Chère Katerina,
Après la page 388 se finissant sur Jeremiah Valeska, tu n'as pas écrit la fin de ton histoire dans ton journal.
Alors laisse-moi te la raconter.
Toi qui rêvais du grand amour avec un grand A, tu n'as pas vraiment eu la chance de le vivre pour l'éternité.
C'était plutôt la mort avec un grand M.
Tu es partie avec lui, d'après ce que j'ai entendu, c'était le matin, il était très tôt. Mais Jérôme était très recherché par la police, il n'allait certainement pas sortir de la ville en vie.
La vie ou la mort.
Vous avez eu la mort, tous les deux, à mon plus grand regret.
Quand je me suis levée ce matin-là, le jour de ta mort, j'ai su que quelque chose de grave s'était produit. En me réveillant, je suis descendue dans le salon comme à mon habitude et il y avait tout le monde qui regardait la télévision. Papa, maman et nos frères.
Les journalistes disaient que Jérôme était encerclé. Les policiers, ces petits malins, avaient barré certaines rues avec des camions, puis bloqués la route quand Jérôme était prisonnier.
Mais je sentais que quelque chose n'allait pas, j'ai toujours su.
Le silence régnait dans le salon, si tu savais. Et les caméras filmaient toute la scène. Les policiers avaient les armes braqués sur Jérôme, ah mais ça, tu dois probablement le savoir puisque tu étais avec lui, dans cette voiture.
Tu savais qui il était mais tu l'as quand même suivi dans la mort.
Les flics n'ont pas hésité à le canarder quand il est sorti de la voiture, c'était trop tard pour lui, il avait déjà fait trop de mal dans ce monde. Je me souviens du soulagement des parents quand on l'a vu mourir sous nos yeux. C'était comme si tout se terminait mais, en fin de compte, tout n'était pas terminé. Parce que tu étais là, toi, ma grande-sœur.
Tout s'est passé très vite. T'es sortie de la voiture, sans la moindre hésitation, t'as tiré sur les policiers. T'avais une arme, j'en reviens toujours pas.
Alors eux aussi ont tiré sur toi. T'es morte avec lui.
Mais à mes yeux, t'étais morte depuis bien trop longtemps.
Le chagrin a coulé instantanément sur mon visage, tout comme le reste de notre famille. Une part de nous te détestait mais on ne pouvait pas ne pas laisser couler nos larmes. Tu as été assassinée sous nos yeux, à la télévision, cruellement.
T'es morte d'avoir trop aimé.
T'es morte d'amour. Il était ton médicament, ta drogue, ton calmant. T'es morte pour lui alors que t'es même pas sure qu'il t'aimait sincèrement.
Je vais te faire des confidences, je vais tout écrire, j'aimerais tellement que tu puisses lire mes confessions.
Voilà deux ans que j'ai quitté New-York, à cause de toi, à cause de tout, à cause de cette vie que je déteste toujours autant. Je ne crois plus en la vie, je sais pas si j'y ai déjà cru un jour. Peut-être que si, dans le passé, à une certaine époque quand tout allait bien.
Il est loin ce monde où tout allait bien.
En l'aimant, tu ne t'es pas seulement condamnée, tu m'as emportée avec toi. Je suis morte, Katerina. Les émotions ont tout submergé en moi, comme un tsunami emportant des villes entières.
J'aimerais pouvoir dire adieu à la fille que j'étais autrefois, mais je n'ai pas réussi à tout oublier, je n'ai rien oublié. Je suis tellement brisée, si tu savais grande-sœur.
Et je déteste tellement que ça me fait mal au cœur.
Je te déteste par-dessus tout, au-delà des étoiles. Jamais je ne pourrais me remettre de toi, t'as marqué ma vie, tu l'as détruite. Je suis malade au point que je dois voir un psychologue qui me rabâche trente-six fois les mêmes choses.
❝ ça ira un jour, pas aujourd'hui ni demain mais un jour, ça ira ❞ dit le psy.
Alors ma réponse : lol. Non. Absolument pas.
Cette envie d'en finir n'en finit pas. Je me fais du mal pour me faire du bien, pour ne pas tomber plus que je suis déjà tombée.
Alex, ma seule et unique amie, doit me trouver pénible mais elle ne dit jamais rien. Elle contente de le sourire, elle est comme les rayons du soleil dans cette obscurité, bien que depuis qu'elle sort avec Alex, ton jumeau, notre frère, je la vois un peu moins.
Los Angeles est bien mieux que la ville où nous sommes nées.
Que dire de plus ? Sincèrement, j'aimerais retranscrire toute la haine que j'ai pour toi sur ce journal mais je me retiens, essayant de me concentrer sur le bon.
Qui a-t-il encore de bon dans ce monde ?
Les parents me paient un grand appartement ainsi que mes études dans le domaine du dessin. Ah et je m'apprête bientôt à publier mon premier livre manga format poche. Je ne sais pas combien de bouquins il y aura au total, mais les éditeurs ont apprécié l'histoire, la manière dont je dessinais et tout l'univers.
J'ai des tonnes de fans aussi, si tu savais. Ils ont trop hâte. Je crois qu'ils se comptent en plusieurs millions.
Les parents sont fiers bien qu'ils n'étaient pas enchantés au début.
Cependant, je ne parviens pas à être satisfaite de mon travail, j'arrive même pas à être heureuse de ce qui arrive. Alors, c'est sûr, je souris, je rigole et je fais semblant mais au fond, le cœur n'y est pas. Je me force et aux yeux des autres, la fille que je suis paraît tellement crédible.
J'ai tellement été détruite et j'ai laissé toutes mes émotions négatives prendre le dessus que j'ai perdu la capacité de ressentir des choses biens.
Mais surtout, la chose la plus importe, j'ai le cœur brisé.
Bruce...
Bruce me manque terriblement. Il est impossible que je puisse aimer quelqu'un d'autre que lui, certes, notre histoire était on ne peut plus courte, mais la dureté de ses paroles m'a montrée la brutalité de la réalité.
Tu lui avais dit de ne pas tomber amoureux de moi. Trop tard.
Trop triste, trop triste, tomber amoureux fait mal.
Trop triste, trop triste, la fin de la chute est presque mortelle.
Je n'ai pas eu de nouvelle de lui depuis que je suis partie, comme s'il ne s'était jamais soucié de moi. Il est tellement en colère contre la personne que j'étais il y a deux ans, je l'ai profondément déçu, plus que tout.
J'aimerais savoir s'il a oublié mon prénom, s'il reste quelque chose de moi dans ses souvenirs.
Trop triste, trop triste.
Si tu savais Katerina tout l'enfer que je vis.
Les mecs vont et viennent, j'embrasse plus de bouteilles d'alcool plus qu'une personne saine le fait dans une vie, je ne ressens aucune émotion comme si j'étais un putain de zombie.
Je m'embrase comme un feu ardent, je me consume et des fois j'oublie qui je suis.
Trop triste, trop triste je n'ai pas atterri dans la bonne vie.
Et puis, le pire dans tout ça, c'est que demain, la réalité me reviendra en pleine face.
Parce que demain, Katerina, je retourne à la maison, pour une semaine. Tu sais, chez nous, dans cette maison où nous avons grandi.
Pourtant, je n'ai plus ma place dans ce monde.
Trop triste, trop triste que tu sois partie trop tôt.
Trop triste, trop triste que personne n'a pu empêcher ton départ.
Pourquoi es-tu morte ?
Faut-il que tu me hantes tard le soir, tôt le matin ?
Je ne sais plus ce qu'est ma vie, je ne sais plus comment vivre.
Alors voilà, ce sont les derniers mots qui seront écrits dans ce journal intime même s'il reste quelques pages. Je n'ai plus la force de t'écrire, surtout, j'aimerais passer à autre chose, ne plus avoir à regarder ce journal qui me fait tant mal. Sans t'offenser grande-sœur, c'est le dernier objet que j'ai de toi.
Faire le ménage et se débarrasser de tout ce qui pouvait te rappeler, à été la meilleure chose à faire.
Et puis, ce n'est pas comme si t'avais le droit de m'en vouloir, après tout, tu m'as tuée.
Trop triste, trop triste, je suis morte aussi.
Trop triste, trop triste, personne ne peut me ramener la vie.
Mais je dois t'oublier. Je dois essayer.
Je t'oublierai.
Trop triste, trop triste que ce soit une promesse.
Promis.🌙
vivement la suite :)
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