♫ In My Veins - Andrew Belle
As.
" J'ai besoin de m'aérer. Samedi je vais partir sur la journée en mini rando avec K. Ta présence à nos côtés nous ferait à tous deux le plus grand bien. Si tu es d'accord pour nous accompagner, rdv samedi, 8h, avec ton vélo. "
Je fixai toujours le petit bout de papier que je tenais entre mes mains. J'aimerai tellement aller avec elle, c'était évident. Mais ça m'étonnerai beaucoup que mes parents soient d'accord avec ça. Je soupirai en pensant que je devrai tout de même les affronter.
Mais il fallait que je le fasse. Pour elle. Elle disait explicitement qu'elle avait besoin de moi. De plus, se balader seule par ici durant une journée entière me paraissait plutôt dangereux. Je serai plus rassuré à ses côtés.
Je savais très bien à quel point elle est mal en ce moment. Je le voyais dans son comportement, et dans ses yeux surtout. Il suffisait que je plonge mon regard dans le sien pour savoir si quelque chose la tracassait.
Actuellement, je voyais bien qu'elle avait des ennuis, plus particulièrement avec ses amis. Je ne savais pas vraiment de quoi il en retournait, mais j'en savais assez pour savoir qu'elle avait vraiment besoin de se changer les idées.
J'aimerai tellement être le gars qui lui fasse oublier tous ses soucis, mais je savais très bien que ce n'était pas possible. Alors j'essayais de faire de mon mieux. C'était la seule chose que je pouvais faire pour elle, et je m'investissais entièrement dans cette tâche. Je me sentais bien assez impuissant comme ça au lycée.
Quand je voyais son ami, toujours collé à ses basques, qui l'embarrassait souvent en la serrant d'un peu trop près, j'avais juste envie de le faire dégager, de lui expliquer qu'elle voulait pas de lui, qu'il fallait qu'il arrête de forcer. Mais dans ces moments, je ne pouvais rien faire, je me contentais donc simplement de fermer les yeux et de me détourner.
Tout comme lorsque je la voyais triste, assise seule sous son arbre. Ça me donnait envie de m'approcher d'elle et de la serrer contre moi pour la réconforter. Mais je ne pouvais pas. En dehors de l'écurie, tout ça était totalement impossible. Alors je me contentai de lui envoyer des sourires, car je savais qu'elle y répondait toujours, même s'il m'arrivait plus d'une fois de m'interroger sur la sincérité de ces gestes.
Putain, il fallait que j'arrête de penser à elle. Je me passai ma main sur mon visage pour me décrisper, mais rien n'y fit. Il fallait que je descende. Que j'affronte mes vieux. Et que j'aille la rejoindre.
Maud.
Je fixai la dernière sacoche à la selle de Knight. Il attendait sagement que je finisse d'accrocher mes bagages. Je fis un ultime nœud, lui donnai une caresse affectueuse, et le détachai. Il se frotta contre mon épaule, et je sentis mon cœur s'emplir d'affection pour cette grande bête de 600 kilos qui me suivrait partout les yeux fermés.
Et, au loin, alors que je m'apprêtai à me mettre en selle, je vis un garçon arriver sur sa bicyclette. Je souris. Knight n'était pas le seul à me suivre n'importe où les yeux fermés. Il y avait Lui également.
Lui qui vint nous saluer, en commençant par Knight. Mon cheval, cet idiot, lui montra les dents, sûrement pour l'intimider. Le garçon le fixa méchamment quelques instants puis, contre toute attente, retroussa ses lèvres et lui montra ses dents également, en fronçant les sourcils et poussant un petit grognement.
Sa réaction me fit rire, tout comme la réaction de Knight, qui se contenta de le regarder impassiblement d'un air qui semblait dire: Tout va bien pour toi mon ami? Tu me sembles légèrement perturbé tout de même... Enfin je dis ça pour ton bien!
Nous marchions depuis maintenant trois bonnes heures, dans un silence quasi-complet. Mon beau brun chevauchait sa bicyclette, et moi mon fidèle destrier. Parfois, je m'amusais à pousser mon ami dans le dos, pour le faire avancer sans qu'il ait à pédaler sur quelques mètres. Depuis notre départ, nous avions déjà tous deux échangé de monture.
Nous nous trouvions à plusieurs kilomètres de la maison, et de toute trace d'activité humaine également. Les champs nous entouraient de toutes parts, lorsque les bosquets ne prenaient pas leur place. Les criquets crisaient, les oiseau chantaient, et les sabots de Knight mordaient le chemin caillouteux, à l'instar du pneu du vélo du garçon. Nous étions seuls au monde, et c'était la meilleure sensation qu'il existait.
Nous finîmes par nous arrêter pour déjeuner. Nous choisîmes un coin avec de l'herbe bien grasse sur les bords d'un ruisseau. Des arbres ombrageaient la place, et la légère brise qui y soufflait finissait à rendre cet endroit idéal. Nous mîmes tous deux pied à terre, et je détachai la sacoche de nourriture de ma selle avant de m'occuper de mon cheval.
Je lui enlevai la bride, la remplaçant par un licol accroché également à ma selle, que je posai quant à elle près d'un arbre. Je sortis une brosse d'un autre sac et entrepris rapidement de la passer rapidement sur le poil de Knight devenu poussiéreux et transpirant de notre chevauchée. Pour finir, je sortis un petit sac de granulés, et le vida à même le sol.
Comme prévu ma monture délaissa l'herbe pour se précipiter vers son déjeuner. J'en profitai pour accrocher la longe autour de ma cheville gauche, à la manière des Indiens. Je savais très bien que ce n'était pas vraiment une technique très sécuritaire pour moi comme pour mon cheval, mais j'adorais nous savoir reliés par cet immense morceau de nylon de dix mètres de long.
Je me retournai ensuite vers ma sacoche de nourriture, pour voir que As avait déjà tout préparé: il avait sorti les différents plats et les couverts, il ne me restai plus qu'à m'installer. Alors je pris place à ses côtés, et nous dégustâmes notre repas en silence, bien évidemment, en observant l'eau couler dans ce petit ruisseau.
Quand nous fûmes tous rassasiés, il était évident qu'aucun de nous n'avait envie de prendre la route. Knight, qui avait finit ses granulés, s'attaquait maintenant à l'herbe grasse, avec des airs de cheval bienheureux.
Alors, mon beau brun s'allongea dans l'herbe et ferma les yeux. Je ne pus m'empêcher de l'admirer, de parcourir du regard son visage si fin encadré de toutes ces mèches brunes folles. Des tâches de rousseurs lui constellaient les pommettes à la manière des quelques fleurs dans cette prairie, et il ressemblait à un enfant plongé dans un heureux sommeil.
Je ne retins pas mon sourire. Ce garçon avait sans doute bien autre chose à faire en cette belle journée, mais il avait choisi de passer son samedi avec moi. Peu importait ce qu'il pouvait bien se passer dans sa vie, il était avec moi en ce moment, et c'était à mes côtés qu'il s'offrait une sieste dans une clairière paisible paumée au milieu de nul part.
Grisée par cette atmosphère de si grand calme, je m'allongeai près de lui. Il n'ouvrit pas les yeux, je ne savais d'ailleurs pas vraiment s'il dormait ou pas. Quoiqu'il en soit, je l'aperçus esquisser un infime geste dans ma direction. Sans véritablement en comprendre la raison, je fus prise d'une envie irrésistible de me blottir contre lui.
Peut-être qu'après tout ce qu'il s'était passé, j'avais besoin de me sentir définitivement en sécurité. Peut-être était-ce parce que la chaleur de son corps était la seule chose qui me manquait en ce moment.
Rapidement, je me retrouvai la tête reposée contre son torse, son bras m'entourant mollement la taille. Je n'avais aucun idée de l'endroit où était passée ma raison. Ce garçon me faisait faire n'importe quoi. Mais en cet instant, je ne souhaitais être nulle part ailleurs.
Son souffle lent dans mes cheveux, le battement de son cœur sous mon oreille, les effluves de son parfum de chatouillant les narines, le bruit des mastications de Knight, le gargouillis du ruisseau et les jeux d'ombres des arbres secoués par le vente finirent bientôt par me plonger dans un demi-sommeil apaisant.
Caleb n'existait plus. Louise n'existait plus. Déborah n'existait plus. Amélie n'existait plus. Chris n'existait plus. Ma mère n'existait plus. Mais Knight était là. As était plus réel que jamais. Et c'était tout ce qui comptait.
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Chevauchée
Teen FictionComment réagiriez-vous si, alors que vous êtes entrain de vous entraîner pour la compétition à venir avec votre cheval, un troublant inconnu se mettait à vous fixer de l'autre côté de la barrière? Comment réagiriez-vous si ce même inconnu revenait...
