Chapitre 23

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Notre séjour à New York se prolongea d'un autre jour, temps utilisé pour explorer le sud de la ville. Nous fîmes chou blanc et dûmes nous contenter de nos éléments déjà acquis. Un avion plus tard, nous étions dans le Montana et en direction de Silver Lake.

— Tu sais déjà où tu vas dormir ? demandai-je à mon second.

— J'ai pris une chambre à l'hôtel, répondit-il en français.

— Parle en anglais, le rabrouai-je. Par égard pour Jenna.

Daniel lui jeta un regard penaud avant de s'excuser.

— Pardon, je n'ai pas l'habitude. Je ne voulais pas être grossier.

— Vous êtes tout pardonné !

Je levai les yeux au ciel en soupirant. Le filou savait faire fonctionner son charme.

— Sommes-nous encore loin ? questionna celui-ci.

— Encore une heure, si tout va bien, lui répondit la louve.


Nous arrivâmes à l'heure prédite par Jenna. Alec nous attendait sur le pas de la porte, adossé au chambranle. Lorsque nous descendîmes de la voiture, ses lèvres s'incurvèrent en un sourire que je lui rendis. Une fois nos bagages sortis du coffre, je me dirigeai vers lui et l'embrassai sur la joue. Il m'enserra dans une courte étreinte après m'avoir rendu mon baiser et en fit de même avec sa Cheffe de la sécurité. Il se tourna ensuite vers Daniel et lui offrit une poignée de mains sèche. Les yeux de mon second étaient froids et l'ambiance n'était pas des plus accueillantes.

L'arrivée d'Adele allégea l'atmosphère. Ses effusions auraient pu laisser penser que nous étions partis depuis des mois alors que nous avions été absents seulement quelques jours. La Lupa fut bien plus chaleureuse que l'Alpha avec Daniel et elle l'entraîna rapidement à sa suite, l'éloignant ainsi d'un Alec visiblement ronchon.


Une fois seuls dehors, je m'approchai d'Alec et posai la main sur son bras. Il se détendit à mon simple contact mais je voyais à son froncement de sourcils que quelque chose le chiffonnait.

— Qu'est-ce qu'il y a ?

— Je ne suis pas à l'aise avec lui.

— Ça ne m'étonne pas, répondis-je. Daniel est très protecteur avec moi. Tout comme toi. L'un comme l'autre vous devez sentir ces vibrations. Vous êtes tous deux très dominants alors ça doit créer de sacrées frictions.

— Mais c'est un vampire, comment veux-tu qu'il y ait une joute de dominance ?

Je soupirai lourdement avant de le lui lancer un regard qui en disait long.

— Vous êtes avant tout deux hommes. Peu importe l'espèce, deux mâles dans votre situation, ça crée des étincelles.

Alec se contenta d'un grognement puis rentra dans la maison. Je lui emboitai le pas et vis qu'Adele s'occupait d'accueillir comme il se devait notre invité. A savoir en le nourrissant. On ne changerait jamais cette louve. Daniel me jeta un regard paniqué mais seul mon rire lui répondit alors que je le laissais aux griffes de la Lupa.

Une fois mes affaires déposées et mon compte-rendu sur notre expédition à New York fait à Alec, je retournai à la cuisine. J'y trouvais un Daniel affolé, un plat vide dans les bras. Il se précipita sur moi.

— Elle m'a demandé de le ranger mais je n'ai absolument aucune idée d'où il va, m'apostropha-t-il en français.

Je le délestai du récipient et le rangeai à sa place, en haut d'un placard. Daniel se laissa tomber sur une chaise en soupirant. Il n'avait jamais été doué avec les femmes. Paradoxalement, c'était un grand séducteur mais une fois la parade amoureuse terminée, il perdait tous ses moyens. Par dépit et par facilité, il se repliait sur la gent masculine.

Mon sourire narquois ne passa pas inaperçu et mon second me foudroya du regard. Je levai les mains en signe de reddition et me postai derrière lui pour lui masser les épaules.

— Tu sais où Adele est partie ? questionnai-je.

— Aucune idée. Elle a simplement dit qu'elle revenait.

Alec choisit ce moment pour faire irruption dans la cuisine. Dès qu'il aperçut ma proximité avec Daniel, ses épaules se crispèrent et ses lèvres se pincèrent. Du regard, je le défiai de protester. Le message passa puisqu'il s'assit calmement à l'autre bout de la table, même si son regard était toujours foudroyant.


Le retour d'Adele puis l'arrivée des jumeaux apaisa l'atmosphère. Le plan de table avait été un casse-tête pour parvenir à placer le loup et le vampire de façon convenable. Nous y étions parvenu et le repas se passa sans encombre. C'est lors du café pris dans le salon que les choses dérapèrent. Les deux hommes s'étaient installés face à face et se fusillaient du regard depuis un bon moment. J'avais beau déployer mon aura d'Oméga pour essayer de calmer les choses, Alec y restait résolument insensible et Daniel ignorait royalement mes signaux. Leur ton était agressif et les mots échangés étaient secs. Comme toujours dans ces jeux de coq, cela alla trop loin.

— Ainsi c'est en votre compagnie qu'était Corwyn ces derniers mois, attaqua Daniel.

— En effet. Ce sont mes loups et moi qui l'avons aidé à se débarrasser de ses poursuivants, lui permettant ainsi de prétendre à son titre de Lord, se targua Alec.

— J'imagine que je devrais vous remercier pour avoir veillé sur lui, alors.


— Sûrement, oui.

— Etrangement, il me semble que vous avez failli à votre tâche. Je garde en mémoire certains évènements impliquant un vampire et une relation non-consentie...

Le coup était bas. Douloureux, blessant. Je fixai Daniel, les yeux probablement écarquillés. Les deux mâles, bien trop occupés à se faire la guerre, ne remarquèrent pas mon état. Ce fut Adele qui se manifesta :

— Assez ! cria-t-elle. Vos enfantillages n'ont que trop duré. Vous êtes tous deux trop aveugles pour voir que vous blessez la personne même que vous souhaitez protéger. Aussi messieurs, et tant que vous ne serez pas calmés et à même de penser froidement, je vous demanderais de sortir de ma maison.

Alec se retourna vivement vers sa soeur, la bouche ouverte de façon ridicule.

— Mais..., commença-t-il.

— Dehors ! hurla la Lupa.

Les deux hommes détalèrent sans demander leur reste. La louve exhalait une telle aura de fureur que bien fou aurait été celui qui s'y serait frotté. Cependant toute sa colère redescendit alors qu'elle me prit dans mes bras. Elle essuya les larmes qui dévalaient mes joues tandis que les souvenirs refoulés apparaissaient en flash dans mon esprit et que le sentiment d'avoir été blessé par les miens me laissait un arrière-goût amer.

Elle me berça un temps, et me libéra une fois mes esprits retrouvés. Je n'étais plus en état de choc, j'étais seulement en colère. Très en colère. Autant envers l'un que l'autre. D'un pas décidé, je me dirigeai vers le devant de la maison. Le loup et le vampire étaient au pied des marches du perron. Lorsqu'il me vit sortir, Alec amorça un mouvement vers moi que j'arrêtai d'un mouvement de main.

— Non. Vous m'avez tous les deux blessé. Taisez vos désaccords ou réglez-les une bonne fois pour toutes. Tant que ce ne sera pas fait, je ne vous verrai, ni l'un, ni l'autre.

Sur ces mots je m'en retournai. Alec ne partagea pas ma couche cette nuit là. 

Silver LakeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant