I - Chapitre 24

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Savannah


- Aïe ! grogna-t-elle en portant une main à l'arrière de son crâne.

- Je t'ai dit de rester sur tes coudes, souffla une voix masculine dans son dos.

Lizzy leva les yeux au ciel avant de se retourner rapidement vers Jason.

- C'est plus facile à dire qu'à faire...

Elle se remit ensuite à ramper. Je commençais à croire qu'il s'agissait d'un rite de passage. On n'était pas vraiment une rebelle avant de s'être promener dans les conduits d'aération du pensionnat en pleine nuit. J'ignorais depuis combien de temps Lizzy et Jason avançaient ainsi, mais les coudes de cette dernière étaient en feu et elle ne cessait de se cogner contre les pans métalliques du conduit. Ramper ainsi n'était pas encore dans ses habitudes.

- Je t'ai dit qu'il y avait un autre moyen, rétorqua Jason.

- Ce n'est pas ce que Savannah aurait choisi, répondit Lizzy contre toute attente.

C'est étrange à dire, mais quand bien même nous partagions la vie, j'avais l'impression de la sentir s'éloigner de moi un peu plus chaque jour. La mort de ses parents l'avaient changée, j'en avais conscience. Ce qui m'échappait, c'était comment j'avais pu ne pas le voir. Mais ressasser le passé ne m'aiderait pas. Il fallait maintenant que j'essayasse de comprendre comment elle réfléchissait. Alec était persuadé qu'il y avait quelque chose de sombre en elle que personne n'avait vu auparavant. Je songeais de plus en plus à lui donner raison.

- Mais Savannah...

- Mais Savannah quoi !? le coupa-t-elle sèchement. Je suis tout aussi capable qu'elle !

Les poings serrés, elle redoubla d'effort pour avancer plus vite.

- Ce n'est pas ce que je voulais dire, Eliza.

Elle secoua doucement la tête, faisant trembler ses cheveux blonds relevés en queue de cheval.

- Pourquoi est-ce que personne n'arrive à me voir autrement que comme une pauvre petite fille fragile ? Je peux encaisser des coups moi aussi.

- J'en doute pas. Mais il y aura plus fort que toi et...je suis terrifié à l'idée d'arriver trop tard.

Jason avait prononcé ces mots dans un murmure qui fissura le cœur de Lizzy aussi bien que le mien. Nous avions toutes deux conscience de la phrase qu'il avait laissée en suspens et elle commençait définitivement par un « Si... ».

- Ce n'était pas ta faute ni celle d'Anna, déclara alors Lizzy d'une voix pleine de détermination, c'est la faute de gens comme Luke et M. Hamilton qui pensent qu'ils peuvent jouer avec la vie des gens sans subir aucune conséquence.

Elle contorsionna son corps pour pouvoir rencontrer son regard.

- Et ils ont tort. C'est pour ça qu'on doit aller jusqu'au bout ce soir.

Une petite étincelle ralluma les yeux clairs de mon meilleur ami.

- Oui, il n'est pas question de faire marche arrière maintenant. Quoique, souffla-t-il d'un air pensif, ça fait combien de fois qu'on a tourné à gauche ?

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant