II - Chapitre 29

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Savannah

Il s'était avéré que seule ma mère s'était réellement rendue à la soirée de lancement de la nouvelle collection que je représentais, alors je dus attendre plusieurs heures avant de pouvoir confronter mon père. Ce n'était pas plus mal, je n'aurais certainement pas été capable de faire preuve de suffisamment de sang-froid pour sourire à ses côtés après avoir enfin découvert la vérité.

Je ne savais pas exactement comment qualifier la manière dont je me sentais. Jeremy ne m'avait jamais abandonnée. Si je considérais que les premiers mois qui avaient suivi mon réveil chez mon père avaient été durs, je n'osais imaginer ce qu'il avait enduré, me croyant morte. Je réalisais d'un coup qu'une grande partie de toute la colère à laquelle je m'accrochais sans cesse venait simplement de voler en éclats mais je ne me sentais pas capable pour autant de l'embrasser et de l'aimer comme je le faisais à l'époque. Quelque chose avait changé. J'avais changé. S'il savait à quel point, Jeremy ne voudrait probablement même plus me voir.

Ainsi, je me trouvai confuse alors que la limousine nous ramenait enfin à la maison, mais une chose restait très claire : mon père m'avait menti droit dans les yeux pendant un an et il avait sérieusement cru que je ne m'en rendrais pas compte. Il n'était plus question d'être sage. La première chose que je fis en entrant dans la maison fut de retirer mes escarpins, ces instruments de torture, d'ignorer le regard réprobateur de ma mère et de marcher d'un pas déterminé vers le bureau de mon père.

J'ouvris brusquement la porte sans frapper, faisant ainsi sursauter les personnes qu'il avait en face de lui. Il s'agissait de deux de ses employés.

- Dehors, leur fis-je sans détour. Maintenant.

Ils ne cherchèrent pas du tout à protester et au contraire, ils parurent soulagés de pouvoir enfin rentrer chez eux. Mon père resta sereinement assis derrière son bureau.

- Que s'est-il encore passé ? soupira-t-il avec condescendance.

- Scandola était à la soirée, expliquai-je la mâchoire serrée. Je sais ce que tu as fait.

Je n'eus pas besoin d'être plus précise que cela pour qu'il comprît de quoi je parlais.

- Je vois, fit-il en effet en joignant les mains, j'espère que tu comprends que c'était nécessaire.

Je secouai vivement la tête.

- Ça ne l'était pas ! On aurait pu parler, comme le font les gens normaux ! Tu aurais pu m'expliquer la situation, tu aurais pu me dire pourquoi tu avais besoin de moi et tu aurais pu me laisser faire mes propres choix.

Mon père garda un regard sévère posé sur moi, sans rien dire.

- J'aurais accepter, tu sais, continuai-je donc en croisant les bras, j'aurais accepté et Jeremy aussi.

- Non, déclara-t-il. Peut-être bien que tu aurais voulu accepter, mais Scandola t'en aurais empêchée.

- Tu ne le connais même pas ! m'exclamai-je.

- Savannah ! fit mon père en levant les mains pour je me calmasse. Assieds-toi.

Je ne bougeai pas d'un centimètre.

- S'il-te-plaît, ajouta-t-il donc à contre cœur.

Je finis par accepter de m'asseoir dans un de ses fauteuils, malgré l'horrible sentiment de n'être qu'une employée à sa merci. À l'inverse, il se leva et nous servit deux verres de whisky avant de revenir s'asseoir. Je n'hésitai pas à entamer le mien.

- Je savais très bien que tu accepterais, Savannah. Je n'aurais eu qu'à prononcer le nom Sherwood pour te convaincre de me rejoindre, mais ce n'était pas le cas de Scandola. Il aurait tout fait pour te montrer que je n'étais pas fiable, que j'incarnais tout ce que tu détestais et que tu avais tout intérêt de t'enfuir avec lui vivre d'amour et d'eau fraîche ou je ne sais quelle connerie plutôt que de t'engager dans tout ça. Je me suis donc assuré qu'il ne serait pas un problème.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant