Chapitre 17. La vie ne m'apprend rien

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« La vie ne m'apprend rien
Je voulais juste un peu parler, choisir un train
La vie ne m'apprend rien
J'aimerai tellement m'accrocher, prendre un chemin
Prendre un chemin »

Ma mère est toujours en colère, nous avons dit au revoir à Mohamed, elle a été d'une rare sècheresse avec lui.

— Écoute, me dit-elle une fois dans le métro, je crois qu'il faut qu'on ait une vraie discussion avec ton père. Lui et moi. Puis avec toi.

J'opine de la tête, maintenant j'ai presque peur pour le couple de mes parents, il lui a caché un quelque chose d'assez énorme pendant plusieurs années, elle ne risque pas de lui pardonner tout de suite.

Lorsqu'il nous voit arriver à l'appartement, je sens aussitôt qu'il n'est pas très serein. En même temps le visage de maternel est univoque. Elle est furieuse.

— Ça s'est bien passé ? demande-t-il, Vous avez l'air bizarre.

— Tu crois ?

La voix d'habitude si douce de ma mère vient de claquer comme un coup de fouet. Il passe sa main dans ses cheveux, l'air soudainement mal à l'aise.

— Iris va dans ta chambre s'il te plaît, je t'appelle.

C'est sans doute la première fois de ma vie que j'obéis sans réplique à un ordre maternel. Passant devant mon père et son air ahuri je m'enferme dans ma chambre et colle mon oreille à la porte.

— Elle t'a dit ?

Oui Papa, j'ai craché le morceau.

— Oui. J'arrive pas à croire que tu n'aies pas jugé bon de m'en parler. Je sais pas si tu sais ce que ça fait d'apprendre quatre ans après, que sa fille a été détournée par le plus gros connard que cette terre ait porté, et qu'en plus son père l'a forcée à avorter dans le plus grand secret ! Qu'est-ce qui vous a pris avec Sneazz ? C'est quoi ça ? Depuis quand c'est lui l'autre parent d'Iris ?

Mon père ne répond pas tout de suite, j'entends du mouvement dans le salon.

— Beauté je... T'étais à l'hosto, Sneazz gérait... Il a fallu agir vite. Viens, on va marcher, on en parle tranquillement.

— Je ne veux pas marcher avec toi. Ken, ma fille m'a exclue de sa vie pendant dix-huit ans, et je découvre que son père, mon mari, dont je partage chaque journée depuis vingt ans, m'a lui aussi complètement mise à l'écart ! Si tu voulais éduquer des enfants avec Sneazz, c'était lui qu'il fallait épouser ! Le pire, le pire c'est que t'as même pas su bien gérer la crise ! Regarde sur quoi ça a débouché, elle a failli mourir et elle nous hait tous les deux !

Un des deux vient de renifler, ils pensent vraiment que je n'entends rien ? Ils parlent si fort. C'est assez étrange d'entendre ma mère s'enflammer à ce point. Pour moi. Peut-être que finalement, c'est elle qui m'aime plus que lui.

— On a fait ce qu'on a pu... J'avais tellement peur pour toi... Clem t'étais dans un tel état. J'ai eu peur que ça t'achève. Et puis après je ne voulais pas que tu fasses une rechute...

Voilà. C'est exactement ce que je lui reproche. Il n'a pas fait ce qu'il a pu, il m'a juste abandonnée parce que je n'étais pas assez importante.

— Ken ! Notre fille a voulu mourir ! Notre fille s'est ouvert les veines dans notre baignoire ! Parce qu'on l'a complètement abandonnée ! Parce que tu m'as empêchée de l'aider en me cachant sa souffrance ! Tu te rends compte ou pas ? Ça fait deux ans que je te demande tous les soirs ce qui a bien pu la pousser à commettre un tel acte, ça fait deux ans que tu me dis "On ne peut jamais vraiment expliquer ce genre de choses". Mais qui es-tu ? C'est ça l'homme que j'aime ?

Ce qu'on laisse à nos mômesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant