Diversion

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Le réveil est difficile pour nous deux. Nous sommes percluses de courbatures d'avoir dormi à même le sol, et je me rends compte rapidement que nous avons eu une chance inouïe de ne pas avoir été repérées à nouveau dans la nuit. Il faudra être plus prudentes à l'avenir, mettre en place des tours de garde.

Je me dis également qu'en fait, ne sachant pas exactement la part qu'à Denoran dans ma vente, il vaut mieux éviter la ferme en elle-même. Je fais part de mes réflexions à ma sœur, et elle est d'accord avec moi. Elle propose de se diriger vers la mer, et ensuite de trouver un bateau qui pourra nous conduire chez nous. J'approuverais tout à fait ce programme, mais je veux d'abord m'assurer qu'Ashkore va bien. Et pour cela, le meilleur endroit est la grotte où je le retrouvais. Avec un peu de chance il y est toujours. Sinon... Eh bien nous irons au port.

Nous n'avons toutes les deux que des souvenirs plutôt imprécis des quelques cartes de l'île que nous avons vues, mais si je ne me trompe pas le soleil était à notre droite lorsque Falek m'a vendue, nous allions donc vers le nord. Je repère le soleil, qui est à l'est puisqu'il s'est levé il y a peu, et que, la saison des pluies touchant à sa fin nous sommes proches de l'équinoxe.

Nous nous mettons donc en route, et même si nous marchons rapidement, je prends le temps de savourer le sentiment de liberté qui m'envahit quand je réalise que je ne suis plus esclave de qui que ce soit. Je prends une grande bouffée d'air pur qui me semble presque avoir un goût spécial.

Nous prenons le temps sur la route de discuter comme nous ne l'avons pas fait depuis des lustres. Elle savait déjà bien sûr dans les grandes lignes ce qui m'avait conduit jusqu'à la retrouver, et elle m'avait à son tour expliqué la routine qui s'était installée dès son arrivée chez Orwill.

Cependant, le fait d'avoir été séparées la grande majorité du temps nous a empêché de nous retrouver vraiment et je suis ravie de pouvoir le faire aujourd'hui.

J'ai toujours été très proche de Larina, bien que nous n'ayons pas du tout les mêmes centre d'intérêts ni les mêmes responsabilités. Là où je préfère passer des heures loin de la ville seule avec mon cheval, elle adore discuter avec les autres dames, que ce soit de couture, de maquillage... tous ces sujets ne me passionnent à vrai dire pas du tout. Je porte des robes, et j'ai appris la couture comme je le devais mais pas plus que nécessaire. Et là où j'aime étudier la faune et la flore de toutes les îles connues et de l'océan, ma cadette s'intéresse aux potins de la Cour. Je me dis de temps en temps que nos rôles auraient dus être inversés tant elle est mieux intégrée à la Cour que moi...

Nous sommes très différentes, et pourtant chacune fait toujours l'effort d'écouter et a confiance en l'autre. Je sais qu'elle m'aidera si la situation empire à nouveau, même si elle a du mal à prendre des initiatives et à réagir rapidement face au danger.

Bref, nous marchons toute la matinée en récoltant de quoi nous nourrir au passage. Nous économisons les quelques fruits que nous trouvons et les gardons dans un petit sac bricolé avec de grandes feuilles.

Nous n'avons cependant aucun moyen de stocker l'eau, nous nous arrêtons donc à chaque ruisseau que nous trouvons pour boire tout ce que nous pouvons. Il y en a peu mais heureusement, nous finissons par en croiser un qui va dans la même direction que nous, nous décidons donc de rester près de la berge.

Il y a plus verdure sur la rive, nous marchons sur de l'herbe encore tendre grâce aux dernières pluies de l'année et quelques arbres épars nous font de l'ombre.

C'est au détour d'un coude du cours d'eau que nous voyons à une cinquantaine de mètres de nous une jeune fille sortir en courant du bosquet qui borde l'autre rive du petit torrent.

La poursuite (en réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant