L'étoile et le lion

Chapitre 31

Arthur: Tu es magnifique et en même temps, terrifiante.

Je souris sur cette remarque en lissant une dernière fois les pans de ma veste blanche. Face au miroir et dans cet uniforme rutilant, on pourrait croire que je suis aussi confiante et puissante qu'un chef d'état victorieux. La vérité c'est que cet uniforme est plus que jamais mon armure et en dessous, je me sens comme un chaton roulé en boule.

Moi: C'est moi qui suis terrifiée.
Arthur: Allons, qui osera dire quoi que ce soit ?

Il me sourit pour me rassurer mais nous avons tous les deux la réponse à cette question. Je vérifie une dernière fois que mes cheveux soient bien plaqués et ramassés dans un chignon bas gominé. Tout est parfait, rien ne dépasse mais j'ai peur que cette fois, ce ne soit pas suffisant.

Moi: Mère est en boucle depuis ce matin, pire depuis son coup de fil. Sans doutes que des photographes et des journalistes planquent déjà quelque part. Et Sacha dira quelque chose, il ne se gênera pas. L'occasion est trop belle.
Arthur: C'est vrai. Mais lui aura toujours tort. Et ce feu en toi qu'il a failli éteindre est plus flamboyant que jamais. Regarde toi.

Il passe derrière moi et pose ses deux mains sur mes épaules. Il me force à pivoter face au miroir, les yeux plongés dans mon propre regard. Tout ce que je vois c'est une jeune femme de 25 ans, parfaitement bien habillée d'un tailleur pantalon blanc orné de galons et d'une ceinture, un képi sous le bras. Les cheveux plaqués et le visage légèrement maquillé, je sais que derrière tout ça j'ai rarement eu aussi peur d'affronter l'extérieur.

Arthur: Regarde moi toutes ces médailles. Et tu vas en avoir une de plus à accrocher ce soir ! Et ils croiraient tous être meilleurs que toi ? Montre leur qui tu es. Tu n'as pas fait un choix facile et tu le sais très bien, mais je sais aussi que tu arriveras à les emmener où tu voudras.

Je hoche la tête plusieurs fois. Il a raison. Décidément, les rares hommes de mon entourage sont très sages et persuasifs. Je remonte ma manche pour regarder l'heure sur ma montre. Il est bientôt l'heure et Alexander ne devrait pas tarder. J'assume mon choix et je ne reviendrai pas en arrière mais je ne veux pas l'obliger à patienter dans cette maison avec le risque de faire face à ma mère. Je saisis mes gants tout aussi blancs que le reste du costume et sors de ma chambre suivie d'Arthur qui porte ma valise.

Mère: Où vas-tu encore avec cette valise ?

Notre mère est plantée au pied des escaliers, les deux mains sur les hanches et le visage encadré de mèches folles qui ont osé s'échapper de son chignon parfait. Certainement à cause de ses crises de colère.

Moi: Je ne dormirai pas ici ce soir. Je vous salue car demain je retourne en Angleterre.
Mère: Ahah, voyez-vous ça ! Mademoiselle découche et se sauve comme une voleuse. Décidément, la honte ne t'étouffe pas ma fille !
Moi: Regardez qui je suis, ce n'est pas grâce à vous. Mais j'en suis fière, cette famille l'est aussi et un prince mondialement connu pense également que c'est suffisant. Votre insuffisance vous perdra.

Elle n'ose pas répliquer et alors qu'elle laisse tomber sa mâchoire, abasourdie par le discours que je viens de lui servir, on frappe à la porte. Nicole surgit de nulle part pour ouvrir. La porte s'ouvre sur un homme grand et brun, parfaitement bien coiffé. Son costume rouge et noir parfaitement positionné sur ses épaules laisse soupçonner une stature sportive et puissante. Les bottes, les galons et les médailles rutilantes ajoutant à la force de tels vêtements. Lui aussi porte son képi sous le bras.

Alexander: Bonsoir à tous. Je viens chercher Rose.

Son regard est rivé au mien. Il est si beau et je suis si heureuse de le voir. Il m'a manqué cruellement dans cette épreuve aujourd'hui. Enfin il est là et je vais pouvoir respirer à nouveau tranquillement. Nicole fait une petite révérence maladroite, Arthur incline la tête et ma mère reste bouche bée. Alexander baisse la tête pour rendre le salut à chacun d'entre eux.