II - Chapitre 40

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Savannah


Luke retourna alors s’asseoir un peu plus loin et fit signe à l’inverse à ses Lunes de s’approcher de moi. Pendant les quelques heures qui suivirent, Luke ne bougea pas de sa chaise mais continua de me poser la même question à chaque fois qu’une de ses brutes venaient de finir le sale travail. Bien sûr, sa question était toujours sans réponse et elle le resterait. J’avais peut-être passé plus d’un an avec un incroyable pouvoir d’auto-guérison, je n’en avais pas oublié comment supporter la douleur pour autant. Chaque goutte de sang versée, chaque tendon rompu, chaque articulation déboîtée et chaque os brisé ne faisait qu’alimenter la haine que je lui portais et nourrir la foi que j’avais en mes amis et ma famille de remporter cette guerre pour moi.

Comme promis, Luke se chargea en revanche lui-même de m’injecter une nouvelle dose de paralysant le moment venu. Je m’attendais à ce qu’il retourna s’asseoir, mais il choisit de rester debout au-dessus de moi, son habituel air suffisant sur le visage.

– Tous tes efforts finiront par être vains, Savannah. Nous allons trouver Elizabeth et nous allons la tuer lentement. Nous allons découvrir tout ce que vous cachez et ruinez le minable espoir que vous aviez de voir la lumière au bout du tunnel. Nous allons mettre la main sur ton père et sur chaque putain de Hamilton de ta famille et nous allons prendre un plaisir monstre à les briser un à un tandis que nous prendrons le contrôle des États-Unis. Ce n’est qu’une question de temps avant que tu ne craques et que tu ne nous facilites le boulot, parce que la vérité – et nous le savons tous les deux – c’est que tu es lâche.

Il se pencha au-dessus de mon visage et planta un regard dur dans le mien.

– Tu n’es pas une courageuse combattante qui marquera l’Histoire. Tu es lâche et faible et tu finiras par abandonner comme tu as abandonné Elizabeth au pensionnat, comme tu as abandonné ses parents dans les bois, comme tu as abandonné ton amant Lune à la seconde où l’on vous a découvert et sans la moindre doute, comme tu as froidement abandonné Scandola.

Je savais très bien ce qu’il était en train de faire. Je savais qu’il n’était même pas un si bon manipulateur et que montrer la moindre réaction était déjà le laisser gagner, pourtant entendre ses mots me fit bien plus mal que tout ce que ses Lunes avaient pu me faire un peu plus tôt.

– Ce pauvre Jeremy, continua-t-il avec un froncement de sourcil faussement navré. Lui qui a toujours été à tes côtés, lui qui t’as sauvée un nombre incalculable de fois, lui qui t’as même accueillie chez lui et surtout, lui qui t’as aimée tellement plus que tu ne le mérites… Tu n’as pas pu t’en empêcher, hein ? Tu l’as trahi à son tour parce que c’est tout ce que tu sais faire.

Je détournai le regard, la gorge serrée malgré moi.

– Laisse-moi deviner, je n’ai aucune idée de quoi je parle ? Pourtant, je n’ai aucun doute sur le sujet et tu sais pourquoi ? La seule et unique raison pour laquelle le grand Jeremy Scandola n’est toujours pas là, en train de se battre pour te sauver, c’est parce que tu lui as planté un poignard dans le dos et qu’il ne veut plus jamais te voir. Je me trompe ?

À défaut de pouvoir lui envoyer mon poing dans la gueule, je profitai de sa proximité pour lui donner un de mes plus beaux coups de boule. Il recula brusquement en portant une main à son nez, mais au lieu de grogner de douleur, il se mit à rire.

– Ah la la, si prévisible…

Il n’eût pas à prononcer le moindre mot pour que ses Lunes fondissent à nouveau sur moi, pendant qu’il essuyait délicatement le sang qui coulait de son nez. Je remarquai alors que ce dernier avait dû prévenir mes tortionnaires que cela durerait un moment, car ils s’acharnèrent sur mes plaies déjà ouvertes plutôt que de s’en prendre aux parties de mon corps encore intactes, comme pour les réserver pour les prochains jours. Malgré toute ma volonté, des premières larmes et cris de douleur commencèrent à m’échapper.

Fille du Ciel [FDS tome 3]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant