Chapitre 27

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Un mois et demi est passé.

La fête d'anniversaire pour les vingt-quatre ans de mon petit frère adoré s'est étonnement bien passée. Toute notre famille était là, les quelques amis qu'Arthur conservé depuis l'école primaire avaient fait le déplacement depuis la France tout spécialement. Je n'ai pas échappé aux regards accusateurs, au ton pincé et aux remarques acides de ma mère, mon père sagement placé deux pas derrière elle pour apaiser les tensions. Les bougies et les cadeaux passés, mes parents sont partis se coucher et sont repartis en France à peine quelques jours plus tard, emportant avec eux Arthur, mon oncle et ma tante qui n'avaient pas vu Paris depuis quelques années. Le seul rayon de soleil garanti à ma vie s'en est allé de l'autre côté de la Manche. Tout cela aurait été beaucoup plus pénible si Alexander n'avait pas eu l'envie de me surprendre plus encore qu'il ne l'avait fait jusque là.
En effet, le soir de l'anniversaire, il est arrivé sur invitation de mon frère et n'a pas surpris que moi. Je n'étais pas au courant. Toute l'assemblée était stupéfaite et quelque part un peu flattée de se retrouver en compagnie du prince de Cambridge. Obligés de nous tenir loin l'un de l'autre pour ne pas éveiller les soupçons, cette soirée était intéressante. J'ai compris que j'aimais être près de lui, l'entendre parler et rire, sentir son parfum, le voir déployer son costume de prince parfait face à tous ces gens orgueilleux et hypocrites. Nous nous sommes échappés quelques fois sur cette même terrasse, celle où il m'a retrouvée un soir peu avant Noël il y'a presque six mois. Mais notre tactique absolument pas préparée a été efficace, personne ne semble avoir fait le lien entre les affreuses photos floues de mon visage en gros plan sur des double pages de tabloïds et notre entente étouffée.

Alors bien que me retrouvant seule en Angleterre, j'ai choisi de rester. Il m'a fallu y réfléchir pendant quelques nuits, sacrifiant mon sommeil et une bonne dose de paroles rassurantes et encourageantes d'Alexander. J'ai donc quitté la maison excentrée de mon oncle et de ma tante pour rejoindre l'appartement londonien que mon père m'a acheté pour mes dix-huit ans. À l'époque, on voulait me fournir la liberté de m'immerger dans les deux mondes auxquels j'appartiens. Ma famille maintenant éloignée, c'était l'occasion parfaite pour profiter de découvrir cet homme à deux facettes tranquillement. Personne ne surveille mes allées et venues, mes tenues, les durées de mes absences ni à qui je parle. Et après plusieurs jours à faire des aller-retours entre mon appartement et Kensington Palace, Alexander a usé de tout son charme et de toute sa force de persuasion pour me convaincre de m'installer pour le reste de mon séjour chez lui. N'ayant apporté que peu de vêtements pour autant de semaines sous un ciel changeant, les achats d'Alexander se sont révélés fort utiles. Il ne s'était pas trompé de taille et ses goûts sont définitivement très sûrs. Je le soupçonne de m'avoir observée bien plus longtemps qu'il ne veut le dire pour réaliser un tel sans-faute. Enfermés dans son immense palais, tout était à notre portée et nous vivions comme deux personnes complètement normales, bien que parfois interrompus par des appels venant de Buckingham.
Toutes les fois où nous sommes sortis, il a fallu user de stratégies parfaitement ficelées pour ne pas être surpris ensemble ni qu'on me voit sortir de Kensington. C'était plutôt amusant de se cacher mais je sais qu'un jour, nous ne pourrons plus le faire. Pour le moment je n'y pense pas et me concentre sur mon bonheur. Car la vérité est que je n'ai jamais été aussi heureuse de toute ma vie. Voilà deux semaines qu'Alexander a renvoyé quasiment tout son personnel en vacances pour nous laisser un maximum d'espace. Nous faisons la cuisine, le ménage, nous mangeons avachis devant la télévision, nous dînons à n'importe quelle heure, nous dormons après dix heures du matin, nous dansons dans la salon avec la musique à fond. Il nous est arrivé de nous promener dans les beaux et grands parcs de Londres ou même à la campagne. Nous faisons tout pour passer inaperçus et nous sommes cernés par des gardes du corps qui s'efforcent d'être invisibles mais nous essayons de mener une vie normale. Comme s'il n'était pas prince héritier de la couronne et comme si je n'étais pas un général d'armée. Rien que lui et moi, un homme et une femme.

L'étoile et le lionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant