Chapitre 80

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Attention : ce chapitre comporte des scènes de violence conjugale plus développées.

Lundi matin...

— Tu dors dans le canapé, maintenant ?

La voix, glaciale et pleine de reproches, fait sursauter Nelly. Son cœur s'emballe instantanément. Ses yeux clignent, désorientés, cherchant à distinguer si elle rêve ou si c'est bien lui. Elle se redresse lentement, les muscles encore engourdis de la nuit.

— Bertrand ? sa voix vacille, incrédule. Mais qu'est-ce que tu fais là ?

Elle se frotte les yeux, ses pensées encore brumeuses.

— Il est quelle heure ?

Bertrand reste à distance, une ombre imposante dans l'aube naissante. Son visage, habituellement fermé, est déformé par une colère qu'elle ne reconnaît que trop bien. Il jette un regard méprisant vers le canapé, là où elle s'est endormie la veille, seule.

— Six heures et demi, répond-il d'une voix mordante. Je viens d'arriver... et devine quoi !

Nelly s'approche instinctivement, espérant une explication, mais il recule brusquement, comme si son contact lui était insupportable.

— Qu'est-ce qu'il se passe ?

Elle s'efforce de garder une voix douce, mais son estomac se tord. Ses instincts lui hurlent de s'éloigner, que quelque chose ne va pas.

— Que crois-tu ? Que je vais t'embrasser et jouer au petit mari modèle ?

Son ton est plein de sarcasme, et Nelly fronce les sourcils, perplexe. Une vague de peur monte en elle.

Non... il ne peut pas savoir. Comment pourrait-il ?

— De quoi tu parles ? souffle-t-elle, sa gorge serrée par l'inquiétude.

Bertrand ne répond pas tout de suite. Ses yeux flambent de rage lorsqu'il fouille dans son sac pour en sortir une poignée de journaux. Il les jette brutalement sur la table basse, les pupilles dilatées par une colère sourde.

— Regarde par toi-même, gronde-t-il, sa voix pleine de venin.

Nelly sent un frisson glacé lui parcourir l'échine. Les journaux sont étalés devant elle, et, à leur vue, elle sent son cœur s'arrêter un instant. Les tremblements de ses mains sont presque imperceptibles, mais elle les sent, incontrôlables, sous sa peau. Elle respire profondément et tend la main pour attraper l'un des magazines. Sur la couverture, une photo floue d'elle et Jonathan, prise au restaurant. Elle se revoit, souriant, relaxée, dans ce moment qui semblait si innocent. Elle feuillette rapidement les pages, espérant que ce ne soit rien de sérieux, juste une rumeur comme les autres. Rien de concret, juste des insinuations, des suppositions, mais c'est suffisant.

Elle referme sèchement le magazine et le rejette sur la table avec dédain. Son regard se durcit, mais elle refuse de montrer ses failles.

— Et ? dit-elle simplement, en levant la tête vers Bertrand, le défiant du regard.

Une tempête se déchaîne dans son esprit.

Qu'est-ce que Jonathan va penser de tout ça ?

Elle sait qu'il va voir ces photos, que cette situation va éclater à la figure de tout le monde. Elle se sent horrible de songer à un autre homme pendant que le sien contribue à améliorer leur quotidien en travaillant... néanmoins, Bertrand l'a délaissée, humilié, violenté et, perdue, elle a fauté. D'un côté, elle s'en veut terriblement et, de l'autre, pas du tout.

Que suis-je devenue, sinon un monstre ?

— Tu as lu ce qui est écrit ?! hurle soudain Bertrand, son visage rouge de rage. Comment peux-tu rester aussi calme ?!

Joue-moi, l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant