I - Chapitre 10

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Jeremy

Je me réveillai le lendemain de notre arrivée en Corse à la lumière du jour perçant à travers la lucarne de la chambre. Ce simple moment me remémora des tas de souvenirs d'enfance. Combien de fois m'étais-je réveillé ici alors qu'il faisait déjà jour depuis des heures ? Combien de fois ma mère avait-elle dû me sortir de ce même lit pour l'aider à jardiner ou à cuisiner ? Combien de fois avais-je redécoré cette chambre ? Combien de fois Tom était-il venu à la maison ?

J'aimais cet endroit de tout mon cœur, il représentait beaucoup pour toute ma famille, pourtant cet amour était toujours accompagné de nostalgie. Chaque recoin, chaque couloir, chaque pièce me le rappelait. Du temps où ma mère nous avais surpris en train de dessiner sur les murs jusqu'à nos soirées improvisées sur le toit, en passant par la délicieuse odeur des cookies qui nous attendaient toujours dans la cuisine, Tom était partout dans cette maison.

Stella et Raphaël l'avait peu connu en fin de compte, mais Marina savait qu'il était le frère dont j'avais toujours rêvé. Ma grande sœur avait du mal à nous supporter la plupart du temps, mais quand Juliette, la grande sœur de Tom, venait aussi à la maison, nous étions tous les quatre les meilleurs amis du monde. Nous avions vécu nombre de nos première fois ensemble et nous étions toujours là dans les moments importants. Nos premiers baisers. La fracture du bras de Tom. Nos premières cuites. La rupture de Marina et son premier copain. Le saut en parachute au-dessus du golf du Valinco. Nos premiers joints. Le bac de Juliette et Marina. Nos premières vacances sans parents. Le service militaire. Nos premières missions sur le terrain.

Je me redressai subitement, frappé par le souvenir suivant. Le souffle court, je sautai du lit et me jetai presque sur les tiroirs de la commode. Mon yeux tombèrent finalement sur une familière petite boîte en velours noire, très simple. Je la pris délicatement dans mes mains et l'ouvris. Elle était là. Brillante et gravée avec précision. Sa plaque d'identité militaire.

Des bruits de vaisselle et des voix me ramenèrent à la réalité. Je m'empressai de refermer la boîte et de la ranger à sa place. Je jetai un coup d'œil vers le petit lit de Savannah pour m'assurer qu'elle dormait toujours et qu'elle ne m'avait pas vu, mais je découvris à la place que son lit était vide. Non seulement je ne comprenais toujours pas son choix, mais j'étais persuadée qu'elle était épuisée hier soir et qu'elle ferait une très longue grasse matinée aujourd'hui. Pourtant j'aurais dû le savoir depuis le temps, Savannah n'était jamais prévisible.

Ayant pour pyjama un vieux T-shirt et un short jogging, je descendis tel quel au rez-de-chaussée. Je jetai un coup d'œil dans le salon et la terrasse à la recherche de mon ancienne élève, mais elle n'y était pas. J'entrai donc dans la cuisine légèrement préoccupé. Bien sûr, elle n'y était pas non plus.

- Bonjour ! saluai-je ma mère et mon beau-père, en train de ranger les affaires du petit-déjeuner.

En effet, il était déjà 10 h et connaissant ma famille – à l'exception de Raphaël – ils devaient tous être levés depuis longtemps. Apparemment, j'étais celui qui avait fait la grasse matinée.

- Où est Savannah ? demandai-je directement en français puisqu'elle n'était pas là.

Ma mère me sourit d'un air rassurant.

- Elle est partie courir avec Raphaël ce matin.

Je la dévisageai perplexe quelques secondes. Était-ce une blague ?

Paul sembla comprendre mon désarroi.

- On a tous eu la même réaction, qui eût cru qu'ils se supportaient suffisamment pour aller courir ensemble ? Surtout Raphaël ! Ce n'est pas qu'il n'est pas sportif mais... tu sais bien, il place plus de temps au studio qu'ailleurs et c'est pas ça qui maintient particulièrement en forme.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant