Bai Luo Yin - Gu Hai -2- "Une Famille Chinoise."

38-Lui dire : « Je t'aime ! » (3 parties)

Tergiversations euclidiennes.

Jing Wei boucla sa ceinture, un œil sur le hublot.

Luo Yin l'imita, un regard vers les rangs devant lui.

-« Notre Commandant Jung Thang Lee et tout le personnel naviguant, vous souhaites la bienvenue à bord du China Airlines CA 185, à destination de Taipei, Aéroport International de Taoyuan. Une jeune femme habillée de rouge et blanc récitait son texte, accompagnée par ses collègues qui orientaient les passagers vers leurs sièges. Le plan de vol sera direct et durera environ trois heures et cinq minutes. La météo est dégagée avec un plafond à... »

-Ils n'en font pas un peu trop avec toutes ces informations visibles sur l'écran ? Luo Yin prenait l'avion pour la troisième fois et était dans la peau d'un explorateur.

-«... Veuillez rejoindre votre place, remonter votre tablette, éteindre vos appareils électroniques et boucler votre ceinture. Nous... »

-Non, c'est ainsi et encore, ils allègent avec les procédures, vu le temps à l'embarquement, les fouilles et tout le cirque. Jing Wei ferma son PC portable et coupa son téléphone. Il le montra à Luo Yin.

-Ouais, c'est fait ! Il vérifia quand même. J'aime bien ce moment où nous ne sommes pas tout à fait des... des gens enfermés dans cette carlingue, filant à des milliers de mètres d'altitude, à la merci de n'importe quel incident et celui où nous abandonnons notre plancher de Terriens. Il y a un peu de... de magie !

-Toi... Jing Wei se cala au fond de son assise. Attends d'avoir pris des dizaines de ces zincs et tu trouveras cela... Non, en fait t'as raison, j'aime ça aussi ! Il sourit.

-Tu m'as eu avec ton air blasé... Luo Yin se sentit mieux, la petite appréhension du pied sur l'intangible, l'air supportant l'appareil, dominée.

-Eh oui... Jing Wei observa par la lucarne. Ah nous roulons, c'est bon signe. Il revint vers son voisin. Inquiet, mon garçon ?

-... Ça va, comme je te l'ai dit dans la voiture. Luo Yin, avant de partir, avait salué tous ses proches. Il passa en dernier voir son père, une boule au ventre, sans vraiment lui dire tous les détails de l'affaire. Il confia son angoisse à A Lang et le remercia d'être son ami. Il les quitta confiant en ses pas, la photo de Gu Hai près de son cœur.

Luo Yin et Jing Wei avaient récapitulé, sur le chemin de l'Aéroport International de Beijing, les grandes lignes du déroulement de la soirée du lendemain, dont une majorité dépendrait de la réaction de Huan Ter Gu.

Après la confirmation de la livraison de l'équipement aux agents sur le terrain, en milieu de nuit, Jing Wei avait préparé Luo Yin à porter un gilet pare-balle et à réagir aux premiers coups de feu. Luo Yin voulait éviter l'affrontement violent et offrir à Huan Ter Gu, la possibilité de se rendre sans effusion de sang. Il savait cela pratiquement vain, mais dans sa logique, chacun avait droit à la justice, même le pire des bouchers.

Le plus risqué pour lui, seront les premières minutes devant l'entrée de la villa de Huan Ter Gu. La moindre erreur et c'était le déluge de feu. Il avait une chance de prendre une balle directement en pleine tête, un tireur d'élite le visant certainement dès son arrivée.

Luo Yin comptait sur l'intelligence de Huan Ter Gu à se confronter à des rivaux, des adversaires dignes de lui. Lors de leur échange à Hong-Kong, il avait senti cet homme en... en manque de relations, de compagnons suffisamment perspicaces et doués, pour lui opposer une contradiction fascinante. Il avait aussi deviné une grande fêlure, une fragilité conditionnée à ce vide et sûrement due à son enfance, songea t-il à ce moment, en pensant à son propre parcours. Puisque les deux hommes avaient un trait intellectuel proche, Luo Yin espérait dans la carte psychologique. Y croyait-il, au point d'aller se jeter dans la gueule du loup ? Quelles chances avait-il de s'en tirer indemne ? De clore ce chapitre ? Pour Luo Yin, aucune de ces questions n'étaient importantes à l'aune de sa raison et de son cœur.