I - Chapitre 32

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Savannah


La brise matinale caressait délicatement sa peau et ses cheveux blonds. Il faisait déjà bon en Floride mais l'herbe était encore fraîche sous les pieds de Lizzy. Elle avait installée son clavier au milieu du jardin, encerclé par les par-terres de fleurs. Elle alla s'y asseoir tranquillement, un petit gâteau à la main qu'elle posa sur le rebord du clavier. Elle sortit ensuite un briquet de la poche de son kimono fleuri et alluma la bougie qui trônait sur le muffin. Elle prit finalement une grande inspiration et laissa ses doigts trouver naturellement les touches du clavier. Les premières notes de musique résonnèrent autour de nous, suivies de sa douce voix.

Cela faisait si longtemps que je l'avais entendue chanter. Elle était faite pour ça. Je le savais et je pouvais le sentir. Elle était apaisée. Son cœur battait doucement, son souffle était posé, ses paupières se fermaient d'émotion et sa voix s'élevait dans les airs sans le moindre effort. Et bien sûr la chanson était parfaite. Lizzy avait aussi un don pour ça. Lorsqu'elle parlait, elle ne trouvait pas toujours les bons mots, mais quand elle chantait, c'était une évidence.

D'une main, elle laissa les dernières notes résonner et de l'autre, elle prit le muffin, puis elle ferma les yeux et murmura :

– Joyeux anniversaire, Anna.

Je souris tendrement, émue, depuis le jardin des Scandola dans lequel j'accrochai des guirlandes lumineuses. Enfin, nous soufflâmes ensemble.

Une forme en mouvement attira alors l'attention de Lizzy près de la maison. Elle n'eût qu'une seconde pour reconnaître une silhouette masculine de dos, grande et musclée, avec des boucles blondes, avant qu'elle ne disparût derrière l'angle du mur. Probablement intriguée, elle se leva et suivit l'homme.

– Alec ? appela-t-elle d'une voix étonnée.

Au son de sa voix, l'homme qui ressemblait en effet comme deux goûtes d'eau à Alec se figea. Ma meilleure amie avança encore de quelques pas avant de s'arrêter à son tour, sentant que quelque chose n'allait pas.

– Alec, qu'est-ce que...

L'homme se retourna pour enfin lui faire face et leur regards se rencontrèrent. Lizzy retint son souffle, abasourdie. Elle ne le savait pas encore, mais ce n'était pas Alec qui se tenait à quelques mètres d'elle. C'était Charlie. Ils étaient presque en tous points similaires. La carrure, les cheveux, les traits du visage, le tatouage dans la nuque. Ce qui trahissait Charlie était son regard. Il dévisageait Lizzy avait un mélange de fascination et de cruauté – chose que je n'aurais jamais cru possible – mais surtout avec hésitation. Ça n'était jamais arrivé. Quant à mon amie, elle était pétrifiée. Je n'avais pas le moindre doute qu'une petite voix intérieure lui criait de courir rentrer le plus vite possible dans la maison pour prévenir le vrai Alec, mais il y avait quelque chose d'autre en elle qui l'empêchait de bouger. Elle aussi, elle était fascinée.

Un instant plus tard, Charlie disparût dans les bois à la vitesse effrayante du Lune meurtrier qu'il était. Cela eût l'effet d'un coup de massue pour Lizzy. Celle-ci courut enfin à l'intérieur de la maison et se précipita à l'étage pour alerter Alec et Jason. Une voix amusée perça alors mes pensées et me ramena dans mon propre corps.

– T'en mets du temps à accrocher des guirlandes toi, ma mère aura déjà 60 ans quand t'auras fini.

Je levai les yeux au ciel et souris sarcastiquement à Raphaël.

– Et toi tu fais quoi au juste ?

Il leva fièrement le menton.

– J'installe le matériel pour les musiciens. C'est la mission la plus importante.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant