II - Chapitre 48

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Sophia

3 mois plus tard

Les douces lueurs de l'aurore s'élevait progressivement dans le ciel en ce matin d'été à l'air déjà chaud. La ville était encore endormie ou sur le point de se réveiller, et seules quelques personnes circulaient dans les rues, un bagel ou un café à la main. Alors que je tournais sur Pennsylvania Avenue, mon cœur fit un bon dans ma poitrine comme il le faisait à chaque fois et ma gorge commença à se resserrer de plus en plus. Cet endroit autrefois encerclé de verdure et de fleurs aux milles couleurs semblait désormais triste et nu. Il faudrait encore attendre l'été prochain avant que les jeunes plants tout juste semés en terre se transformassent en arbustes et en fleurs. Étrangement, je m'en réjouissais. Je détestais que le monde fut si lumineux, si vivant et si joyeux en cette saison, tandis que je me sentais anéantie et vide.

Elizabeth et le nouveau Conseil avait hésité pendant un temps à reconstruire ou non la Maison Blanche. C'était un lieu symbolique du pouvoir américain depuis des siècles, mais c'était aussi l'incarnation d'un système politique corrompu et défaillant auquel nous avions mis fin sans regret. Ainsi, il avait été décidé qu'un nouveau bâtiment serait érigé pour devenir la résidence officielle et le bureau de la nouvelle Présidente et de son Conseil. À la place, ce fut un mémorial qui fut construit par dessus les cendres.

Sur toute la surface qu'occupait auparavant la Maison Blanche, de nombreuses plaques de marbres noirs avaient été disposées en cercles, sur lesquelles avaient ensuite été gravés les noms de tous ceux tombés au cours de cette guerre. La plupart étaient des Soleils, des Lunes ou des hommes qui avaient combattus au nom des Hamiltons, d'autres étaient des associés, des hommes d'affaires qui avait contribué au financement, à la campagne et à l'élaboration du futur nouveau système politique, et d'autres encore étaient des victimes, non pas de notre camp, mais des victimes collatérales, des personnes qui s'étaient simplement retrouvées coincées dans cette guerre et qui l'avaient payé de leur vie.

Chaque plaque était ornée à son extrémité d'un soleil et d'une lune plaqués or, s'entrecroisant et se rejoignant pour pointer vers le ciel. Ils représentaient la toute première union historique entre les Soleils et les Lunes qui s'étaient battus et qui étaient morts aux côtés les uns des autres pour la même grande cause. Vu du ciel, le mémorial lui-même était le dessin d'un soleil et d'une lune en son sein. Aucune plaque n'était plus belle, plus haute ou plus grande que les autres car une vie n'était pas plus importante qu'une autre. Toutefois, la plaque située parfaitement au centre du cercle était spéciale.

Sur celles-ci n'étaient gravés que trois noms. Le graphisme et la taille des lettres étaient les mêmes, mais cette plaque honorait des personnes, non pas sans qui la victoire aurait été impossible, mais sans qui le projet n'aurait même pas pu exister. Le premier était Arthur Hamilton. Le second était Victor Hamilton. Et le troisième était Trevor O'Brien. Aucune épitaphe n'était nécessaire car chacun de leurs noms étaient désormais connus de tous et d'ici quelques années, leurs exploits seraient enseignés aux enfants, à tous les enfants, dans les nouvelles écoles mixtes en cours de construction.

Il ne s'était pas passé un jour depuis l'ouverture du mémorial sans que je ne m'y fus rendue, souvent à l'aube. Les nuits étaient souvent courtes et agitées, mais l'aurore était calme et apaisante. C'était presque devenu un rituel. Je m'y retrouvai presque toujours seule à cette heure-ci, alors je lui parlais. Plusieurs personnes avaient tenté de me convaincre de parler à un thérapeute ou un groupe, mais il était le seul à qui je voulais raconter comme je me sentais et ce que je vivais. Et Victor m'écoutait toujours.

Ces trois derniers mois, les gens n'avaient cessé de me répéter que la douleur s'amoindrirait avec le temps, pourtant j'avais le sentiment de souffrir tout autant que ce jour-là. J'avais seulement appris à mieux le cacher. Je n'osai imaginer le nombre de litre de larmes que j'avais pu pleurer dans les jours qui avaient suivis. J'aurais tant aimé pouvoir m'évanouir et oublier, ne serait-ce que quelques jours comme l'avait fait Savannah. Celle-ci avait poussé son corps à un tel degré d'épuisement qu'elle ne s'était pas réveillée avant trois jours.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant