I - Chapitre 30

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Savannah

Lorsque nous rentrâmes au village chez les Scandola, je n'eus qu'un objectif en tête pour tout le reste de la soirée : éviter à tout prix Jeremy. J'avais conscience d'être la principale cause du malaise qui s'était installé entre nous, puisque tout allait bien avant que je bondisse loin de lui comme s'il avait la peste. Du moins, tout avait l'air d'aller bien. Comment pouvais-je lui expliquer que c'était Alec que j'avais eu désespérément envie d'embrasser ainsi ? Et pire, comment pouvais-je avouer à moi-même qu'une infime part très profondément enterrée de mon cœur partageait ses sentiments – chose que je m'étais à jamais interdite ?

Ainsi, quand Laura demanda que quelqu'un allât prévenir Raphaël que le dîner serait prêt dans une demi-heure, je saisis immédiatement l'occasion de m'éclipser. Je marchais tranquillement jusqu'au studio, profitant des derniers rayons du soleil avant qu'il ne passât derrière la montagne, lorsque j'entendis déjà des notes de musique à la guitare. Elles étaient très douces, très belles et formaient une parfaite mélodie. En théorie, cela n'aurait pas dû m'étonner, mais Raphaël n'était pas vraiment du genre ballade.

J'entrais le plus silencieusement possible dans le studio, si silencieusement qu'il ne remarqua pas ma présence. Son visage portait un air sérieux et triste.

- Salut, fis-je avec un vague signe de main.

Raphaël releva subitement la tête, surpris, mais pas énervé pour autant.

- Salut ! Je ne t'avais pas vue venir...

Je souris timidement et fis un pas vers lui.

- Est-ce que ça va ? 

- Pourquoi ça n'irait pas ? rétorqua-t-il sur la défensive comme à son habitude.

Il faudrait bien plus que ça pour me faire lâcher l'affaire.

- J'aime beaucoup les ballades, mais c'est pas vraiment ce que tu as l'habitude de jouer. Que s'est-il passé ? demandai-je le plus gentiment possible.

Je ne tenais pas à lui donner l'impression que j'allais le juger. Il reposa finalement sa guitare et releva la tête en feignant un sourire.

- Ma petite-amie a rompu avec moi ! 

Je grimaçai en entendant cela.

- Aïe, désolée. Par message ? 

- Ouais.

- Ça craint. Je suis vraiment désolée pour toi. 

Il balaya ma remarque d'un geste de la main.

- Ce n'est pas la peine. J'aurais fini par rompre moi-même tôt ou tard.

La manière dont il essayait de prétendre que ça ne l'atteignait pas était tellement flagrante. Je le savais mieux que quiconque, c'était souvent moi qui me retrouvais dans cette position.

- Tu sais que tu n'es pas obligé de rabaisser ce que tu ressens, c'est normal d'être triste après une rupture. 

- Non vraiment, dit-il en secouant la tête, ce n'est pas la rupture le problème, c'est... C'est ce qu'elle a dit en le faisant. 

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant