Silver Lake

Chapitre 15

Je repris connaissance installé dans mon lit. Par habitude, je fis le point sur l'état de mon corps. Tout fonctionnait convenablement. Je balançai mes pieds hors du lit et me levai.

Une fois habillé, je me rendis directement à la chambre d'Alec. Après avoir toqué, j'entrai. Adele veillait à son chevet. L'Alpha était endormi et semblait paisible. Je m'approchai du lit et demandai à la Lupa combien de temps j'étais resté dans les limbes de l'inconscience.

— Une demi-journée. Alec s'est endormi juste après que tu te sois évanoui.

Je hochai la tête et m'intéressai de plus prêt au revenant. Ses signaux vitaux étaient bon, son corps récupérait. Je préconisai du repos néanmoins.

Libéré de la menace des pisteurs qui plannait au dessus de ma tête, j'appelai ensuite Daniel, un des hommes de main de mon père. Celui-ci répondit à la première sonnerie et fut plus que soulagé d'avoir de mes nouvelles. Ma famille aussi m'avait cherché mais comme les pisteurs, ils avaient fait chou blanc.

En quelques minutes, j'avais un billet à destination de Paris, ce soir. Ma décision était brusque mais nécessaire, pour plusieurs raisons. Premièrement, je devais me rendre à Venise pour officialiser mon entrée au Conseil et mon ascension au titre de Lord. Ensuite, lors de la résurrection d'Alec, quelque chose s'était brisé en moi. Tout me parvenait comme étouffé. La joie, la tristesse. La douleur, la fatigue aussi. Tout passait à travers une espèce de filtre qui altérait mes perceptions. Je ne ressentais quasiment rien. Le lien de meute était quasi imperceptible et je savais que la distance et l'éloignement volontaire, mais nécessaire, le briseraient bientôt. Mon choix de les quitter, de les abandonner, presque, me provoquait à peine un pincement au coeur. Je ne ressentais plus rien.

Après des au revoir courts et impersonnels, je quittai la demeure Markham pour me mettre en route pour l'aéroport. J'aurais un peu d'avance mais qu'importe.

Une fois à la gare aérienne, je m'occupai des procédures nécessaires pour pouvoir embarquer. Je ne fis attention ni à l'architecture, ni aux personnes s'occupant de moi. Rien n'avait d'importance. J'étais néanmoins vigilant et repérais chaque issu, chaque agent de sécurité. Tout. Mais le reste me passait dessus sans s'arrêter.

Une fois dans l'avion, je m'octroyai un peu de repos. Je trouvai le sommeil sans problème avec l'impression de fonctionner comme un automate.

Daniel vint me récupérer à l'aéroport et je pus lire le soulagement dans ses yeux verts. Comme à son habitude, le vampire fut efficace et me briefa sur ce qui s'était passé pendant mon absence. Il nous mena jusqu'à l'immeuble particulier de ma famille, le mien désormais, avenue George V. Nous possédions des résidences un peu partout dans la ville mais celle-ci restait la principale.

Sitôt arrivés, je contactai Lord Médicis. C'était le Maître du Conseil et le seul habilité à octroyer un siège. L'échange fut court, fonctionnel. Il fut convenu de nous retrouver avant l'ouverture officielle du Conseil que le Maître ferait sonner.

Je m'occupai ensuite de planifier mon voyage jusqu'à Venise, laissant l'aspect de la sécurité à Daniel qui saurait quoi faire.

Après avoir fini toutes les tâches que j'avais à faire, je me posai dans un petit salon chaleureux dans lequel mon père et moi avions pour habitude de partager des parties d'échec. Un verre de whisky à la main, je faisais tournoyer le liquide ambré, perdu dans mes pensées. Le feu avait été allumé dans l'âtre suite à ma demande, pour autant je me sentais toujours aussi froid à l'intérieur. Ici comme chez les loups, je ne me sentais pas à ma place. Cependant, j'avais des responsabilités vis-à-vis des miens et il m'était cette fois-ci impossible de me défiler.