Chapitre 12 : Échos du Village.

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Après leur installation au palais, Maëlle et Victor, désireux de mieux comprendre leur nouvel environnement, décidèrent d'explorer discrètement le village voisin. Conformément aux directives du roi, ils se déguisèrent en simples touristes, optant pour des vêtements modestes afin de ne pas attirer l'attention. Le matin, ils quittèrent le palais à pied, profitant de la fraîcheur de l'aube pour s'immerger dans la vie quotidienne des habitants.

Le village, niché au pied de collines dorées par le soleil, semblait suspendu dans le temps. Les ruelles pavées, étroites et sinueuses, étaient bordées de maisons aux murs en pierre ocre, ornées de volets en bois vieilli par les années. Chaque pas résonnait doucement contre les pavés, les échos se mêlant aux murmures des conversations des villageois, au cliquetis des marchandises transportées sur des charrettes, et aux cris joyeux des enfants jouant dans la poussière.

Maëlle et Victor avancèrent prudemment, leurs regards attentifs détaillant la scène autour d'eux. La pauvreté semblait omniprésente, une réalité brutale qui contrastait fortement avec le luxe du palais. Les habitants, vêtus de tuniques simples et souvent usées, s'activaient avec une résilience impressionnante. Les hommes, dont la peau tannée par le soleil reflétait des années de dur labeur, travaillaient sur des échafaudages rudimentaires pour réparer des maisons. Les femmes, quant à elles, s'affairaient autour des puits ou des étals, portant de lourdes jarres sur leurs têtes tout en surveillant leurs enfants avec un regard attentif.

En passant devant une maison en cours de réparation, Maëlle observa de près les artisans. Ils utilisaient des outils rudimentaires pour consolider les murs de pierre, leur travail nécessitant une minutie et une endurance remarquables. Les éclats de leur travail se mêlaient à la poussière des matériaux, créant une atmosphère d'effort et de persévérance. Les femmes, en groupe autour du puits, discutaient en préparant leurs jarres, échangeant des histoires et des conseils tout en effectuant leurs tâches quotidiennes. Leurs rires et leurs voix, teintés de fatigue mais aussi de camaraderie, ajoutaient une note vivante à cette scène de travail acharné.

Au détour d'une rue étroite, ils rencontrèrent leurs premiers mendiants. Des hommes et des femmes, affaiblis par la faim et la fatigue, tendirent la main dans l'espoir d'une aumône. Leur apparence frêle et leurs regards implorants contrastait avec la robustesse des artisans. Maëlle, touchée par leur détresse, plongea sans hésiter dans ses poches, offrant ce qu'elle pouvait avec une sincérité désarmante. Victor, faisant de même, partagea des pièces d'argent et quelques petites douceurs qu'il avait emportées pour leur propre plaisir. Les mendiants les remercièrent avec des regards humides et des bénédictions murmurées, leur gratitude visible dans chaque expression.

Leur prochaine destination était le marché, un lieu vibrant et animé, considéré comme le cœur du village. Dès leur arrivée, ils furent immédiatement enveloppés par un mélange de couleurs, de sons et d'odeurs qui évoquait un monde à part. Le marché s'étendait sur une grande place entourée d'arcades en pierre, où les commerçants avaient installé leurs étals sous des auvents de toile battus par le vent. L'air était saturé des arômes des épices - cumin, coriandre, safran - mélangés à ceux des fruits mûrs, des légumes frais et du pain tout juste sorti du four.

Les étals regorgeaient de produits locaux, présentés avec soin sur des tables en bois rudimentaires. Des montagnes de dattes et de figues, empilées en pyramides parfaites, côtoyaient des paniers débordants de grenades aux teintes éclatantes. Des grappes de raisin, suspendues au-dessus des étals, captaient les rayons du soleil, tandis que des pastèques et des melons, fendus en deux pour dévoiler leur chair juteuse, promettaient une fraîcheur bienvenue. Les commerçants, vêtus de longues djellabas, interpellaient les passants avec des sourires chaleureux et des voix fortes. Les négociations étaient un art, un échange verbal aussi coloré que les produits qu'ils vendaient. Maëlle et Victor s'arrêtèrent à plusieurs étals, observant les transactions avec curiosité. Ils furent frappés par l'ingéniosité et la débrouillardise des commerçants, qui savaient transformer chaque vente en une expérience unique, attirant les clients avec des compliments et des échantillons gratuits.

À l'écart des étals alimentaires, d'autres commerçants proposaient des produits artisanaux. Des poteries ornées de motifs traditionnels, des tapis tissés à la main aux couleurs vives, et des bijoux en argent finement ciselés étaient exposés avec fierté. Les couleurs des étoffes, souvent tissées à la main, éclataient en nuances de rouges, bleus et jaunes, évoquant les teintes du désert et du ciel au crépuscule. Maëlle, fascinée par les détails et la qualité des objets, se laissa tenter par un tapis aux motifs complexes qu'elle trouva particulièrement attrayant.

Au centre du marché, une fontaine en pierre crachait une eau claire et fraîche, où les enfants venaient se désaltérer en riant. Autour de cette fontaine, des groupes se formaient pour discuter, se détendre ou échanger des nouvelles. Les artisans, pour leur part, travaillaient dans un cadre de convivialité, offrant des démonstrations de leur savoir-faire aux passants intéressés. Maëlle et Victor, en observant ces interactions, se sentirent profondément touchés par la chaleur humaine et la communauté qui régnaient dans ce lieu vibrant.

Ils continuèrent à distribuer discrètement de l'argent, glissant des pièces dans les mains des vieillards assis à l'ombre des arcades ou des jeunes mères cherchant à nourrir leurs enfants. Chaque geste était accompli avec une discrétion soigneusement étudiée, pour ne pas attirer l'attention sur leur générosité, mais plutôt pour apporter un soulagement temporaire à la misère qu'ils voyaient autour d'eux. Leur compassion, couplée à leur désir de rester incognito, les incita à agir avec délicatesse et à s'effacer dans l'anonymat de leur mission.

Après avoir quitté le marché, Maëlle et Victor se dirigèrent vers la mer, attirés par le chant lointain des vagues et la promesse d'une brise marine. Le village étant situé non loin de la côte, ils atteignirent rapidement le littoral. Le sentier qui les menait à la mer serpentait à travers des dunes dorées, parsemées d'herbes sèches qui ployaient sous le souffle chaud du vent. L'air se chargeait peu à peu de l'odeur salée de l'océan, mélangée au parfum des fleurs sauvages qui poussaient ici et là malgré la rudesse du terrain.

Le bruit des vagues, d'abord discret, se fit de plus en plus fort, jusqu'à devenir un grondement constant et apaisant. Lorsqu'ils atteignirent la crête de la dernière dune, le paysage qui s'étendait devant eux les laissa sans voix. La mer, d'un bleu profond, se perdait à l'horizon, se confondant avec le ciel éclatant. Les vagues venaient se briser en douceur sur une plage de sable fin, presque blanche, qui scintillait sous la lumière du soleil. Des coquillages, polis par les vagues, parsemaient le rivage, ajoutant des touches de couleurs pastel aux tons neutres du sable.

Le littoral était sauvage, préservé de toute construction humaine. Aucune trace d'immeubles, de routes ou même de cabanes de pêcheurs. C'était un paysage naturel, intact, où la mer et le désert semblaient se rencontrer dans un accord parfait. Plus loin, des falaises abruptes s'élevaient, leurs parois rocheuses marquées par le temps, offrant un contraste saisissant avec la douceur de la plage. Ces falaises, aux teintes rougeâtres et dorées, se dressaient comme des remparts naturels, protégeant l'intimité de ce lieu hors du temps.

Maëlle et Victor descendirent lentement vers la plage, leurs pas s'enfonçant dans le sable chaud. La fraîcheur des vagues caressant leurs pieds nus leur apporta un soulagement bienvenu après la chaleur du marché. Ils avancèrent jusqu'à la ligne de flottaison, là où la mer laissait sur le sable des motifs délicats, des lignes ondulées formées par le retrait des vagues. Les deux cousins se laissèrent envahir par la beauté brute de ce lieu, par la puissance tranquille de l'océan, qui semblait à la fois éternel et changeant. Ici, tout paraissait plus grand, plus vaste, et les soucis du monde semblaient bien lointains.

Victor s'éloigna un peu, suivant la courbe de la plage, observant les oiseaux marins plonger dans les vagues à la recherche de nourriture. Maëlle, quant à

elle, resta immobile un moment, le regard perdu dans l'immensité bleue. L'océan, avec son calme trompeur, lui évoquait la complexité de la tâche qui les attendait. Il était vaste, indomptable, mais également porteur d'espoir et de renouveau.

Ils trouvèrent finalement refuge sur une large pierre lisse, à l'ombre d'une petite avancée rocheuse. Le soleil commençait à descendre lentement vers l'horizon, projetant des reflets dorés sur l'eau et transformant le ciel en une palette de couleurs allant du rose pâle à l'orange vif. Ils contemplèrent en silence ce spectacle naturel, chacun plongé dans ses pensées. La mer, ce jour-là, leur offrit un moment de répit, un instant de paix avant de retourner à leurs devoirs et à la responsabilité qui les attendait. La rencontre de la terre et de l'océan, dans toute sa majesté, offrit à Maëlle et Victor une perspective nouvelle et apaisante, un prélude nécessaire à l'immense tâche qu'ils avaient décidé d'accomplir.

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