Noël

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Le château d'Arthur ressemble étrangement à celui dans lequel nous avons célébré Noël l'an dernier, ou bien c'est moi qui est submergée de nostalgie.
Je n'ai pas réellement envie de célébrer Noël mais cette fête tient au cœur d'Arthur, c'est la première fois qu'il reçoit du monde dans sa nouvelle demeure. Je fais un effort considérable pour sortir de ma chambre car on ne peut pas dire que j'ai fais beaucoup de choses depuis que je suis rentrée de Londres. Ma chambre a été mon sanctuaire pendant des semaines et je ne prenais pas vraiment soin de moi.
Mais ce soir j'ai fait un effort pour remonter petit à petit la pente ; j'ai donc choisi de porter une robe bleu foncé  aux reflets argentés très légers accompagnée d'un châle épais blanc en cachemire de soie.
Je descends les escaliers qui mènent du premier étage à la salle de réception. Tout les invités sont déjà là à discuter et à se gaver de petits fours. Notre mère s'est un peu mêlée de la liste et a invité tout le gratin de la noblesse ; je roule des yeux vers le ciel mais avance tout de même.

J'arrive dans la fosse et je sais qu'on me posera seulement des questions dérangeantes sur mon mari et mon statut en Angleterre. Mais comme d'habitude, mon frère est toujours là pour me soutenir ; il sort de nulle part et me propose son bras. Je l'accepte en souriant, comme pour le remercier et nous avançons. Notre but est d'atteindre un coin du buffet au fond de la salle pour être un peu tranquilles, mais avant ça il faut traverser cette foule infernale.

Moi: Tu sais que je fais tout ça pour toi.
Arthur: Ne t'inquiète pas, je comprendrais si tu remontais dans ta chambre avant le dessert.
Moi: Merci pour tout Arthur.
Arthur: C'est normal. Aller courage ma sœur.

Des petits groupes de personnes s'avancent vers nous l'air de rien, les uns après les autres. J'ai droit aux questions les plus indiscrètes, cachées sous une tonne de mots  qui ne servent qu'à broder sur leur hypocrisie naturelle.
Nous atteignons enfin le buffet et je bois une coupe de champagne pratiquement d'un trait. Arthur me regarde avec des grands yeux écarquillés. Il me retire la coupe vide des mains alors que je suis un peu blasée par les questions, le monde et surtout le manque d'une partie de moi.

Arthur: Ne bois pas comme ça.
Moi: Alexander doit être en train de faire la même chose.
Arthur: Ce n'est pas une raison, que dirait-il s'il te voyait ?
Moi: Il ne dirait rien, je te rappelle qu'il ne me parle plus.

Nous chuchotons, de peur que quelqu'un ait les oreilles qui traînent. Arthur soupire doucement et prend gentiment mon bras.

Arthur: Je dois aller voir quelque chose à l'entrée, je te laisse, ne bouges pas.

Je hoche de la tête discrètement en reprenant une coupe à moitié pleine. Au bout d'une trentaine de secondes, je suis assaillie par les femmes nobles qui font la moralité aigrie et hypocrite du tout Paris de notre milieu. Elles arrivent près de moi l'air de rien et finissent par me poser des tas de questions mal venues. Je ne réponds pas mais il ne faut pas longtemps pour que j'explose.

Moi: Est-ce que je vous pose des questions sur votre mode de vie de courtisanes mégères et hypocrites ? Occupez-vous de vos familles et de votre propre réussite au lieu de vous occuper de la vie des autres.

Je tourne directement les talons et entends derrière moi les piaillements outrés de ces femmes, c'est officiel je suis bien l'enfant indigne et sauvage que décrit toujours ma mère. Je m'échappe par une large porte vitrée qui mène au jardin. Il fait froid mais j'ai besoin de m'isoler de tout ce bazar. Je fais à peine quelques pas après l'escalier de pierre qui descend dans les jardins que j'entends derrière moi une voix qui me glace sur place.

Alexander: Tu leur as fait le regard assassin.
Moi: Tu as l'art de faire des surprises, que fais-tu ici ?
Alexander: À ton avis...
Moi: Nous en avons déjà assez parlé, il me semble.
Alexander: Peut-être mais moi je ne t'ai pas tout dit.

L'étoile et le lionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant