Bai Luo Yin - Gu Hai -2- "Une Famille Chinoise."

1-Un regard vers l'autre.

A Lang, allongé sur l'herbe jaunie du parc près de la maison Bai, regardait Luo Yin, assis sur un banc. Il tenait son visage avec ses deux mains, évitant à la poussière et aux multitudes de petits débris volants, de s'accumuler autour de sa bouche, ses yeux ou de pénétrer dans son nez. Ses cheveux étaient couverts par une légère couche de cet agglomérat et ses vêtements n'étaient plus aussi beaux. Ses jambes nues prêtaient le flanc aux particules, transportées par le tourbillon éolien sévissant dans le parc.

Le Soleil déclinait à l'Ouest, étirant les ombres du paysage, délivrant une lumière orangée, troublée par cette masse virevoltante au-dessus de la ville.

Il faisait encore chaud en cette fin du septième mois lunaire, en cette fin août. Quelques pluies éparses avaient tenté de rafraîchir cette atmosphère, mais rien n'y faisait.

Cela ne suffisait pas à calmer les blessures du paysage. L'étang du parc était presque à sec et les arbres perdaient déjà des feuilles, brûlées par la longue période de sécheresse. La faune ne sortait plus guère que la nuit et le vent poussiéreux s'engouffrait dans les demeures, collait à la peau et s'accumulait comme dans le désert.

Des tempêtes géantes de sable s'abattaient régulièrement sur la ville, ses quartiers Nord et Ouest.

Les restrictions d'usages, de l'eau courante, de circulation, finissaient par achever ce paysage moribond.

Luo Yin ne prêtait guère attention à ce triste spectacle. Son regard fixait un point de l'horizon et ses pensées s'y perdaient, espérant un signe de son amour.

Gu Hai était parti depuis quatre semaines et il n'avait aucune nouvelle. Luo Yin savait les conditions strictes de l'incorporation, mais le temps lui paraissait infini sans un signe de lui, de Gu Hai.

A Lang aboya.

-... Je sais A Lang, mais c'est plus fort que moi ! Comment faites-vous pour supporter la perte... non, l'éloignement de votre... de l'autre ? Il parla machinalement.

A Lang se leva, se secoua et s'approcha de son ami, cet humain qui le comprenait si bien. Il lécha la main venue à sa rencontre.

-... Tu crois ? Des promeneurs passaient rapidement, rejoignant un abri contre la poussière envahissante. Tu crois que cela est si simple ? Je sais qu'il y a la famille, les amis, mais il me manque terriblement... Luo Yin attrapa l'encolure d'A Lang et serra fortement. Il versa une larme et éteignit l'énième incendie qui ravageait son cœur solitaire.

A Lang assit devant son ami bipède, attendit la fin de l'étreinte, diffusant des milliers de particules de bienveillance. C'était son travail depuis ces dernières semaines, auprès de son autre moi. Il l'effectuait surtout à la fin de semaine, lors de la venue de Luo Yin et Lu Yang pour aider Bai Han Qi et Tante Zhou, à finaliser le déménagement dans la nouvelle maison Bai.

Le p'tit démon était revenu de chez ses Tantes et prêtait main forte entre deux escapades curieuses, pour apprivoiser son nouveau terrain de jeu. Yang Meng et You Qi rejoignaient l'équipe, après la fermeture avancée du magasin en raison des restrictions.

Le petit séjour à la mer de Bai Han Qi, Tante Zhou, Tong Tian, le p'tit démon et Luo Yin, en début de mois, avait fait du bien à tous et resserré des liens entre père et fils, après les événements des cinquième et sixième mois lunaire, de juin et juillet. Luo Yin avait appris au p'tit démon à nager. Ils avaient tous apprécié de se retrouver entre eux, comme une famille. Luo Yin put mettre de côté, pour un temps, son ressentiment tout frais, après le départ de Gu Hai.

Il était rentré plus apaisé, se sachant entouré par les siens.

[Autour de Malan Wan, à la pointe de la baie de Rongcheng, avant d'entrée dans la Mer de Bohai, au Sud de la Chine.]