avait plus aucune Rancœur en elle. Mais je sais qu'elle est de nouveau la proie de son passé : sa Rancœur est revenue.
Et je ne sais pas comment l'aider.
C'est dur, très dur. La voir replonger - pas autant, mais au moins un peu - me fait frémir. Je ne veux pas la "perdre" une seconde fois.

Je grimace quand j'effleure le bois derrière moi.
Je n'ai pas soigné ma plaie.
Ce n'est pas grave. Elle cicatrisera seule.

Je m'adosse dans un pincement de lèvres à la palissade, et sens malgré moi mes yeux se fermer.
Dire que j'avais dit que la fatigue ne prendrait pas le dessus...

Il me semble que je n'ai fermé les yeux que depuis quelques secondes quand une main me secoue doucement.
Je me redresse brusquement, me maudissant de m'être endormi.
C'est Line qui m'a réveillé. Et mon chef se tient penché vers moi, les poings sur les hanches.

- Désolé Suppa, y'a urgence. Je ne voulais pas vous déranger alors que vous étiez tous les deux mais le Prophète nous a convoqués.

Je rejette la tête en arrière un court instant, l'esprit encore un peu embrumé, puis m'arme de courage et trouve la force de me lever. J'ai heureusement la sagesse de ne pas me relever d'un coup, sinon bonjour le vertige.
Je tends la main à Line pour l'aider à se lever.
Elle a l'air aussi fraîche et reposée que moi, pensé je ironiquement.

Mon chef nous considère d'un air à la fois attendri et grave.

- Désolé encore les p'tits jeunes.


Chroniques d'Hyrule : 1. Haine, Rancœur et VengeanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant