Chapitre 84

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— Il ose t'envoyer des messages ! Incroyable ! Il n'a honte de rien ! hurle Madeleine, sa voix montant d'un cran à chaque mot, tremblant de rage.

Nelly se mord la lèvre, fixant son téléphone d'une main tremblante. Elle savait que Madeleine réagirait ainsi, mais l'entendre dire à voix haute... c'était comme si la situation devenait tout à coup plus réelle, plus douloureuse. Un nœud se forme dans sa gorge, alors que ses pensées se bousculent, confuses. Elle a appelé sa sœur parce qu'elle avait besoin de se sentir moins seule dans ce chaos, besoin d'un allié, de quelqu'un qui pourrait partager cette charge émotionnelle insoutenable. Et avoir Maddy en ligne, à cet instant précis, lui apporte un soulagement fragile, comme une couverture trop fine dans une nuit glaciale.

Nelly inspire profondément, essayant de contenir la vague d'émotions qui menace de la submerger. Elle a déjà tout expliqué à Madeleine – du moins les grandes lignes. La découverte des lettres, ce secret si soigneusement enfoui, ces baisers échangés avec Jonas, des moments volés qui lui brûlent encore les lèvres. Mais elle n'a pas osé plonger dans les détails, n'a pas su trouver les mots pour décrire ce tourbillon d'émotions qui la dévore de l'intérieur. Comment expliquer ce qu'elle ressent ? La confusion, l'attrait, la culpabilité ?

Madeleine, toujours la sœur protectrice, a immédiatement proposé de passer la voir mais Nelly s'est terrée derrière un mensonge, un de plus. C'est ce même mensonge qu'elle a aussi servi à Leticia, sa meilleure amie, pour éviter toute confrontation directe, pour éviter d'affronter la vérité.

— Je suis à Paris. J'attends Bertrand à l'hôtel pour aller visiter un logement, avait-elle murmuré d'une voix étranglée, ses mains crispées sur le combiné.

— Tu vas déménager ? À cause de lui ? Madeleine a marqué une pause, incrédule. Nelly, mais...

Le cœur de Nelly bat à tout rompre. Elle ferme les yeux, ressentant l'angoisse monter en elle comme une vague prête à la submerger.

— Je ne... Non... Enfin, c'est ce que souhaite Bertrand.

Le silence qui suit est lourd, pesant. Nelly sent la question flotter dans l'air, suspendue, inexorable. Elle sait que Madeleine ne va pas laisser passer ça.

— Très bien, mais toi ? Qu'est-ce que tu veux, Nelly ?

La voix de sa sœur est plus douce maintenant, teintée d'inquiétude, presque d'une forme de tristesse. Comme si elle pouvait deviner que Nelly est à un carrefour dangereux, prête à s'effondrer.

Nelly reste figée. Les mots se bloquent dans sa gorge. Que veut-elle vraiment ? Rester à Illac, élever Louis sereinement mais tout à basculé en l'espace de quelques mois. Ce qu'elle pensait être des certitudes –le foyer qu'elle a fondé, sa relation avec Bertrand-semblent se dissoudre comme du sable entre ses doigts. Ses pensées sont un chaos informe, comme si chaque désir, chaque peur, chaque regret tourbillonnait sans relâche, sans répit.

Elle ouvre la bouche pour répondre, mais aucun son n'en sort. Une vague d'impuissance la submerge. Puis, d'un coup, Madeleine reprend la parole, sa voix brisant l'immobilité.

— Et dire que ce salopard te fait la cours alors qu'il va se marier !

— Marier ? répète-t-elle, abasourdie, comme si l'idée même ne pouvait s'incruster dans la réalité.

— Oui, c'est partout sur Internet, dans les journaux people, même dans les infos locales ! Madeleine pousse un soupir frustré. Ils parlent d'un mariage en grande pompe. La fiancée a été interviewée, et apparemment... elle attend un bébé.

Nelly écarquille les yeux, son corps tout entier se figeant, chaque muscle se contractant sous le choc.

—Un bébé...

Joue-moi, l'amourOù les histoires vivent. Découvrez maintenant