CHAPITRE TRENTE-CINQ.

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Elena.

Le dernier jour, j'ouvris brusquement les yeux dans mon lit, alors que les rayons de soleil filtrés par les volets réchauffaient le dessus de ma couverture. Je restai quelques instants, à contempler le plafond, alors qu'Anna dormait paisiblement de l'autre côté de la pièce. Toutes sortes de pensées défilaient dans ma tête, mais elles avaient toutes le même sujet : Lucas. Désormais, j'étais persuadée que je ne pouvais plus subir sans réagir. Je devais essayer, au moins essayer, de tout arranger. Je devais être sûre d'avoir tout fait, tout tenté, pour ne pas m'en vouloir, des années plus tard.

Alors, je me suis levée, avec une détermination nouvelle dans la tête. Qu'avais-je à perdre, de toute manière ? Rien du tout, au contraire. J'avais tout à gagner. Je me suis lavée, habillée et je suis descendue dans la salle commune qui se remplissait peu à peu. Je saluai quelques connaissances, les seules qui ne chuchotaient pas sur mon passage, puis je m'installai sur un fauteuil moelleux, attendant patiemment. Étrangement, je ne ressentais aucune appréhension, aucune peur. C'était comme si, après tout ce que j'avais vécu ces derniers moi, j'avais été totalement anesthésiée, et que je pensais sincèrement ne pas pouvoir vivre quelque chose de pire.

Au bout de quelques minutes, Nathan a fini par descendre de l'aile des garçons, ses cheveux bouclés encore humides et ses lunettes de travers. Lorsqu'il m'aperçut,il hésita, puis s'avança pour s'installer avec moi. Il prit place à mes côtés, et je lui adressai un sourire encourageant. Nous n'avions pas vraiment parlé depuis le baiser qu'il m'avait assené, et j'étais vraiment gênée de ne pas avoir mis les choses au clair avant. Mais désormais, il était temps.

— Comment tu vas ?, commença-t-il.

Ne voulant pas le froisser, je commençais à discuter avec lui de tout et de rien. Il semblait comprendre que cette discussion n'était pas anodine, et que le moment fatidique allait arriver, cependant, il semblait tout faire pour le repousser. Sa timidité était flagrante, et je me demandais comment il avait pu faire pour la chasser et oser m'embrasser, chez Ethan. Cela avait dû lui coûter énormément, et, à cette pensée, mon cœur se serra. Je n'allais pas l'encourager à vaincre son défaut en lui apprenant ce dont il se doutait sûrement.

Au bout d'un moment, alors qu'il me racontait ce qu'il comptait faire après le lycée, il s'arrêta. Il me regarda, parut prendre son courage à main, et déclara, d'une voix très claire, posée :

— Mais j'imagine que ce n'est pas pour que je te raconte mes projets que nous sommes ici, n'est-ce pas ?

Aussitôt, je détournai le regard, ne pouvant supporter ses yeux verts qui paraissaient me supplier de ne pas lui briser le cœur. Il était si fragile, innocent... Pourquoi avait-il fallu qu'il tombe amoureux de moi ? Je n'avais rien fait pour que cela arrive, et pourtant...

Je pris une profonde inspiration, puis, le regard toujours rivé ailleurs, je commençai :

— Nathan, je suis désolée. Sincèrement. Mais... il ne se passera jamais rien. Je veux dire, je...

Tout à coup, les mots se perdirent dans ma gorge, et je baissai les yeux, honteuse.

— Tu l'aimes encore, n'est-ce pas ?

Je me mordis la lèvre, et acquiesçai silencieusement. J'avais l'impression d'être une enfant qui avait fait une bêtise. Cela me faisait mal de l'avouer, oh oui, tellement. D'avouer que j'étais encore éperdument amoureuse de lui, alors que lui semblait m'avoir totalement oubliée. Je fermais les yeux, pour lutter contre les larmes qui menaçaient de couler.

« Elle s'appelait Anna »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant