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« nous avons tous une part sombre au fond de nous »

- note à moi-même

Je ne sais pas si tu vas lire ces pages, je ne t'y oblige pas.
J'étais allongée dans mon lit depuis deux jours déjà. Les médecins disaient que je ne devais pas quitter mon lit avant au moins deux semaines. J'étais frustrée à l'idée de rester à l'hôpital pendant tout ce temps. Je savais ce que j'avais fait pour mériter cela et malgré tout, je ne parvenais pas à regretter mon acte. Même encore aujourd'hui, à l'heure où je t'écris mes maux et ces mots, je ne parviens pas à regretter. C'est trop dur.
J'allais de chaîne en chaîne sans savoir trop quoi regarder à la télé. C'était d'un ennui mortel, j'attendais des informations, un événement qui aurai toi capter mon attention sans pour autant me faire penser à Jérôme.
Mais le destin était contre moi.
Je ne me souviens plus de la chaîne, CNN ou une autre. C'étaient les informations, les policiers étaient en état d'urgence, les journalistes aux aguets. Ils filmaient les policiers qui grouillaient autour d'un périmètre de sécurité, juste en face de leur propre station de police, non loin du cœur même de New York City. Les secours arrivaient de part et d'autre, affluant dans la zone de sécurité.
     Quelque chose de grave s'était produit, je ne savais pas encore que Jérôme était le responsable. Pas encore jusqu'à ce que les secondes suivantes ne soient brouillées. L'image de la télévision devenant noir comme le ciel en pleine nuit puis, nous avons entendu des petits grésillements.
     L'image est redevenue nette, le visage de Jérôme apparaissant à l'écran. Il souriait comme jamais, ayant ce truc collé au visage qui me flanquait la frousse. Il portait un képi, un uniforme de policier, sûrement volé au premier venu. Il y avait du sang sur son visage, des éclaboussures.
     Qu'avait-il fait ?
     C'est lui qui tenait la caméra, je ne sais toujours pas comment il a réussi à craquer l'antenne de la chaîne pour diffuser ces images, même encore aujourd'hui. Il n'inspirait aucune confiance, il ne l'a jamais fait depuis qu'il a tué la première fois.
     Il déplaçait la caméra dans toute la station de police, veillant parfaitement à montrer les corps. Il y en avait beaucoup, vingt-sept au total, il paraît.
     Jérôme avait pris d'assaut la station de police avec quelques complices qu'il a fini par tuer quant il en avait assez. Mon meilleur ami dont je ressentais des sentiments forts, venait de propager le chaos une fois de plus en montrant que rien ne pouvait le stopper.
     Je me souviens du sang, des marres de sang partout. Des corps, des corps et encore des corps. Il s'amusait à mettre la caméra près du visage des policiers, nous laissant apercevoir les moindres détails d'eux. Certains avaient un filait de sang qui coulait de leur bouche.
     Leurs yeux étaient vides. Un véritable de néant. On pouvait encore lire la peur dans leurs yeux. Aucun d'entre eux n'était préparé à cela.
     Pas à la terreur nommée Jérôme Valeska.
     Le Joker.
     Je n'étais pas non plus préparée au fait qu'il envahisse mon cœur et le retourne comme jamais, l'abimant de part et d'autre au début. Jusqu'à ce qu'il assume.
     Je te réserve cela pour d'autres pages Zafrina.
     Retournons aux yeux vides de ces morts. J'avais l'impression que c'était une nouvelle fois de ma faute parce que je l'avais énervé. La seule personne qu'il a laissé en vie sur son passage était moi. Il a tué tous les autres sans une hésitation.
     Pourquoi ? Je ne savais pas encore.
     Jérôme éclatait de rire sans arrêt, sans même se forcer. Il se moquait d'avoir pris la vie d'êtres humains, il se nourrissait de la mort des autres, de la souffrance des autres, du chaos. Tout cela lui faisait extrêmement plaisir.
Il avait fait le tour de la station de police en montrant chaque corps, comme si tout était amusant alors que non, au contraire.
Je me rappelle qu'il a soudainement braqué la caméra droit sur son visage. Il ne possédait plus son képi et son regard avait changé en quelque chose de dur, de froid. Les sourcils à demi-froncés, il nous regardait droit dans les yeux. C'était comme sa meilleure performance.
- J'ai un message tout plein de sagesse pour vous, a-t-il dit en bougeant la caméra et en même temps la tête.
Mais quelqu'un était en train de parler en arrière plan, la personne demandait à l'aide. Le visage de Jérôme s'était décomposé et il a sortit une arme de sa poche, avant de tirer sur l'homme qui appelait à l'aide.
Il a tiré sans la moindre pitié. Tu n'as pas vu ces images, Zafrina. Enfin, je suppose. Mais moi, je les ai vus et j'étais sous le choc, dans l'incompréhension totale. Comment pouvait-il faire cela ?
- Les bonnes manières n'existent plus, dit-il en rangeant son arme dans son étui, je suppose.
Nous étions tous en train de voir ce qu'il faisait. Les moindres détails, la moindre expression de son visage qui indiquait que bien pire allait venir.
- Vous êtes tous prisonniers.
Son visage était si près de l'objectif de la caméra. Ses yeux étaient fixés droit sur nous, comme s'il nous avait vus à travers l'écran, nous les centaines de milliers de téléspectateurs.
- Tout ce que vous appelez raison, ce n'est qu'une prison vous empêchant de voir que vous n'êtes qu'un tout petit rouage dans une absurde et géante machine.
Il avait l'air déterminé dans ses propos. Je parie même qu'il n'avait pas préparé de discours, qu'il improvisait.
Et soudainement, il avait approché la caméra vraiment très près de son visage en haussant la voix, comme s'il allait nous donner une bonne leçon.
- Debout ! a-t-il levé la voix. Pourquoi voulez-vous être des rouages ?
Il avait ajouté un rire cinglant comme il sait si bien le faire.
- Soyez libres comme moi, a-t-il continué de rigoler.
La caméra était toujours fixée sur son visage et son sourire s'était élargi encore plus.
- Mais rappelez-vous, souriez !
Il avait baissé la caméra en direction d'un policier mort, assis à même le sol et lui avait pincé la joue pour étirer ses lèvres en un sourire. Il a éclaté de rire en regardant le policier, mort.
Je ne sais pas trop ce que j'ai ressenti en cet instant. Du dégoût, de la peur, de la colère, de la tristesse. Je ne sais pas trop.
Jérôme a continué à s'amuser avec le visage du policier quelques secondes avant que nous ayons entendu des sirènes de police. Surpris, il avait posé la caméra au sol.
- Fin du show, a-t-il dit. Mais pas de panique, je reviens très vite. Très bientôt.
Je me souviens qu'il avait remis son képi sans jamais cesser de sourire.
- Mais accrochez-vous, car vous n'avez encore rien vu !
Tout cela accompagné d'un rire diabolique. J'étais trop choquée pour pouvoir bouger, je me souviens.
Tout cela dans le but de provoquer la terreur et la panique. Cela le fait tellement rire.
Maintenant tu sais ce qu'il a fait après ce que je lui ai dit. Quand la caméra s'est coupée, j'ai vomi illico presto. Voir tout ce sang m'avait dégoûtée, tous ces morts, cette boucherie.
Je ne supportais pas.

*

Bonne année à vous tous.

psychotic loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant