I - Chapitre 45

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Jeremy


À peine eus-je parvenu à ouvrir les yeux que je me retrouvai ébloui par une puissante lumière blanche. Les paupières à nouveau closes, je pris le temps de remettre au clair mes idées, à commencer par mes derniers souvenirs. La naissance de mon neveu. L'arrivée de l'hélicoptère de M. Hamilton. L'accident causé par l'éboulement de pierres. Mes jambes coincées sous une portière arrachée. Le visage ensanglanté de Savannah. Savannah. Où était-elle ?

Je me forçai à rouvrir les yeux et luttai pour m'acclimater à la luminosité de la pièce. Je tournai la tête de chaque côté mais mon regard ne rencontrait que des murs blancs. Je voulus alors me redresser. Je commençai à prendre mille précautions, anticipant la douleur que bouger me ferait ressentir, mais je me rendis bientôt compte que cette douleur était inexistante. Mes membres étaient quelque peu courbaturés mais les déplacer était facile et ne me faisait pas du tout souffrir.

J'éloignai rapidement la couverture qui recouvrait mon corps et me retrouvai bouche-bée devant l'état de mes jambes. Pour commencer, je portais un jogging gris et pas le moindre bandage ou plâtre. Je relevai ensuite le bas du jogging le long de ma jambe et ne découvris aucune cicatrice récente. Pourtant, je n'avais pas rêvé. Nous avions bien été victime d'un violent accident de voiture et absolument chaque partie de mon corps me faisait atrocement souffrir. Cela n'avait pas de sens.

Éventuellement, je parvins à trouver une réponse rationnelle, puisque je ne croyais pas aux miracles. J'avais été guéri par un soigneur enfant du Soleil. C'était rare, mais il arrivait que des Soleils eussent été affectés par le virus à un degré plus important que la plupart. Cela se manifestait par l'apparition d'autres pouvoirs que ceux liés aux éléments de la nature, comme la guérison ou la télépathie. Il ne s'agissait même pas d'être un Soleil puissant, ceux-ci avaient un contrôle de leur élément et des capacités époustouflantes acquises avec le temps et l'expérience, ici on parlait vraiment de cas rares, relevant presque de l'anomalie. Et le fait que M. Hamilton eût pu mettre la main sur l'un d'entre eux était aussi terrifiant qu'impressionnant.

Néanmoins, dans l'immédiat, il y avait bien plus préoccupant. J'ignorais où j'étais et surtout j'ignorais où Savannah était ou même si elle était en vie.

Une porte coulissante s'ouvrit alors le long d'un des murs blancs. J'eus à peine le temps de voir une femme hispanique en tenue de domestique déposer un plateau que la porte commençait déjà à se refermer. Cette femme me paraissait familière, mais je ne parvins à me souvenir exactement de ce visage qu'une fois la porte close. Je bondis hors du lit et me précipitai pour frapper violemment sur le mur.

– Maria, revenez ! Maria ! Ouvrez cette porte !

J'eus beau encore tambouriner sur la porte quelques secondes, je n'obtins aucun réponse.

Maria avait travaillé presque toute sa vie pour les Darcy. Je l'avais rencontrée à l'occasion de leur vacances en Angleterre quelques mois plus tôt auxquelles Savannah avait été conviée. Elle était chargée de superviser tous les employés des Darcy, mais elle participait elle-même à toutes sortes de tâches, comme la cuisine ou le ménage. Cependant, ce qu'elle avait accompli de plus beau au cours de ses années de service, c'était une partie de l'éducation d'Elizabeth. Si celle-ci pouvait se montrer très égocentrique, elle avait aussi hérité d'une grande bonté qui venait sans le moindre doute autant de Maria que de sa propre mère. Maria faisait pour ainsi dire partie de la famille Darcy. Vous comprenez donc à quel point j'avais été choqué de la voir ici, travaillant pour Arthur Hamilton.

Je finis par laisser tomber l'idée qu'elle reviendrait m'ouvrir la porte et portai plutôt mon attention sur le plateau qu'elle avait apporté. Il contenait un repas complet, ayant honnêtement l'air appétissant, mais je ne faisais pas une seule seconde confiance à Hamilton pour ne pas tenter de m'empoisonner. Pour que le message fût bien clair, je le pris et le balançai contre le mur d'en face. La vaisselle se brisa bruyamment. J'étais persuadé que M. Hamilton m'observait et m'écoutait en permanence bien qu'aucun micro ou caméra n'était visible autour de moi.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant