Prologue

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J'ai... faim...

Il trébucha sur une pierre, et s'étala sur le sol.

Quand il essaya de se relever, ses bras cédèrent. Ses jambes ne lui répondaient plus.

Alors comme ça... c'était la fin ? La vraie ?

Quand leur maison avait été détruite, il avait cru que c'était la fin.

Quand ils avaient été chassés de la Citadelle, sa mère et lui, il avait cru que c'était la fin.

Quand Adeya avait été incendiée et prise par les monstres, il avait cru que c'était la fin.

Mais son histoire avait continué, et uniquement la sienne.

Il ne sentait plus son ventre tant il avait faim. Il aurait pu manger n'importe quoi, même l'horrible gruau qu'il avait été forcé d'avaler quand on l'avait gardé quelques temps dans la prison de la Citadelle.

Des larmes coulèrent le long de ses joues. Il ne voulait pas finir ainsi. Pas après avoir enduré tout ça. Il ne voulait pas avoir souffert pour rien.

Il rampa en s'aidant de ses coudes jusqu'en haut de la butte de sable marquant l'entrée de la région désertique.

Soudain, miraculeusement, une tente se dessina au loin, entre les deux parois orangées du Canyon.

Puis une deuxième. Et encore une autre.

Un campement. Il était sauvé.

Il tenta une nouvelle fois de se mettre debout, mais il tomba, culbuta le long de la pente pour finir juste à l'entrée du campement.

Deux hommes portant une étrange tenue se tenaient autour d'un petit feu de camp, montant la garde.

- J'ai... faim... murmura le jeune garçon.

Les deux hommes relevèrent la tête.

L'enfant se figea.

Masque blanc.

Œil de sang.

Inversé.

Des Yigas.

Il était tombé sur un campement d'assassins. Un campement de renégats, de traîtres à la famille royale.

- Qu'est-ce qu'il fiche là, ce gamin ? Grogna l'un des deux Yigas et s'approchant de lui, serpe coupe-gorge en main.

L'enfant essaya de reculer, mais il ne le peut : il était vidé de toute force.

Il avait terriblement peur. Mais il se rassura tant bien que mal en se disant que si les Yigas étaient des assassins, ils n'étaient pas des fous appréciant le fait de faire souffrir leurs victimes. Mourir de leur main était certainement la plus douce mort que la Déesse pouvait lui offrir.

Puis l'évidence s'imposa à lui.

Il ne voulait pas mourir. Pas ici, pas maintenant !

Après avoir souhaité mourir pendant des jours, maintenant que sa mort approchait, il voulait vivre.

Le Yiga arma sa serpe.

Ça y est. C'était fini.

Une petite explosion derrière eux stoppa son mouvement.

- Gggnnh... ah ! Ce petit somme m'a bien r'quinqué ! Déclara le bonhomme rondouillard qui venait d'apparaître. Il s'étira.

- Grand Kohga !

Les sbires reculèrent et s'inclinèrent devant leur chef.

Il ne leur prêta aucune attention, ayant remarqué l'enfant aux joues creuses étendu sur le sol.

Il s'approcha de lui en l'observant sous toutes les coutures.

Puis quand il fut suffisamment proche, il passa une main dans son dos, en un geste en tout point identique à celui de sous-fifre quand il avait sorti sa serpe.

L'enfant mit ses bras en protection devant son visage par réflexe et ferma les yeux quand le Grand Kohga dégaina.

Pourtant, il n'y eut aucune douleur. Rien.

L'enfant se risqua à ouvrir un œil.

Il était encore vivant.

La seule chose que le Grand Kohga avait dégainé, c'était une banane.

L'enfant le regarda avec incompréhension.

L'homme se rapprocha de lui, en tendant devant lui la banane, l'autre main mise en évidence, vide, paume vers le haut. Puis il posa sa main sur sa hanche en se penchant.

- Tiens. Mange. Tu as le ventre vide, non ?

Il déposa la banane dans les mains de l'enfant, puis s'assit à ses côtés.

- Mais attention...

Il secoua l'index d'un air taquin.

- ... maintenant, tu as une dette envers moi !


Chroniques d'Hyrule : 1. Haine, Rancœur et VengeanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant