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Asha ne faisait même plus attention aux routes qui défilaient, au temps qui s'écoulait. Tout ce qui lui importait était ses pensées, qui l'obnubilaient depuis qu'il était entré dans hovercar qui flottait à toute vitesse. Il ne savait pas ce qu'il adviendrait de George, il espérait seulement ne pas avoir à se retrouver en face de lui.

Lorsqu'il fut frappé, il avait ressenti la douleur. Pourtant il était persuadé, jusqu'à maintenant, que les A.S.H.A ne la ressentait pas. Ceci dit ce n'était pas une mauvaise chose. Il s'était senti extrêmement... Vivant lorsque le poing de George était venu s'écraser contre sa nouvelle joue. Il se demandait à présent si elle allait être marquée, ou pas.

C'était des questions simples qu'il se posait, et pourtant il leur accordait une certaine importance. Plus le temps passait, plus Asha se sentait humain.

Avant, les seules choses qui occupaient de la place dans ses pensées étaient : faire le ménage, nettoyer, ranger, haïr George, craindre son maître, ne pas toucher aux livres, et bien d'autres interdits encore. Désormais il ne se souciait plus de cela, mais de la marque qui apparaîtrait sur sa joue ou non. Asha avait la drôle d'impression d'être plus... Humain. Il avait toujours conscience de n'être qu'une machine, mais ses questionnements n'étaient plus en rapport avec ce qu'il devait faire, mais en ce qu'il pouvait ressentir.

Après un certain temps, qui lui parut interminable, l'hovercar s'arrêta devant ce qu'Asha reconnut comme étant un commissariat. Le bâtiment était à l'effigie de tous les autres. Blanc, sobre, simple, vide de toute fantaisie. Plus Asha le regardait, plus il trouvait son architecture austère et inhospitalière, contrairement à ce qu'il avait pu penser en voyant l'Institut.

On le tira du véhicule, un peu brutalement, et il fut emmené à l'intérieur. Peu après, il reconnut à travers les vitres d'un autre hovercar George, et alors il se figea. On avait beau le pousser, il ne bougeait plus. Là, en ce moment même, Asha avait peur. Il était littéralement pétrifié.

Pourtant, lorsque George sortit à son tour, Asha trouva le courage d'avancer pour ne pas croiser son regard qu'il devinait empli de rage.

Du reste, il ne fit plus attention à ce qu'il se passait. Il redevint attentif alors qu'il était assis, face à un bureau et à côté de George, dans la même position que lui. La proximité entretenue avec son maître ne le ravit pas, bien au contraire.

Un agent se tenait derrière le bureau blanc, les bras appuyés sur le meuble, le regard sévère. Derrière lui, postés à chaque coin de la pièce, deux autres agents. Asha put deviner que c'était des automates. Des A.S.H.A, de surcroît. La police les recrutait de plus en plus. Leur programme était modifié pour faire d'eux de véritables machines de guerre, redoutables. Asha en avait peur. Pourtant il était comme eux, enfin, pas tout à fait, et c'est ce qui le perturbait.

En effet, ces A.S.H.A là ne semblaient pas préoccupés par des idées ou émotions. Leur regard était... Vide. Asha se demanda si le sien l'était aussi.

Brusquement, la voix dure et sévère de l'officier le sortit de ses pensées.

- Monsieur Hamford, vous avez volontairement frappé votre automate alors même que celui ci sortait de sa mise à jour alpha. Pouvez-vous m'en expliquer la raison ?

- Un peu que je peux, râla George. Ce tas de ferraille sur pattes n'a pas été foutu de ressembler à ce que je voulais.

- Si je comprends bien, reprit l'agent, impassible, vous l'avez agressé parce qu'il a désiré ressembler à autre chose que l'apparence que vous lui aviez assignée d'avance ?

- Vous avez bien compris.

- Or, monsieur Hamford, si l'on se fie à la loi, vous n'en aviez aucun droits. Je cite l'article 481, notamment : "Tout acte de violence, que celle-ci soit physique ou mentale, envers un A.S.H.A et blablabla sera punie d'une amende de 800 crédits, et sera passible d'une peine de prison".

AshaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant