Je me réveille en hurlant. Le dortoir m'apparaît tout à coup, trop lumineux comparé à l'atmosphère de mon rêve. Le souffle court, je cherche à retrouver mes esprits. De la sueur perle sur mon front et d'affreuses images m'assaillissent : le feu brûlant alors que je me sentais plus froide que jamais, les corps... Frigorifiée je me frictionne les épaules. Mon dieu. Mon regard se tourne vers mes mains. Tremblantes. J'étais presque sûr de les découvrir couvertes de sang mais leur blancheur cadavérique m'inquiète presque tout autant.
Je reste un moment assise en travers du lit défait, contemplant les lignes transparentes de mes mains. Ce n'était qu'un rêve. Un rire hystérique m'échappe. Tout paraît tellement faux maintenant que je suis dans ce dortoir malodorant avec ce soleil qui perce à travers le dôme ruisselant du bâtiment résistant. Petit à petit, un immense soulagement m'envahit. Je me redresse lentement et prends le temps d'ouvrir les yeux. Je me laisse une seconde pour parvenir à relayer mes rêves à plus tard. J'apprends depuis quelques semaines à diviser les différentes informations dans mon cerveau. D'un côté, il y a l'entrainement qui est indispensable à ma survie. Puis de l'autre, mes rêves qui s'imposent en un mélange de terreur, de hurlements et de larmes. Et les souvenirs. Plus loin. Beaucoup plus loin dans mon esprit.
Je tente de me lever mais je suis aussitôt prise de vertiges. Subitement, la pièce se met à tourner comme si tous mes sens avaient perdu l'équilibre. J'ai seulement le temps de me rattraper au mur adjacent. Mais qu'est ce qui m'arrive ? La réponse est évidente. Je suis épuisée. La fatigue se fait de plus en plus présente ces derniers jours. Toutes les nuits, à chaque fois que l'obscurité et le silence envahissent le ciel, je rêve de ces trains en feu, de mes parents et de la fin de la première phase qui ne fait que se rapprocher. Si bien que je suis sans cesse éveillée et que je ne trouve le sommeil que très tard dans la nuit, lorsque le silence semble devenu mon tombeau.
Je me rassois. Presque tout le monde est parti du dortoir. Il reste Don et Ed dans un coin de la salle, mais ils sont trop occupés pour m'avoir vu... Et Ant. Celui-ci se trouve assis sur son lit situé en face du mien, cloué au mur opposé. Les jambes recroquevillées sur le matelas, il ne me semble pas s'être aperçu de ma présence. Ses prunelles dorées survolent un livre à toute vitesse. Si vite que cela paraît irréelle. Soudain, il relève les yeux et nos regards se croisent. Ses prunelles miels accrochent irrévocablement les miennes. Je me détache de son regard et me tourne vers la porte le plus rapidement possible, soudain consciente que si je ne me dépêche pas je serai en retard. Sans prendre le temps d'évaluer la colère de Kurt, je me dirige en trombe vers la sortie. Je bascule presque aussitôt. Mélange de vertige, de fatigue et de maladresse, surtout de la maladresse cette fois. Je me retiens une seconde fois au lit le plus proche. Ant apparaît aussitôt, plus près que je ne le pensais.
- Ça va ?
- Hum hum ...
Je me relève gênée et lui souris pour garder contenance. Il me répond par une mimique amusée.
- Quoi ? Grogné-je piquée.
- Rien du tout.
Il sourit à nouveau et je le fixe muette. Fatiguée, je sens une sorte de colère sourde m'envahir, un mélange de frustration, d'exaspération et d'impatiente. Je croise les bras autour de ma poitrine essayant de ne pas penser que je suis encore en pyjama. Tout à coup je ferais n'importe quoi pour avoir une couverture à même de dissimuler toute cette peau visible à cause du pauvre short et du débardeur distribués aux apprentis.
- Tu m'excuseras mais j'ai à faire ! Conclus-je en me faufilant derrière lui.
- El ?
Je me retourne vers lui lentement et l'interroge du regard.
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DESCENDANTE
Science FictionAprès la guerre, le monde avait sombré si bas que, même la plus fragile des lueurs, ne parvenait plus à redonner à la terre ce qu'elle avait perdue. Les hommes avaient oubliés jusqu'à la sensation enivrante du sourire ravageur, jusqu'au doux carillo...