Fille du Ciel [FDS tome 3]

II - Chapitre 22

Savannah

Après avoir lâché la bombe de l’alimentation, les Généraux avaient décidé de faire une pause. Nous avions reçu la consigne de rester dans la salle, surveillés par les Lunes armés, et d’attendre. C’était assez insupportable.

– À votre avis, chuchota d’abord Lizzy que Trevor et Jeong avait cessé de cacher pour le moment, est-ce...est-ce que ça se passe bien ?

Je devais avouer que j’étais tout aussi hésitante qu’elle.

– Oui, affirma Victor contre toute attente. Ils ne nous ont pas virés, ils ne nous ont pas attaqués, ils nous ont écoutés, ils nous ont pris au sérieux et ils sont en train de réfléchir à la masse d’informations qu’on vient de leur donner. C’est bien plus prometteur que certaines réunions que j’ai pu avoir avec des humains.

J’étais étonnamment très reconnaissante envers mon frère. Si cette rencontre aboutissait à une signature d’accord d’ici quelques semaines, il n’y serait pas pour rien. J’avais remarqué que j’avais cette tendance à rejeter toute l’aide qu’on me proposait – ou m’imposait d’ailleurs – car j’étais souvent persuadée que tout faire moi-même était la meilleure solution, c’était en tous cas ce que l’on m’avait toujours appris. Mais je commençais à comprendre que je pouvais avoir tort.

Après un quart d’heure d’attente, nous entendîmes des pas se rapprocher. Sans même qu’un ordre fût formulé, Lizzy se replaça derrière Trevor et Jeong de sorte à ce que l’on ne remarquât même pas sa présence. Les généraux entrèrent un à un dans la pièce et se positionnèrent chacun derrière leur fauteuil. Une fois qu’ils fussent tous à leur place et pas avant, ils se rassirent simultanément. Ils paraissaient un peu plus fatigués qu’auparavant, l’esprit plus chargé de soucis, mais je ne doutais pas qu’ils nous écouteraient jusqu’au bout.

– Mlle Hamilton, M. Hamilton, commença gravement le général le plus âgé, après concertation, nous sommes prêts à étudier plus en détails les études et analyses auxquelles vous faites référence. Voici Burke.

Je remarquai alors la présence d’un seizième Lune, mais il ne s’agissait pas d’un général. Il portait une tenue bien moins officielle et ressemblait plus à un secrétaire avec son ordinateur sous le bras.

– C’est un peu...notre Michael, expliqua le général. Il se chargera de récupérer chacun de vos documents.

– Très bien, mon Général.

Sans plus attendre, Burke alla s’asseoir à côté de Michael et ils commencèrent immédiatement les transferts de données. Ayant envisagé ce scénario, je m’étais assurée avec ce dernier qu’en cas de transfert, ils ne récupérassent rien de plus que souhaité.

– Mais je tiens tout de même à être clair, repris le général, quand bien même la véracité de ces études serait confirmée, nous ne croyons toujours pas en une société égalitaire où les Lunes pourraient simplement vivre comme les autres, et cela simplement parce nous terrifions les hommes. Ils ne perdraient pas un instant pour nous chasser comme des animaux et nous abattre. Sans parler de tous les Lunes qui refuseraient un nouveau régime.

Je joignis les mains de manière compréhensive.

– Je comprends bien votre réticence, personne ici ne dit que ce sera facile. Toutefois, ce n’est pas impossible. Les préjugés, les comportements, les habitudes, ce ne sont que des normes sociales, des conventions. Cela prendra du temps, mais nous avons l’intention de briser toutes les normes que l’on nous inculque depuis 8 ans et cela passe par deux choses : l’éducation et la sanction. Dès lors que nous commencerons à informer les gens sur nos conditions réelles, dès lors que l’on cessera d’élever les humains comme une élite, les Soleils comme des soldats et les Lunes comme des monstres, les gens adopteront de nouvelles normes sociales. Pour ce qui est des opposants, des lois seront votées contre l’intolérance et les sanctions seront exemplaires.