Chapitre 36

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Ely

   Je suis bien matinale ce matin. 6h32. J'ai dû dormir à peine trois petites heures... en même temps, comment dormir quand je viens de me disputer avec lui ?

J'insère deux tranches de pain dans le grille-pain et me laisse tomber au fond d'un des hauts tabourets de l'îlot de cuisine. Je suis une épave.

J'espère ne pas croiser son passage aujourd'hui. Quelle ordure. Ce que j'ai découvert hier était la goutte de trop. Et il y en a déjà eu un bon nombre avant celle-là.

J'ai l'impression de ne plus rien ressentir. Je me sens vide, comme après chaque engueulade avec lui, d'ailleurs.

Je verse du jus d'orange dans un verre, pose mes deux mains à plat sur l'îlot en céramique, puis le fixe longuement. La couleur du jus est vive en raison des rayons du soleil levant, doucement filtrés par les rideaux fermés de la baie vitrée. Cette matinée est censée être agréable en vue du beau temps à l'extérieur, et aussi parce que je suis enfin rentrée de notre fugue. Mais rien n'y fait, Harry me la pourrit. Même s'il est probablement encore endormi.

Ok. Après avoir bu ce verre de jus d'orange, j'arrête de me préoccuper de lui. Je le saisis fermement, déterminée à bien commencer cette journée, et l'avale d'une traite. Quand je le repose, je découvre -ou plutôt entends- Louis traîner lourdement des pieds, déboulant dans le salon, à moitié endormi.

Ses cheveux bruns forment une tignasse toute ébouriffée, et une partie de son tee-shirt blanc est coincée dans son short. Il a des allures de petit garçon, comme ça.

Il s'arrête et s'étire tout en bâillant la bouche grande ouverte, c'est tellement adorable la manière dont ses yeux se plissent dès le moindre rayon lumineux qui croise leur chemin...

-Fais attention, j'ai vu une mouche voler ici il y a deux minutes.

Il sursaute. Je crois qu'il ne m'avait pas vue, jusqu'à maintenant. Ses yeux bleus à la limite du turquoise s'arrondissent comme des billes, avant de se refermer à moitié. Il entame quelques pas mous en direction du frigo sans me regarder.

-Je crois que je vais retourner me coucher tellement c'était drôle... bougonne-t-il presque dans sa barbe.

J'avais jusque là peur que Louis ne m'adresse plus la parole après ce qui s'est passé entre nous dans le garage la dernière fois. Il a l'air de bonne humeur ce matin. Tant mieux.

-Bien dormi ?

Il bâille encore une fois avant d'hocher la tête de haut en bas en se lâchant sur un tabouret en face de moi. Sa tête est baissée sur son verre de jus d'orange, et ses bras sont posés en croix sur l'îlot. Il ne perdra jamais cet air enfantin.

Je le remarque fixer mon avant-bras droit, ses sourcils ses froncent.

-Ils viennent d'où tous ces bleus ?

Avant qu'il me le demande, je ne les avais même pas remarqués.

-Oh, c'est rien de grave... j'ai dû me cogner.

Je n'ai pas envie de lui raconter ce qui s'est réellement passé, parce que je ne veux pas me rappeler de cet instant. Je l'ai frappé. Il m'a fait mal. Physiquement, mais aussi moralement.

J'ai ruminé toute la nuit. L'envie de me lever du canapé du salon pour aller lui présenter mes excuses m'a brûlée mille et une fois, mais j'ai tenu bon. Lui aussi, apparemment.

Louis plisse ses yeux que j'évite avec précautions. Il sait quand je mens, ce n'est pas nouveau. Ça m'agace... 

Il prend son verre en coupe au creux de ses mains, l'air pensif. Il se retourne soudainement de 380 degrés pour observer le canapé derrière lui. Les coussins sont au sol sauf un, qui m'a servi d'oreiller. La couverture bordeaux est défaite, il est entrain de comprendre ce qui est arrivé.

H I M / H.S. -Tome II -Où les histoires vivent. Découvrez maintenant