FIN ALTERNATIVE.

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En complétant le manuscrit que je vais envoyer aux éditeurs très prochainement, je me suis rendue compte que la fin ne me plaisait plus, et j'ai donc décidé d'écrire un autre épilogue. J'espère qu'il vous plaira, et n'hésitez surtout pas à me dire comment l'améliorer! bisous <3 

EPILOGUE.

Ethan.

Peut-être que si j'avais visé quelques centimètres à côté, j'aurais réussi. Peut-être aurais-je quitté ce monde pour de bon. Peut-être aurais-je brisé les vies de toutes les personnes autour de moi, peut-être aurais-je détruit l'avenir de Tom, d'Elena, ou de Lucas, ou même des trois. Tout aurait pu être différent. Tout aurait pu arriver.

Durant des mois et des mois entiers, je me suis haï d'avoir survécu. Je me suis senti lâche, faible, n'ayant même pas eu le courage qu'Anna avait eu de mettre fin à ces souffrances inutiles. J'ai passé des nuits et des nuits entières à hurler, à essayer d'extérioriser toute ma haine, ma peine. J'ai passé des jours à devoir supporter le regard empli de tristesse et de pitié de tous, à devoir subir les sanglots de mes parents, alors qu'eux-mêmes ne connaissaient pas la véritable douleur. Je les ai tous haïs. Je les ai détestés avec tant de force que j'ai cru crever.

Je ne vivais que pour une chose : mourir. Je souhaitais tant que ces souffrances intolérables cessent, que tout s'arrête, que me tuer était devenu une obsession. Les médecins refusaient que je sois en contact avec quoi que ce soit qui puisse être considéré comme dangereux. Ils ne se rendaient pas compte que le seul danger qui existait était dans ma tête.

Ils sont tous venus. Les psys, les médecins, ma famille, mes amis. Tour à tour, ils m'ont parlé. Ils m'ont dit qu'il y avait d'autres solutions, que je ne pouvais pas faire ça, que je devais reprendre goût à la vie. Ils ne comprenaient pas. Ils n'auraient jamais compris.

La seule personne qui ne m'inspirait pas une haine incontrôlable était Tom. Malgré son très jeune âge, il semblait parfaitement comprendre ce qui se passait. Pourtant, il ne me parlait pas comme les autres. Pendant des jours, il ne m'a même pas décoché un mot. Et moi non plus. Il se contentait de me regarder avec ses grands yeux durant de longues minutes. Et je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas comment, mais ce simple contact m'apaisait un peu, pendant un infime instant.

De longs, très longs jours passèrent, avant que le déclic n'ait lieu. Les séquelles de ma tentative de suicide n'arrangeaient rien. Je me haïssais encore plus. Mais bientôt, les visites de mon frère durèrent un peu plus longtemps et il commença à me parler. Il ne me racontait rien de très épatant, il se contentait de me parler de son quotidien à l'école, de ses amis, ses cours. Il n'évoquait jamais ce qui s'était passé. Et c'est peut-être pour cela, que je le supportais. Parce qu'il savait comment s'y prendre, quand personne d'autre ne le comprenait.

Au fil des jours, j'appris à l'écouter attentivement, et même à apprécier ce qu'il me disait. Le temps passa, et il grandissait, plus vite que je ne l'aurais voulu. Il ne se fatiguait jamais ; sans cesse, il me racontait ses journées, sans rien demander en retour. J'appris à lui sourire, à rire avec lui. Et puis, un jour, je lui ai parlé, moi aussi. Aussitôt, j'ai vu la surprise dans ses yeux, mais j'ai continué. Au début, je parlais de choses insignifiantes, comme le temps, ou bien mes séquelles à la tête qui me faisaient mal. Je pris bientôt sa place de conteur, et il m'écoutait, sans jamais intervenir. Et bientôt, je ne pus m'arrêter. Je parlais de choses idiotes, mais j'en avais terriblement besoin.

Alors, un psychologue prit la place de mon frère, et, malgré mes réticences, je ne pus m'empêcher de tout raconter. J'ai vomi, j'ai pleuré, j'ai sangloté, j'ai chuchoté. J'ai tout raconté, absolument tout. Et bientôt, mon frère vint plus souvent me voir, me faisant rire, oublier mes démons. Alors, je me mis à travailler encore plus dur pour marcher à nouveau, pour écrire à nouveau. J'avais besoin de quelque chose à quoi me raccrocher. Parfois, c'étaient des choses futiles, et qui, pourtant m'étaient nécessaires.

Chaque matin, je me levais avec l'objectif de marcher un peu plus longtemps que la veille, avec un peu moins d'aide. Ce fut lorsque je vis ma mère arriver avec un sourire que l'évidence s'offrit à moi : j'allais mieux. Je passais des jours et des jours ainsi, avec un peu plus de progrès à chaque fois. Autour de moi, je voyais les visages s'éclairer doucement. Et moi, je me sentais un peu plus libre, même si parfois, la douleur revenait sans prévenir.

Un jour, Elena vint me voir à l'hôpital. Je ne l'avais pas vue depuis très longtemps, depuis mes premiers jours à l'hôpital. J'avais refusé de la voir, comme les autres. Lorsqu'elle entra dans la chambre, je vis son petit ventre d'ancienne femme enceinte, et ses grands yeux cerclés de mauve.

Elle me prit dans ses bras en faisant attention à ne pas me faire mal et s'assit à côté de moi, en souriant, même si ses yeux reflétaient sa tristesse.

— Comment vas-tu ?

Je lâchai un petit rire résigné, parce que cette question m'avait été posée tant de fois que j'en avais perdu le compte. Je haussai les épaules et répondit :

— Pas bien, c'est une évidence. Je sais même pas si je pourrais dire un jour que je me sens heureux.

Elle baissa ses jolis yeux et se mordit la lèvre. Je tendis alors la main vers la sienne et entrelaçai mes doigts aux siens.

— Mais je vais mieux. Je vais mieux qu'hier, et demain, j'irai mieux qu'aujourd'hui.

Je pris une profonde inspiration et la regardai dans les yeux.

— J'ai enfin compris ce que... ce qu'elle ne savait pas. C'est que... il y a une solution. Il y en a toujours une.

Et la mienne avait été Tom. Elle avait toujours été Tom.

Elena éclata en sanglots et me prit dans ses bras. Je respirai avec apaisement son parfum qui m'avait tant manqué. Je me rendis compte alors que si Anna m'avait quitté, Tom, Lucas, Elena, mes parents, et les autres, ne l'avaient jamais fait. Je n'avais jamais été seul. Et ne l'aurai jamais été.

Nous restâmes un bon bout de temps ainsi, enlacés, pensant à ce qui aurait pu arriver. Nous fûmes alors coupés dans notre étreinte par Lucas qui entra, tenant dans ses bras une jolie petite fille d'à peine un an, avec de grands yeux bleu électrique – ceux de sa mère -, et une touffe brune bouclée.

— Regardez qui vient voir Ethan !

Je souris, et en croisant ses grands yeux bleus, je ressentis immédiatement une impression de chaleur se répandre dans ma poitrine. Elle était adorable. Quant à Lucas, lui aussi avait l'air épuisé, mais soulagé. Il me sourit franchement tandis qu'il me tendait la petit, et je lui rendis son sourire. J'aurais pu rater cela, aussi. J'aurais pu rater tant de choses.

Je pris la petite dans mes bras, et déposai un bisou sur sa petite tête joufflue. Elle laissa un petit rire s'échapper de sa bouche et tendit la main vers mes cheveux comme pour les attraper.

— Elle est tellement mignonne, lançai-je en souriant. Je suis persuadé que vous êtes d'incroyables parents.

Je les regardais, mes deux meilleurs amis, depuis toujours et à jamais, je les regardais, et je n'ai rien regretté. Comment avais-je pu un instant croire qu'ils s'en seraient sortis sans moi ? Comment avais-je cru pendant un instant que cela valait le peine de passer à côté de tous ces moments qui me faisaient aller un peu mieux chaque jour ?

Je me retournai vers la petite fille qui suçait son pouce en me regardant de ses magnifiques yeux.

–- Coucou toi. Je suis ton tonton, Ethan.

Elle rigola, un petit son aigu qui me remplit de joie. Je me tournais vers ses parents et demandai :

–- Comment s'appelle-t-elle ?

Elena plongea son regard pénétrant dans le mien, et dit, sans me lâcher des yeux :

— Anna. Elle s'appelle Anna.

FIN. 

« Elle s'appelait Anna »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant