CHAPITRE TRENTE-HUIT.

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Elena.

Durant les semaines qui suivirent, la fatigue et le travail étaient devenus des compagnons permanents pour tous les élèves de dernière année.. Les profs nous en demandaient plus que jamais, et nous étions à bout. Presque tous les élèves venaient au lycée avec le teint blafard et les yeux cernés. Quant à moi, j'étais dispensée de plusieurs contrôles en raison de ma grossesse. Le médecin m'avait fortement conseillé d'abandonner les cours pour cette année et de redoubler, mais il n'en était pas question. Je voulais avoir mon diplôme cette année-là. Alors, lorsque vint enfin le dernier jour de cours, tout le monde sembla avoir poussé un soupir de soulagement si conséquent que toute trace de lassitude s'était envolée sur les visages. Une fête devait avoir lieu le soir-même, où tous les dernière année étaient invités, mais Lucas, Ethan, Anna et moi avions décliné l'invitation, car Ethan nous avait proposé une tout autre activité : aller dormir à la belle étoile sur la plage. Nous avions tous évidemment accepté. Nous savions pertinemment que la fin du lycée marquait un tournant dans nos vies d'adolescents, et que désormais, les journées passées ensemble étaient comptées, alors nous comptions bien en profiter.

Alors, en ce début de soirée de fin mai, Lucas et moi étions sur la route de la plage dans sa voiture, avec le pique-nique, plusieurs couvertures et la guitare du brun dans le coffre. J'avais insisté pour qu'il l'amène, connaissant son talent pour la musique, et je l'avais supplié d'apprendre quelques morceaux pour que nous chantions tous ensemble. Il faisait encore chaud, dehors. Le soleil était sur le point de se coucher, mais la ville était encore agitée. L'euphorie du début des vacances d'été régnait dans l'air, et le soulagement était lisible sur les quelques visages des étudiants que nous croisions alors qu'ils se dirigeaient vers la fête annoncée comme phénoménale.

Je sentis la main de Lucas sur ma cuisse, et je lui adressai un sourire.

— Comment tu te sens ?

Je jetai un regard par la fenêtre et répondis honnêtement :

— Fatiguée. Mais c'est normal, d'après ce que dit le médecin.

L'accouchement se rapprochait considérablement. Il était prévu pour deux semaines plus tard, et j'étais à la fois impatiente et effrayée. Serais-je une bonne mère ? Que se passerait-il si j'étais incapable d'aimer mon enfant ? Comment allais-je m'y prendre.

Mais la pression qu'exerça Lucas sur ma cuisse me rappela que je n'étais pas toute seule, et qu'à deux, nous y arriverions. Nous étions prêts.

— Tout ira bien.

Et pour la première fois depuis des mois, je crus ces paroles. Tout irait bien.

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Lorsque nous arrivâmes à l'endroit où l'on s'était donné rendez-vous, nous vîmes Ethan s'acharner sur ce qui ressemblait à une tentative de feu de camp. Il gigotait dans tous les sens et jurait toutes les deux secondes, alors qu'Anna l'observait, les yeux brillants, une main dissimulant son sourire amusé.

Il semblait sur le point de devenir fou lorsque Lucas posa les affaires qu'il portait et se mit à genoux pour l'aider. Ethan sursauta lorsqu'il se rendit compte que nous étions arrivés et poussa un soupir de soulagement.

— Je n'en peux plus. Bonne chance.

Il se leva, essuya son front du revers de la main, et m'aida à déposer les couvertures par terre. Je saluai Anna d'un geste de la main et d'un sourire qu'elle me rendit, et regardai l'horizon. Ils avaient choisi un très bel endroit : la plage de ce côté-ci était déserte, le sable encore chaud, les vagues apaisantes et la forêt à l'arrière nous dissimulait des regards indiscrets. Le coucher de soleil était magnifique : les rayons se reflétaient sur la mer en une colonne brillante, le ciel était coloré de nuances de couleurs chaudes, et la brise passait dans mes cheveux délicatement et faisait onduler les branches des arbres avec douceur.

« Elle s'appelait Anna »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant