les bons mûrissent, les mauvais pourissent

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     Papa doit être en cuisine depuis plus de deux heures déjà quand je jette le journal de ma sœur sur mon lit. Je pince les lèvres en restant perplexe à tous ses écrits.
     Elle prétend avoir demandé à ce que je sois protégée de lui mais en réalité, je devais être protégée d'elle.
     Katerina m'a fait tant de mal en nous trahissant.
     Je passe une brosse dans mes cheveux, démêlant tous ces noeuds. J'ai le temps d'enfiler un pull en laine que quelqu'un sonne à la porte. Mes parents ayant invités les Bolton et ces derniers étant arrivés depuis quelques minutes déjà, je suppose que Bruce doit être derrière cette porte.
     Ma mère m'incite à ouvrir la porte, comme si elle tentait d'arranger un coup avec Wayne et moi.
     Ses yeux noirs sont la première chose à laquelle j'ai pensé toute la journée. Il ne sourit pas quand j'ouvre la porte mais sa présence chez moi ne doit sûrement pas le déranger, sinon, il ne serait pas venu et aurait été faire la fête avec trois ou quatre filles. Cinq, peut-être.
     Il me tend des fleurs, des roses rouges. Ma sœur trouvait sa poétique, ces fleurs étaient pour elle d'une preuve d'amour. Je les trouve cliché, tout ce que je déteste et loin d'être poétique. Je n'aime pas les roses parce qu'elles représentent l'amour. Elles représentent ce que Jérôme était pour Katerina.
Il remarque que je les prends avec réticence, un sourire forcé malgré moi. Rien de bien joyeux, tout comme son visage qui n'a pas l'air d'avoir envie de refléter la moindre gaité.
- Je déteste les roses, dis-je.
Je le fais entrer et lui fais signe de me suivre jusque dans le salon où se trouve ma mère et les Bolton. Je lui tends les roses rouges.
- Regarde qui a eu la bonne idée de t'offrir un bouquet de fleurs, dis-je à ma mère.
- Elles sont magnifiques, merci beaucoup, monsieur Wayne.
- Appelez-moi Bruce, je vous en prie.
Le fait de jouer le séducteur et le gentleman ne m'étonne pas, il a toujours été représenté comme cela depuis que ses parents sont morts. Son air froid et détaché est mis en avant par un costume entièrement noir.
Il m'énerve à vrai dire, je le trouvais sympathique au début, à présent, il me tape sur le système. Parce qu'il s'en fout d'être seul, que ses parents soient morts, comme si cela est lui faisait rien. Ma sœur est morte et moi cela me fait mal à en crever. Comment fait-il ? Quel est son secret pour rester aussi imperméable aux émotions ?
Quand je croise les bras, il lève les yeux vers moi sans prendre néanmoins la peine de sourire.
Mon père et mes frères rejoignent le salon quelques minutes plus tard. Maintenant c'est ma vie, faire comme si rien ne s'était jamais produit, comme si Katerina n'avait jamais existé.
Bruce se montre très charmant envers toutes les personnes dans cette pièce, il se les met dans sa poche mais moi il ne me trompera pas, je n'ai plus envie d'être amie avec lui. J'en ai assez, il m'énerve. Alex non plus ne semble pas marcher.
La plupart du temps lors du dîner, je le dévisage discrètement. Sourcils quasi froncés, comme cela au naturel, mâchoire contractée la quasi totalité du temps, sourire espiègle lorsque mon père raconte une vieille anecdote. Alex non plus ne paraît pas dupe à la personne qu'est Wayne, il reste focalisé sur on dîner en jouant avec un champignon, écoutant la moindre de ses paroles.
Il parle affaires avec mon père et monsieur Bolton. Il est assez intelligent pour parler affaires mais il n'est pas assez expérimenté pour comprendre tout, ce qui n'a rien d'étonnant. Mes frères se mêlent avec joie à la conversation tandis que ma mère parle décoration avec madame Bolton. Seulement Alex et moi restons silencieux.
Mon frère se trouve dans ma diagonale, juste à côté de Bruce Wayne, qui est assit en face de moi. Ma mère l'a fait exprès de le placer ici.
J'ai une petite idée de ce qu'elle espère.
La conversation dérive sur Batman, je ne sais comment d'ailleurs et je ressens une grande envie de fuir cette table. S'ils savaient que je l'ai rencontré, ils n'en reviendraient pas. J'esquisse un sourire en coin quelques secondes lorsque Bruce me dévisage au même moment.
Je ne préfère même pas savoir ce qu'il peut bien penser de ce sourire.
- Cet homme prend tous les risques du monde pour nous protéger et des gens veulent le punir. Je ne comprends pas, dit monsieur Bolton.
- Ce n'est pas parce qu'un type porte un masque et un costume qu'il peut se permettre de se proclamer sauveur de cette ville, ricane l'un de mes frères.
- Il faut laisser place à la justice, nous avons des lois pour cela.
Des lois ? Mais quelles lois ? La moitié des personnes de cette ville ont peur de se faire attaquer en plein milieu de la journée parce que tous les flics de cette ville laissent le crime s'enraciner. Il n'y a pas de lois, il n'y en a plus. Et s'ils croient que Batman ne devrait pas exister, alors ils se trompent.
N'est-ce pas lui qui a essayé de d'emprisonner Jérôme ?
- Il devrait être derrière les barreaux. Franchement, quel est ce fou furieux qui se cache avec un masque ? S'il assumait sa responsabilité dans tous ses actes, il enlèverait son masque, ricane Bruce.
Je tourne mon regard noir droit sur lui. Comment peut-il critiquer une personne comme Batman alors qu'il reste cloitré la moitié du temps chez lui ?
- Tu te permets de critiquer une personne qui porte un masque mais toi, qu'est-ce que tu fais de tes journées ? ricané-je.
Il arque un sourcil.
- Quoi ? Tu ne réponds pas ? A part sauter tout ce qui bouge, tu fais quoi de tes journées ? Réponds !
- Zafrina ! s'offusque ma mère.
Je n'ai pas tord et tout le monde le sait, mais personne ne dit rien. Quelqu'un se racle la gorge, monsieur Bolton reprend la parole.
- En tout cas, il n'a pas sauvé Katerina.
- Effectivement, il ne l'a pas fait, soupire ma mère.
À cet instant, la réaction de mon frère se fait immédiate. Il se fige et arrête de jouer avec son champignon. Même Bruce qui n'a pas réagi à mes paroles remarque la réaction de mon frère. Qui ne pourrait pas le voir ? Je peux voir la colère dans l'expression de son visage, je peux voir la tristesse creuser ses joues, la peine de l'avoir perdue.
- Elle ne méritait pas d'être sauvée. Elle est mieux morte que vivante.
Personne ne dit rien. Cela fait bien longtemps qu'il n'a pas prononcé son prénom, il aimerait tellement l'effacer de sa mémoire.
- Cette fille était égoïste, pathétique. Elle ne méritait pas la vie.
- Katerina. Elle s'appelait Katerina et c'était notre sœur, craché-je. Tu te souviens ?
Alex secoue la tête parce qu'en dépit de ce que je lui dis, il ne voudra jamais assumer le fait qu'elle était de notre famille.
- Comment est-ce que tu peux te montrer aussi cruel envers elle ?
- Et toi comment peux-tu être aussi aveugle par ce qu'elle était devenue ?
- T'es tellement aveuglé par la haine que tu portes envers Jérôme que tu mets notre sœur dans le même panier !
Alex se lève brutalement en tapant sur la table du plat de ses mains. Nous sursautons pour la plupart, sauf Wayne. À croire que rien ne lui fait peur. Mon frère est tellement en colère contre moi qu'il ne cache rien. C'est con de se montrer en spectacle devant des invités.
- Comment oses-tu prononcer son prénom dans cette maison ? Comment peux-tu encore considérer Katerina comme innocente ? Comment peux-tu te montrer aussi aveugle et stupide ? Notre sœur était une salope manipulatrice, égoïste ! Elle aimait tellement sa petite personne et ce fils de pute qu'elle n'aurait pas hésité à te tuer de ses propres mains !
Non, il se trompe. Il a faux sur toute la ligne. Alex me lance le pire des regards.
- Tu lui ressembles tellement, peut-être pas physiquement mais t'es exactement la même qu'elle.
Tous ses mots crachés avec un venin qui m'empoisonne le cœur. Il quitte la table, et je le suis vivement hors de la salle à manger aussi grande qu'un terrain de foot. Seulement Wayne nous suit hors de table, histoire d'être arbitre dans notre combat oral.
- Pourquoi est-ce que tu la détestes ? Qu'est-ce qu'elle t'a fait pour que tu la détestes plus que n'importe qui ? C'est quoi ton problème ?
Son frère jumeau se retourne vivement, me dépassant d'une bonne tête. Tout le monde a toujours été grand dans notre famille, même ma mère. Sauf moi. Un mètre soixante quatre.
- Parce que tu ne connais pas la vérité à propos d'elle, tu ne sais pas ce qu'elle m'a fait, à moi, son propre frère !
- Alors dis-moi !
- Non. C'est mieux ainsi. Ne révélons pas les maux douloureux du passé quand ils sont terminés.
Il fait volte-face et monte les escaliers quand je continue à lui parler.
- Tu n'es qu'un lâche. Tu es incapable d'affronter la vérité et tu le sais !
- Je me fiche de ce que tu penses, répond-il.
J'aimerais lui hurler dessus, lui donner tous les coups que je réserve à un sac de boxe que je frappe trois fois par semaine mais j'en ai l'incapacité. J'aimerais lui lancer toutes les insultes du monde tout en ignorant que c'est mon frère, mais c'est impossible. Je serre les poings comme une folle au point d'en faire craquer mes jointures.
- Il est en colère, c'est normal.
Je fais volte-face vers Wayne.
- Toi, tu la fermes ! dis-je en le bousculant.
Malheureusement, Bruce ne bouge pas d'un pouce, figé comme une statue de pierre. Son expression fermée me donne envie de le frapper de toutes mes forces. Pourquoi reste-il ici ? Pourquoi ne part-il pas draguer d'autres filles ? Ne peut-il pas s'en aller et me laisser tranquille ? J'ai besoin d'être seule.
Il ne fait pas le moindre mouvement, sans grand étonnement de ma part.
- Qu'et-ce que j'ai fait pour mériter tant de haine ?
- Ce n'est pas de la haine, c'est de la colère. J'en ai marre de tout ça.
      Mes parents débarquent avec les autres invités alors je m'éclipse sans prendre la peine de dire au revoir parce que les au revoir peuvent se finir en adieux. Bruce continue de me regarder jusqu'à ce que je disparaisse de son champ de vision et quand j'entends la porte claquer, je suis soulagée.
     J'ai été une véritable garce ce soir mais pas autant que mon frère.
     Après une bonne douche, je m'allonge sur mon lit, le journal de ma sœur en mains. Je prends une grande inspiration avant de l'ouvrir.

psychotic loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant