Lorsque je m'étirai au sortir du réveil le lendemain, mon poing tendu rencontra une masse chaude qui grogna suite au coup porté. Surpris, mon esprit embrumé mit un temps à définir cette personne comme étant Alec. Mes neurones firent leur travail et je m'interrogeai :
— Il est si tôt que ça pour que tu sois encore au lit ?
L'Alpha me grogna de le laisser dormir et la ressemblance avec les réveils difficiles de Kyle me fit sourire.
— Allez grand méchant loup, réveille-toi.
— Mmmmh...gémit-il, laisse-moi tranquille...j'ai pris ma journée.
— Ah oui ? Et en quel honneur ?
Si j'étais surpris de le trouver encore couché à mon réveil, le fait qu'il ait pris un jour de congé me stupéfia. Alec était travailleur, souvent trop, d'ailleurs, aussi cela m'intrigua.
Alors que je taquinai son oreille du bout du nez, il m'attrapa et me tira jusqu'à lui, m'arrachant un petit cri surpris. Comme le fils, le père était du genre câlin au réveil, semblait-il.
— Je n'ai aucune affaire importante en cours, la meute va bien et tu es de retour. De plus, je suis fatigué alors je me suis dit qu'un jour pour moi ne me ferait pas de mal.
Je restai coi un instant.
— Et tu comptes faire quoi ?
— Je n'ai rien prévu encore. Tu aurais envie de faire quelque chose, toi ?
— Tu veux passer ton de jour de repos avec moi ? Je pensais que tu voulais prendre du temps pour toi.
Alec soupira comme si j'avais dit la dernière des bêtises.
— Je t'incluais dedans. Alors que nous avons la possibilité de passer des moments ensemble, je ne vais pas m'en priver et m'isoler comme un vieux loup grincheux.
— Oh, fis-je bêtement. Eh bien...je ne sais pas. Je n'ai jamais vraiment profité de la ville. Tu pourrais peut-être me montrer quelques coins que tu affectionnes ?
— Ça me semble être une bonne idée, conclut l'Alpha, et je pouvais entendre le sourire dans sa voix.
Une fois apprêtés, nous prîmes la direction du centre-ville. Le premier lieu où Alec m'emmenait était un café où il aimait prendre ses repas, quels qu'ils soient. L'heure matinale était trop avancée pour prendre un petit-déjeuner mais pas assez pour déjeuner. D'un commun accord, nous commandâmes donc un brunch copieux, à base d'oeufs, de bacon, de toasts frits, de confiture, et toutes sortes de réjouissances. Le cadre était chaleureux, décoré avec élégance mais sobriété. La nourriture était délicieuse et la compagnie agréable.
Je réalisai alors que j' avais uniquement côtoyé Alec dans le domaine Markham, donc dans un cadre lupin. Je savais quel loup, Alpha et père de famille il était, pour autant je découvrais maintenant l'homme qui se cachait derrière ces multiples casquettes. En dehors de ce qu'on pourrait appeler ses fonctions, il se montra plus détendu, plus libre. Je l'avais toujours connu avec le mot pour rire, mais là ses blagues étaient moins sérieuses, plus enfantines. Je savais aussi que ma nature d'Oméga avait un effet positif sur son humeur et son bonheur contribua au mien.
Lors de notre visite au musée de la ville une fois notre repas terminé, Alec me fit rire à gorge déployée, parfois trop fort si j'en croyais l'oeil courroucé d'un des gardiens, avec ses anecdotes incongrues. La culture du loup m'impressionna, il semblait presque avoir un lien intime avec bon nombre d'artistes. Car au delà de ses histoires amusantes, il était à même de retracer leur histoire et de nourrir un exposé sur ces hommes et femmes créateurs.
J'étais pendu à ses lèvres et buvais ses mots comme une vérité absolue, ce qu'ils étaient sûrement.
Une fois de retour dans la ville, Alec prit le temps de m'expliquer les différentes architectures que nous pouvions observer, retraçait l'histoire de la ville. Il s'exprimait avec passion et entrain, sûrement content d'avoir un public attentif en ma personne.
L'après-midi passa à une vitesse folle et nous fûmes accueillis par l'air plein de réprimandes d'Adele. La Lupa nous toisa du haut du seuil de la porte, alors que nous étions toujours au bas des marches du perron.
— Non mais vous avez vu l'heure ? J'ai essayé d'appeler chacun de vous plusieurs fois, sans réponse.
Mains sur les hanches, la louve n'avait pas l'air contente. Alec prit la parole, l'air penaud.
— Désolé, soeurette. On a pas vu l'heure passer, tenta-t-il.
— Mouais, marmonna-t-elle, ça ira pour cette fois. Mais si je me tue pour qu'on passe du temps tous ensemble et que l'Alpha nous fait faux bond, bonjour l'exemple.
— On fera attention la prochaine fois, promis, intervins-je.
— J'espère bien ! Allez, entrez. On vous attendait pour dîner.
Jenna nous fit l'honneur de sa présence à notre table ce soir-là et je pris encore une fois plaisir à sa compagnie. La soirée se termina dans le salon de musique, pour le plus grand bonheur de tous. Une fois encore, la Cheffe de la sécurité et moi échangeâmes nos avis musicaux à grands renforts de démonstrations, le tout sous le regard amusé de nos spectateurs. Seul Alec semblait pensif, comme ailleurs.
Une fois notre invité partie, les jumeaux cloîtrés dans leurs chambres respectives et Adele occupée à je ne sais quoi, je le vis soupirer. Je m'approchai de lui et m'assis à ses côtés.
— Ça va ? demandai-je, inquiet.
— Oui, oui. J'étais juste...pensif.
— Et tu pensais à quoi ?
Alec ne répondit pas, les yeux dans le vague. Au bout d'un moment, il finit par demander :
— Pourquoi tu ne chantes plus, Corwyn ?
Je me dandinai sur place, mal à l'aise. Je n'aimais ni ressasser le passé ni parler de moi. Pour lui, je fis néanmoins l'effort.
— Ma mère chantait beaucoup. Tout le temps, en fait. Dès qu'elle faisait quelque chose de ses mains, elle chantonnait un quelconque air. Elle avait une voix magnifique et je pouvais rester des heures à l'écouter. Elle chantait énormément pour moi, aussi. Depuis tout petit. Elle me racontait que c'était la seule chose qui calmait mes pleurs, quand j'étais bébé, racontai-je en souriant au souvenir de ma mère.
» Comme tu le sais, j'ai fait beaucoup de musique. Du piano et du chant depuis ma plus tendre enfance, et quelques autres instruments au gré de ma curiosité et au fil des ans. Mais elle nous quitta un jour d'automne, il y a de ça quelques années tuée par une escouade de White Hats, crachai-je, amer. Depuis, je n'ai plus réussi à chanter. Je...n'y arrive plus.
— Oh, fit simplement Alec. Je suis désolé...
— Moi aussi, vraiment...
La discussion vira ensuite sur des sujets moins pesants. Je sentais néanmoins le poids de la journée et de mes souvenirs sur mes épaules, aussi partis-je me coucher. Le sommeil fut pourtant dur à trouver.
Une masse se glissant derrière moi me réveilla et mon coeur paniqua sous le coup de la panique.
— Chut, ce n'est que moi petit loup, murmura Alec.
Je me détendis d'un coup alors qu'il passait ses bras autour de moi.
— Qu'est-ce que tu fais là ? demandai-je d'une voix embrumée par le sommeil.
— J'ai senti ta tristesse hier et elle ne t'a pas quitté de la nuit. Moi, je n'arrivais pas à dormir, je n'arrêtais pas de gigoter dans tous les sens. Je me suis dit que venir ici nous ferait du bien à tous les deux.
— Hm hm, réussis-je à répondre.
Un rire léger fit se soulever la poitrine de l'Alpha et je sentis ensuite son souffle chaud contre mon oreille.
— Dors, chuchota-t-il, je veille sur toi.
Je m'empressai d'obéir et replongeai dans le sommeil, apaisé cette fois-ci.
VOUS LISEZ
Silver Lake
FantasíaCorwyn Alucard fuit depuis maintenant trois longues années les vampires à ses trousses. En arrivant à Silver Lake, il ne pensait pas que les évènements prendraient cette tournure. Maintenant, il est presque prisonnier de cette ville et de sa meute d...